Le gouvernement du Québec lance un vaste plan de lutte à la radicalisation.

Plusieurs mesures seront mise en place afin notamment de prévenir des attentats terroristes comme ceux de l'automne dernier et d'éviter que des jeunes quittent le Canada pour grossir les rangs de groupes extrémistes, a expliqué la ministre de la Sécurité publique Lise Thériault.

«Les attentats de l'automne nous ont montré que nous ne sommes pas immunisés contre de telles choses», a dit la ministre en conférence de presse ce midi.

Neuf ministères sont mis à contribution, ainsi que plusieurs corps de police  et des ordres professionnels, dont celui des travailleurs sociaux.

Une étude sera aussi menée au collège de Maisonneuve, dont plusieurs élèves auraient quitté ou tenté de quitter le Canada avec l'intention de joindre la Syrie. Le but sera de comprendre ce qui pousse les jeunes vers la radicalisation.



Deux projets de loi déposés

Québec compte amender la Charte québécoise des droits et libertés pour éradiquer les discours haineux et les appels à la violence. Dans un projet de loi déposé mercredi à l'Assemblée nationale, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, propose de nombreuses dispositions pour la protection des individus ou des groupes susceptibles d'être visés par de telles menaces.

Le projet de loi 59 fait partie d'un programme en trois volets pour lutter contre la radicalisation et assurer la neutralité de l'État. Un autre projet de loi, 62, reprend l'essentiel des intentions du PLQ en matière d'accommodements raisonnables. Comme prévu, on n'empêche aucun signe religieux visible, à la différence de la Charte de la laïcité du gouvernement Marois. Seule obligation, les services doivent être donnés et reçus à visage découvert. Même les fonctionnaires qui n'ont pas de contact avec le public sont touchés, de même que les employés des garderies subventionnées, même en milieu familial. En revanche, les employés municipaux ne sont pas tenus de travailler à visage découvert. Le projet de loi sur la neutralité de l'État préserve aussi le patrimoine culturel pas question de déplacer le crucifix au dessus du président de l'Assemblée nationale.

À l'Assemblée nationale, le chef péquiste Pierre Karl Péladeau a rappelé que pour son parti il vaudrait mieux interdire le port de signes religieux aux personnes en autorité, comme les juges et les policiers. Pour François Legault, «le débat sur l'intégrisme a divisé la société québécoise, mais il est nécessaire». Pour lui avec les drames de Saint-Jean et d'Ottawa, les départs de jeunes vers la Syrie, «c'est la fin de l'innocence»; le Québec est confronté à de nouveaux défis. Pour Françoise David, les propositions sont un bon point de départ mais on peut se demander pourquoi les employés municipaux ne sont plus visés par les dispositions sur le visage découvert.

Sur le discours haineux, le projet de loi 59 reprend la définition du Code criminel: on ne peut pas s'attaquer publiquement à un groupe religieux, aux ressortissant d'un pays, aux homosexuels ou aux femmes, par exemple. Les communications publiques sont visées: un échange privé sur internet n'est pas interdit. La Commission des droits de la personne recevra les plaintes ou initiera des enquêtes dans ces dossiers et transmettra ses conclusions au Tribunal des droits la personne. Les contrevenants sont passibles d'amendes de 1000 à 10 000 $; des sanctions qui peuvent doubler en cas de récidive. Un fournisseur de service internet pourrait être forcé de retirer des propos controversés de son serveur.

La liste des contrevenants sera rendue publique sur internet.

Pour contrer les crimes d'honneur, on met en place une nouvelle «ordonnance de protection» que pourrait demander une personne qui sent que sa sécurité est en péril. On vise ici à prémunir les jeunes - ou mêmes les aînés - du «contrôle excessif» de sa famille ou de son entourage. Cette notion de «contrôle excessif» sera ajoutée aux dispositions de la Loi sur la protection de la jeunesse, conformément à un avis du Conseil du statut de la femme de 2013.

Finalement, pour réduire les risques de mariages forcés, le Directeur de l'État civil sera tenu de publier les unions annoncées sur son site. De plus, pour les mariages de personnes de 16 ou 17 ans, il sera obligatoire d'obtenir l'approbation d'un juge au préalable.

En outre, le ministre de l'Éducation aura le pouvoir de déclencher des enquêtes devant des comportements susceptibles de porter atteinte à la sécurité physique et morale des élèves. Les institutions permettant de tels enseignements sont susceptibles de perdre leurs subventions.