Le ministère de l'Immigration reconnaît avoir été «surpris» par l'achalandage massif sur son nouveau portail «Mon projet Québec», dont les ratés ont forcé Québec à retarder les demandes de milliers d'immigrants potentiels. Mais les candidats à l'immigration ne sont pas les seuls à avoir pris le site d'assaut: des pirates informatiques ont mené plus de 2000 attaques en un peu plus d'un mois, révèle en entrevue le sous-ministre Younes Mihoubi.

Plus de 2000 attaques informatiques ont été bloquées sur le portail «Mon projet Québec», révèle M. Mihoubi. Il assure qu'aucune des informations enregistrées sur le site n'a été compromise. Le ministère de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion (MIDI) avait fait appel aux services d'une firme pour assurer la sécurité du site.

Le nombre «énorme» d'attaques, de l'aveu même du sous-ministre, est causé par la grande popularité du site et par le contexte géopolitique mondial qui pousse de nombreuses personnes à fuir leur pays. «Il va y avoir des gens qui vont faire tout ce qu'ils peuvent pour pouvoir immigrer», résume M. Mihoubi.

Robots

Sur les 150 millions de clics depuis la mise en service du portail, 20% ont été faits par des robots. «Il y a des gens qui ont été un peu plus malins, relate M. Mihoubi. Il y a des robots qui font les essais à leur place. Ils essaient quasiment de façon continue de se connecter jusqu'à ce qu'il y ait une place qui se libère.» L'engorgement du site a encouragé plusieurs internautes à recourir à ce stratagème. Mais lorsque des robots ont été détectés, leur adresse IP a été désactivée par le Ministère.

Accès amélioré... un peu

Depuis le 5 janvier, les candidats à l'immigration doivent remplir leur demande en ligne sur le portail «Mon projet Québec». Les formulaires en papier ne sont plus acceptés. Or, comme le site est instable, le MIDI a d'abord limité à 150 le nombre d'internautes qui peuvent s'y connecter en même temps. On a depuis amélioré la performance du système, dit M. Mihoubi. Près de 500 internautes peuvent accéder au site à la fois. Mais cela reste largement insuffisant: le Ministère estime que 2,9 millions d'internautes ont tenté de se connecter depuis le début de l'année.

«Surpris» par l'affluence

Le Ministère admet qu'il n'avait pas prévu une telle affluence sur son site. La dernière fois qu'il avait ouvert 3500 places en vertu du programme des travailleurs qualifiés, il avait reçu 8000 demandes papier. Cette fois, il y a 2800 places ouvertes. Et près de 42 000 personnes avaient créé un dossier sur le portail «Mon projet Québec» en date de jeudi dernier. «On a été un peu surpris par l'ampleur de la demande», reconnaît M. Mihoubi. Selon lui, la facilité à remplir une demande en ligne explique en partie le phénomène.

Demain, 8 h 30

Les candidats à l'immigration au Québec ont encerclé la date du 16 février sur leur calendrier. À 8 h 30 précises, plus de 30 000 candidats à l'immigration tenteront de se connecter au site «Mon projet Québec» pour transmettre leur demande. Comme les demandes seront traitées selon le principe du premier arrivé, premier servi, le MIDI s'attend à un «engorgement» du site, convient M. Mihoubi. «Il va y avoir un certain goulot d'étranglement parce que tout le monde va se "garrocher" le 16 février sur la solution pour être parmi les 2800 premiers.»

Aucune pénalité

La firme CGI est le principal maître d'oeuvre du portail «Mon projet Québec», un projet qui a coûté plus de 1 million. La firme ne paiera pas un sou de pénalité malgré le cafouillage. Pourquoi? À cause du type de contrat privilégié par le MIDI. «On avait besoin d'un certain nombre de profils au niveau technologique et on avait estimé un certain nombre d'heures, explique M. Mihoubi. CGI nous a fourni ces ressources.»

Nouvelle approche

Le Ministère compte changer sa manière de traiter avec les firmes informatiques à l'avenir. Il optera pour des contrats de type «forfaitaire» dans lesquels les fournisseurs seront responsables de la création, par exemple d'un portail web, de A à Z. Ils s'exposeront à des pénalités si leur produit est livré en retard, ou s'il ne fonctionne pas.