Le gouvernement du Québec, chaque 17 avril, devrait mettre en berne le fleurdelisé qui flotte au-dessus de l'Assemblée nationale, pour marquer l'anniversaire du rapatriement unilatéral de la Constitution canadienne, croit Pierre Karl Péladeau, nouveau député péquiste de Saint-Jérôme.

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«Quoi qu'on dise, quoi qu'on fasse, ce dossier n'est pas clos. À cet égard, nous avons collectivement un devoir de mémoire, lequel pourrait s'illustrer par la mise en berne de notre fleurdelisé à chaque 17 avril», a écrit Pierre Karl Péladeau le jour même où la première ministre Pauline Marois faisait ses adieux. La sortie de M. Péladeau tranche avec l'attitude de Philippe Couillard qui, après avoir rencontré en privé la première ministre démissionnaire, avait choisi de garder un profil bas.

Dans un texte transmis hier à La Presse depuis son adresse courriel de Québecor, M. Péladeau souligne que les Québécois ont un «devoir de mémoire» envers les gestes qui ont été posés par le gouvernement Trudeau à l'époque, en dépit de l'opposition du gouvernement du Québec.

Pierre Karl Péladeau se trouve présentement en Europe. Joint hier, son ex-bras droit à Québecor, Martin Tremblay, avouait ignorer la raison de ce voyage et pourquoi son ancien patron, devenu politicien, se servait encore de son adresse courriel de Québecor, dont il possède toujours 40% des actions avec droit de vote.

«Il y a 32 ans aujourd'hui, la reine Élisabeth II signait la Proclamation permettant l'entrée en vigueur de la Loi constitutionnelle de 1982. Cette signature donnait suite à un accord entre Pierre Trudeau et les neuf autres premiers ministres de la fédération canadienne, à l'exclusion de René Lévesque», rappelle M. Péladeau.

Pour lui, «quelques mois auparavant, la Cour suprême, dans une décision historique, avait désarmé le Québec en lui faisant perdre son droit de veto». Cette décision permettait au fédéral d'ignorer «les fondements historiques mêmes de la fédération antérieurement défendus à la fois par le Parti québécois et le Parti libéral du Québec».

«Pierre angulaire de notre avenir collectif»

«Contrairement à ce qu'on veut nous faire croire aujourd'hui, cet événement constitue la pierre angulaire de notre avenir collectif et nous impose de graves conséquences», résume M. Péladeau.

Déjà «gravissime», ce constat est devenu plus grave encore, dit-il, quand on prend connaissance des recherches de l'historien Frédéric Bastien, selon qui deux juges du plus haut tribunal ont partagé des informations confidentielles avec le monde politique, au mépris du principe de la séparation des pouvoirs. Conséquence du rapatriement, «nous avons d'abord perdu notre compétence exclusive en matière d'éducation, ce qui voulait dire que la loi 101 pouvait être déclarée invalide en vertu de la Charte des droits. Les magistrats fédéraux ont invalidé à trois reprises cette législation depuis 1982, autant de décisions qui fragilisent notre avenir», observe M. Péladeau.

Il poursuit: «La Charte et le gouvernement des juges fédéraux ont également servi à nous imposer le multiculturalisme canadien. Le principe consiste à banaliser et saper la culture québécoise sur le territoire même du Québec. Voilà comment les magistrats nommés par Ottawa ont permis chez nous les accommodements raisonnables, diminuant la propension des néo-Québécois à s'intégrer à la majorité francophone et à nos valeurs de générosité et de solidarité.»

À cause du rapatriement, selon lui, le Québec n'est plus le «foyer national d'un des peuples fondateurs du Canada. Il a été rabaissé au rang d'une province comme les autres où divers groupes cohabitent en vertu de diverses valeurs, règles et cultures».

Pour lui, «en ce funeste jour», le chef libéral Philippe Couillard devrait répondre aux questions qu'il se posait publiquement en campagne électorale. À Ottawa, les gouvernements de Pierre Trudeau et de Jean Chrétien ont multiplié les promesses de renouvellement du fédéralisme. Dans les faits, ces engagements se sont plutôt soldés par l'adoption de la Loi sur la clarté référendaire, «ni plus ni moins une négation du droit des Québécois à l'autodétermination». Le gouvernement fédéral, estime-t-il, «a fait l'exact contraire de ce qu'il avait promis».