La ministre de la Sécurité publique, Lise Thériault, trouve «questionnable» la baisse de la cote de sécurité accordée à trois dangereux détenus avant leur évasion du Centre de détention de Québec samedi soir. Mais elle a refusé de répondre aux questions sur les motifs ayant justifié cet assouplissement des conditions de détention.

Québec a expliqué en fin de journée que la décision découlait d'un jugement de la cour frappé d'une ordonnance de non-publication. La ministre laissait pourtant entendre un peu plus tôt que la décision du juge était de nature publique.

La confusion a régné toute la journée au sein du gouvernement au sujet des circonstances ayant mené à cette évasion spectaculaire, la deuxième du genre à survenir en 15 mois dans un établissement québécois.

Lise Thériault a d'abord été forcée de corriger le tir après avoir déclaré que le gouvernement Marois avait fait l'achat de câbles d'acier et de filets pour éviter la répétition d'une évasion par hélicoptère comme celle survenue à Saint-Jérôme en mars 2013, mais que ceux-ci n'avaient jamais été installés. Or un tel matériel n'a jamais été acheté, a-t-elle reconnu quelques heures plus tard, reprochant au Parti québécois d'être à l'origine de cette confusion.

Toujours lors d'un bref point de presse, Lise Thériault a confirmé qu'un juge a ordonné d'assouplir les conditions de détention des détenus à la suite de requêtes présentées par leurs avocats. La décision de la cour serait survenue vendredi dernier, donc la veille de l'évasion, selon ses informations qui doivent être «vérifiées» parce que «peut-être erronées». Son cabinet n'a pu confirmer ses propos en soirée.

En attente de procès pour meurtre, les trois détenus ont été, en outre, exemptés de menottes, indiquait ce week-end le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec. Leur cote de sécurité a été abaissée graduellement au cours des dernières semaines, selon lui.

«C'est sûr que [cette décision] est questionnable. [...] Je me suis moi-même posé la question: est-ce normal? Est-ce qu'on aurait dû faire les choses de manière différente? Ça fait partie du questionnement et des réponses qui seront à donner», a affirmé Mme Thériault.

La ministre a soutenu qu'elle ignorait tout des motifs ayant mené à cette décision. «Moi, je ne peux pas avoir toute l'information. J'ai l'information qui ne nuit pas aux enquêtes, qui ne nuit pas à la sécurité», disait-elle. Or son cabinet a indiqué qu'elle connaissait ces motifs mais qu'elle ne pouvait en parler car le jugement est frappé d'une ordonnance de non-publication.

«Devoir de réserve»

Lise Thériault s'est retrouvée sur la sellette lors de la période des questions à l'Assemblée nationale. Le chef parlementaire du Parti québécois, Stéphane Bédard, a demandé à Lise Thériault d'expliquer pourquoi, par exemple, le ministère public n'a pas fait appel de la décision du juge. «La seule chose que je peux répondre, c'est que l'information sera rendue publique au moment opportun», a-t-elle répondu. Elle a plaidé qu'elle a un «devoir de réserve» à titre de ministre de la Sécurité publique et qu'elle ne veut pas «s'ingérer dans l'enquête». Elle a toutefois mentionné que les requêtes des avocats des détenus ont été déposées le 21 mars.

Selon Lise Thériault, dès samedi soir, les directeurs des centres de détention du Québec ont reçu la consigne de revoir leurs mesures de sécurité. Un plan d'action préparé sous le gouvernement Marois après l'évasion de Saint-Jérôme sans avoir été «déployé» jusqu'ici sera mis en application «le plus rapidement possible», a-t-elle indiqué.

À la sortie du caucus du Parti québécois, l'ex-ministre de la Sécurité publique, Stéphane Bergeron, a affirmé que l'installation de câbles et de filets avait été envisagée pour ensuite être écartée en raison des coûts.

- Avec Denis Lessard et Martin Croteau

PHOTOS FOURNIES PAR LA SÛRETÉ DU QUÉBEC

Denis Lefebvre, Serge Pomerleau et Yves Denis.