Le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, est en train de donner un coup de balai en informatique au gouvernement.

Il assure avoir resserré le contrôle sur les projets et les contrats informatiques après avoir posé une série de gestes au cours des derniers mois en vue «d'éviter les dérapages», selon ses mots.

Le ministre a demandé au Centre des services partagés du Québec (CSPQ), le plus grand donneur d'ouvrage en informatique pour le gouvernement, un vaste «repositionnement» et déjà le recours aux services externes est en baisse marquée de 30%. M. Coiteux planche aussi actuellement sur un nouveau projet de règlement sur les contrats informatiques, il a commandé un audit sur un des plus importants projets en cours, en plus d'avoir désigné son propre sous-ministre pour prendre en main l'informatique dans l'ensemble de l'État québécois.

Le gouvernement a été maintes fois critiqué par l'opposition, notamment la Coalition avenir Québec (CAQ), pour ses dépenses informatiques, la gestion des contrats et son recours à l'expertise à l'externe. On estime à pas moins de 3 milliards $ par année la valeur des contrats informatiques accordés par l'État québécois.

Dans une entrevue à La Presse Canadienne jeudi, Martin Coiteux a admis qu'«il y a des problèmes en informatique, mais on est en train de modifier des choses de façon très importante, de reprendre le contrôle par l'expertise interne».

Il a mandaté le PDG du CSPQ, Denys Jean, pour «transformer» l'organisation et la repositionner. Le CSPQ attribue la majorité des contrats informatiques de l'État. «Appelons ça le CSPQ 2.0, si on veut, a confié M. Coiteux en entretien téléphonique. (...)  Il a spécifiquement des missions en matière de gestion des effectifs, pour réduire la dépendance à l'égard des experts-conseils externes.»

Ce n'est pas un «mal en soi» d'avoir souvent des rapports avec des firmes externes, a-t-il précisé, mais ce recours de façon répétée et à long terme peut se faire au détriment du savoir-faire à l'interne. Signe d'un changement: entre février 2014 et décembre 2014, le nombre de «ressources externes» employées par le CSPQ est passé de 764 à 531, une baisse de 30 pour cent, selon les renseignements du Conseil du trésor.

De même, Martin Coiteux a délesté M. Jean de sa responsabilité de Dirigeant principal de l'information (DPI), en quelque sorte le grand conseiller du gouvernement sur les solutions informatiques, puisqu'il voyait un problème de «gouvernance» entre ces deux fonctions. Il l'a confiée plutôt à son propre sous-ministre, le secrétaire du Conseil du trésor, Yves Ouellet.

«Ça signale quelque chose, de désigner mon sous-ministre. Ça souligne que je veux un resserrement très important de tout le contrôle des projets informatiques pour éviter les dérapages. Laissez-moi vous dire que c'est quelqu'un qui travaille très fort en ce sens-là. Dans tous les dossiers informatiques, il est très 'hands-on'.»

M. Ouellet est notamment à l'oeuvre concernant les grands choix technologiques et les contrats publics, a précisé M. Coiteux. Il occupe toutefois le poste par intérim, jusqu'à ce qu'une autre personne remplisse ces fonctions à plus long terme.

Par ailleurs, le président du Conseil du trésor est actuellement en consultations pour rédiger son nouveau règlement sur les contrats informatiques. Ce nouveau cadre permettra à un plus grand nombre d'entreprises de soumissionner, entre autres, et il devrait mieux partager les risques avec l'entreprise privée, a-t-il assuré.

«On peut aller plus loin, pour faire mieux», a-t-il dit.

Les contrats seraient de plus en plus forfaitaires, pour l'ensemble du projet, plutôt qu'au tarif horaire ou journalier, pour éviter les dépassements. S'il y a des retards, les risques seraient assumés par le privé et non par le gouvernement, a suggéré M. Coiteux.

Le président du Conseil du trésor prévoit aussi présenter sous peu un meilleur instrument de mesure de l'avancement des vastes projets informatiques entrepris par le gouvernement. Son nouveau «tableau de bord» accessible à tous donnera davantage de renseignements de façon plus précise, sur l'évaluation des dépassements de coûts et des échéanciers.

«C'est plus objectif. La prochaine version va aller plus loin», a-t-il dit.

Enfin, M. Coiteux a également confié un audit sur le projet d'informatisation SAGIR, un des plus vastes chantiers informatiques du gouvernement, qui n'en finit plus d'aboutir. La CAQ soulignait que ce projet devait coûter à l'origine 80 millions de dollars mais qu'il a dépassé le milliard de dollars et a mis huit ans pour être en service.

Le projet SAGIR vise à implanter dans les ministères un programme de gestion des ressources humaines.