Québec veut mettre au pas les entreprises qui affichent leur marque exclusivement en anglais, mais promet d'agir avec «souplesse» et est même prêt à tenir compte des coûts pour les détaillants.

La ministre responsable de la Protection et de la Promotion de la langue française, Hélène David, a annoncé, mercredi, des changements à venir à la réglementation sur l'affichage extérieur. Toutefois, elle a gardé le flou sur les dispositions qui seront déposées à l'automne, puisqu'elle n'a remis aucune ébauche à la presse.

Le gouvernement Couillard répond ainsi à une décision de la Cour d'appel, selon laquelle l'Office québécois de la langue française (OQLF) ne peut exiger des détaillants qu'ils accolent un descriptif en français à leur marque de commerce en anglais. Québec avait été débouté dans cette cause contre huit détaillants, soit Best Buy, Costco, Curves, Guess, Gap, Old Navy, Toys «R» Us et Walmart. C'est le juge de la première instance qui avait suggéré au Québec de légiférer.

Le ministère de la Justice renonce donc maintenant à en appeler et le gouvernement choisit plutôt de revoir la réglementation, plutôt que la loi 101 elle-même, évitant ainsi un processus législatif qui aurait pu ouvrir une boîte de Pandore au profit de l'opposition péquiste.

«Ce geste est nécessaire et prioritaire pour notre gouvernement puisqu'il concerne un fondement de notre existence collective et de notre culture, soit le visage français du Québec», a déclaré Mme David, en conférence de presse au terme de la séance du conseil des ministres, mercredi après-midi.

La ministre a assuré à plusieurs reprises que le gouvernement fera preuve d'une «certaine souplesse dans les possibilités» avec les grandes bannières et aussi les petits commerces, qui pourront ajouter soit un descriptif, un slogan, un générique, pourvu qu'il soit bien visible à l'extérieur.

Chose certaine, Québec ne touchera pas à la marque de commerce, qui est de compétence fédérale, et les entreprises seront consultées dans le processus. «Ils vont choisir entre différentes options que nous allons leur définir, et c'est ce travail que nous allons faire cet été, a dit Mme David. Mais on va vouloir que cet affichage de l'inscription française soit visible et permanent, visible, aussi visible que la marque de commerce.»

Mme David a bien pris soin d'éviter toute référence à des mesures contraignantes ou de surveillance, à des dispositions pénales en cas de non-respect de la réglementation. «Je n'aime pas les expressions 'police' et autres, parce que, dès qu'il y a un règlement dans la vie, bien, il faut habituellement le respecter», a-t-elle dit.

Cependant, elle a laissé entendre que la démarche choisie par le gouvernement passerait le test des tribunaux.

Dans ses consultations, Québec serait même prêt à examiner les coûts qu'auraient à assumer les entreprises pour modifier leur affichage. «Cela fait partie de toutes les questions que nous avons à analyser, a dit Mme David. Nous devons tenir compte des coûts de modification. Nous verrons quels sont les besoins.»

Le gouvernement souhaite l'entrée en vigueur des modifications réglementaires au début de 2016.

Mme David estime à environ 20 pour cent la proportion d'entreprises au Québec dont la marque de commerce est uniquement en anglais.

Le premier ministre Philippe Couillard avait déjà préparé le terrain auparavant à des gestes de son gouvernement à la suite du jugement défavorable de la Cour d'appel. Il avait indiqué que le fait d'ajouter un descriptif en français précédant le nom de la marque s'impose comme une simple marque de politesse à l'égard des Québécois, qui tient compte de leur réalité.