Les amis du régime libéral remplacent les mandarins d'obédience péquiste. Mais le salaire ne diminue jamais au paradis des hauts salariés du gouvernement. Les seuls qui passent à la caisse sont finalement les contribuables.

La Presse a demandé, en vertu de la Loi sur l'accès à l'information, la liste des déplacements dans la haute fonction publique, soit les postes de sous-ministre, sous-ministre adjoint et secrétaire général qui ont changé de titulaire depuis les dernières élections. Une longue liste de hauts salariés qui, beau temps, mauvais temps, ne voient pas leurs conditions de travail diminuer.

Premier exemple: Mario Albert, ex-président de l'Autorité des marchés financiers, devenu patron à Investissement Québec sous le gouvernement Marois. Il n'occupe plus cette fonction depuis l'été; il a réintégré son ministère d'origine, les Finances, mais il a conservé son salaire (389 714$ par année).

Hubert Bolduc était responsable de l'ensemble des communications gouvernementales dans le gouvernement Marois. Dès le lendemain des élections, on l'a envoyé, avec sa permanence, à un poste plus obscur à Investissement Québec, au même salaire (208 000$). Cela a permis de placer Christian Lessard, un des principaux conseillers de M. Couillard durant la campagne électorale, à ce poste très convoité et tout autant rétribué.

Juliette Champagne était sous-ministre aux Relations internationales, chef du protocole sous Pauline Marois. Elle a été envoyée sur une voie de garage, à l'École nationale d'administration publique (ENAP), tout de suite après le scrutin, mais son salaire est maintenu à 146 000$. Sylvie Barcelo, associée au PLQ, avait été envoyée dans une sinécure, un poste de vice-présidente à la Régie des rentes. Avec le retour des libéraux, elle a été propulsée sous-ministre aux Affaires culturelles, à 202 000$.

Christian Barrette, ancien attaché de presse de Jean Charest, était en réserve de la République à la Société d'assurance automobile. Depuis l'été, il est sous-ministre adjoint aux Aînés et conserve son salaire de 151 000$.

Ann Champoux, ex-chef de cabinet de Christine Saint-Pierre à la Culture, était sur une voie d'évitement à la Régie des installations olympiques. Elle a obtenu un contrat à long terme à la tête de la Régie du cinéma, à 154 000$. Marie-Claude Champoux était aussi au rancart, comme présidente par intérim de la Commission des normes du travail (202 000$); cette ancienne du cabinet de Jean Charest est devenue sous-ministre à l'Éducation après le scrutin (208 000$). À la CNT, elle est remplacée par Jean Saint-Gelais, ancien secrétaire général sous Pauline Marois, qui conserve son traitement de 318 000$ par année.

La liste ne tient pas compte des nouveaux arrivants, comme Pietro Perrino, autre apparatchik libéral (179 000$), ou le patron de tous les fonctionnaires, Roberto Iglesias (310 000$).

Responsable de toutes ces nominations, André Fortier, ancien chef de cabinet de Claude Ryan, ne s'est pas oublié; il était parqué à l'ENAP, à 179 000$, et est devenu secrétaire général associé aux emplois supérieurs (197 000$).

Ancien conseiller de Guy Chevrette, mais haut fonctionnaire depuis des années, Charles Larochelle n'a pas échappé au radar. Pauline Marois l'avait nommé à la barre de la Société d'habitation du Québec (SHQ), et il est devenu membre de la Commission municipale, toujours à un salaire de 179 000$. Michel Gagné, un ancien des cabinets libéraux, a pris les commandes à la SHQ. D'obédience péquiste aussi, mais mandarin depuis des lunes, Gilbert Charland avait connu un long hiver à l'ENAP. Sous les libéraux, il était devenu président de la Commission municipale; ensuite, sous le PQ, sous-ministre dans le ministère à construire, soit l'Enseignement supérieur. Bien apprécié chez les libéraux, il a été maintenu sous-ministre, mais à l'Environnement. Son salaire n'a pas bougé, à 208 000$.

Marc Lacroix, parqué à l'ENAP sous le PQ, est devenu président de la Commission de la fonction publique, avec le même salaire, soit 208 000$. L'ancienne directrice de la Ville de Montréal Rachel Laperrière l'a remplacé dans la tranquillité de l'ENAP; de sous-ministre à la Culture, elle est devenue «administratrice invitée», mais toujours au même salaire de 175 000$. Une autre déportée à l'ENAP, Josée Tremblay, qui était sous-ministre pour la Capitale-Nationale, conserve son salaire de 148 000$.

Martin Philippe Côté, ancien chef de cabinet de Bertrand Saint-Arnaud à la Justice, avait été nommé sous-ministre aux Finances (Tourisme) à 148 000$. Le gouvernement Couillard l'a nommé, au même salaire, à des fonctions moins stratégiques, à Infrastructure Québec. Jean-Philippe Marois, bras droit de Jean-Marc Fournier pendant des années, sort du même organisme et devient sous-ministre à l'accès à l'information, sous son ancien patron politique. Son salaire passe de 150 000 à 157 000$.

Marc Croteau, ancien chef de cabinet de Jean Charest, puis sous-ministre aux Relations internationales, a connu une résurrection. Relégué à l'ENAP sous le PQ, il est devenu sous-ministre du Tourisme, toujours à 202 000$. Marie-Claire Ouellet, secrétaire générale aux communications sous Jean Charest, est devenue son bras droit, tout en conservant son traitement de 191 000$. Raymond Lesage, lui aussi de la garde rapprochée de Jean Charest, avait été parqué au Centre des congrès de Québec, à 179 000$; il revient aux Ressources naturelles comme sous-ministre adjoint, au même traitement. Une autre sous-ministre libérale, envoyée en touche au Centre de la Francophonie par le PQ, Marie-Claude Francoeur, est devenue déléguée du Québec à Boston, et a conservé son salaire de 154 000$.

Mario Laprise était le patron de la Sûreté du Québec (SQ) sous le gouvernement péquiste; il est retourné en «prêt de service» à son ancien poste à Hydro-Québec, mais la SQ paie toujours son salaire de 194 000$ par année. Martin Prudhomme, qui le remplace à la SQ, était auparavant sous-ministre à la Sécurité publique. Son salaire reste le même (208 000$).

Pierre Hamelin, longtemps dans les cabinets libéraux aux Finances, était sur une voie de garage sous le PQ, à 180 000$. Après les élections, il a été nommé secrétaire général aux priorités, à 197 000$. Georges Farrah, ancien député du PLQ, était resté à la Société des traversiers pendant le mandat Marois, à 165 000$. Il est devenu depuis chef d'orchestre de la «stratégie maritime», à 178 000$.

- Avec la collaboration de Serge Laplante