Échaudé par bien des échecs, le gouvernement Couillard avance avec circonspection sur la voie d'une nouvelle «réingénierie» de l'État. Des fusions et des disparitions d'organismes sont au menu de Québec pour les prochains mois, une opération qui, par exemple, amalgamerait la Commission de la santé et de la sécurité du travail (CSST) et la Commission des normes du travail (CNT).

La commande avait été passée il y a plusieurs semaines par le conseil exécutif auprès de l'ensemble des sous-ministres. Québec a devant lui quelques scénarios, qui supposent des regroupements, mais on veut s'assurer que les services ne seront pas altérés par la fusion d'organismes. Dans la plupart des cas, des lois devront être modifiées.

La CSST et la CNT réunies?

Parmi les idées les plus avancées, on a demandé à la CSST d'évaluer les avantages d'une fusion avec la Commission des normes du travail. Les deux organismes sont financés par les employeurs, seule la CNT émarge aux budgets de l'État. Les deux sont des guichets destinés aux travailleurs et aux employeurs dans le secteur du travail.

Faire disparaître un organisme présente des avantages à moyen terme; on fait table rase d'une direction des ressources humaines, d'un secteur de communications. À court terme, toutefois, les économies sont moins évidentes - la plupart des employés, syndiqués, doivent être réaffectés.

Une autre fusion examinée par Québec est celle de la Régie des rentes et de la Commission administrative des régimes de retraite (CARRA), qui sont dans les mêmes créneaux, la première pour l'ensemble de la population, la seconde pour les employés de l'État. Les retards et les erreurs de la CARRA, dans le calcul des prestations  contribuent à la volonté de Québec de procéder à ce mariage de raison.

D'autres fusions ont été examinées, mais l'intention, claire à l'automne, semble désormais s'être essoufflée. On voulait intégrer l'Institut de la statistique au ministère des Finances, mais l'organisme traite une foule de données qui n'ont rien à voir avec l'économie. Le statisticien en chef doit aussi être totalement indépendant du gouvernement, ce qui serait difficile s'il relevait d'un sous-ministre.

Autre avenue considérée: le ministère de la Culture avalerait une série d'organismes, dont la Régie du cinéma, mais encore là, les économies ne sont pas évidentes. La Régie s'autofinance et amène de surcroît des revenus au gouvernement.

Si Québec avance avec circonspection sur cette voie, c'est qu'elle est truffée de nids-de-poule. Dès son arrivée au pouvoir, en 2003, Jean Charest s'était fait fort de procéder à une «réingénierie de l'État». Sous la férule d'un ancien mandarin, Thomas Boudreau, on avait identifié 60 organismes dont la mission devait être réévaluée.

La présidente du Conseil du trésor, Monique Jérôme-Forget, avait annoncé deux ans plus tard la disparition de 22 organismes. Quatre organismes étaient réellement abolis, dont trois sociétés qui n'existaient plus que sur papier.

En 2011, même démarche, pilotée cette fois par Michèle Courchesne, avec passablement plus de succès. Le projet de loi 130 visait à faire disparaître Recyc-Québec ainsi que le ministère des Services gouvernementaux. Le Centre des services partagés passera sous le Conseil du trésor, un simple changement de tutelle. Recyc-Québec restera intact. La Corporation d'hébergement du Québec sera fusionnée avec la Société immobilière du Québec. La Société générale de financement (SGF) sera avalée par Investissement Québec. Mme Courchesne était aussi parvenue à obtenir la disparition de plusieurs organismes-conseils.

- Avec Tommy Chouinard