Pauline Marois refuse de s'engager à déposer un budget avant de possiblement déclencher des élections. «Ce que je peux dire, c'est qu'il y a un budget en préparation depuis quelque temps», a-t-elle répondu.

C'était son premier affrontement en chambre avec Philippe Couillard, qui faisait son retour à l'Assemblée nationale comme chef libéral. 

«Oui ou non?», a demandé le chef libéral à deux reprises, pour savoir si un budget précéderait les élections. C'est pour lui une question de «transparence et de respect». Les Québécois doivent connaître les chiffres complets, avec un budget des dépenses, avant de faire un choix dans l'urne.  

Mme Marois ne croit pas que cela poserait problème. «La vérité sur les chiffres, les Québécois et Québécoises l'ont eue à l'occasion de la mise à jour budgétaire (en novembre dernier)», a-t-elle répondu. «Les grands équilibres n'ont pas changé», a-t-elle ajouté.

Songe-t-elle à renverser son gouvernement et déclencher des élections? «Il n'y a pas d'élections qui sont prévues dans les jours qui viennent», a-t-elle dit.

L'opposition s'est mise à rire en l'entendant parler de «jours qui viennent». 

«Ni dans les semaines (à venir)», a-t-elle alors ajouté.

M. Couillard a rappelé que 67 000 emplois à temps plein ont été perdus l'année dernière au Québec. Et que l'agence de notation Fitch a placé la cote de crédit du Québec sous surveillance.

Après les deux mains sur le volant, la vision

Juste avant la période de questions, la première ministre a accueilli M. Couillard avec un discours pré-électoral.  En 2008, Jean Charest déclenchait une élection pour avoir «les deux mains sur le volant» afin d'affronter la crise économique. À la tête elle aussi d'un gouvernement minoritaire, Mme Marois demande maintenant l'appui de l'opposition majoritaire pour appliquer sa «vision» afin de profiter de «la relance mondiale qui est en train de se matérialiser».

«Les Québécois nous ont élus pour que nous collaborions», a-t-elle lancé à l'opposition, sur le ton de l'ultimatum.  

«Au cours des prochaines semaines, nous accorderons une grande place à l'économie dans la conduite de nos travaux», a poursuivi la première ministre. Elle a mentionné sa politique industrielle et sa politique d'électrification des transports dévoilées l'automne dernier. Elle a répété ce qui sera un des slogans de sa prochaine campagne: «à l'austérité nous préférons la prospérité».

Un slogan qui n'impressionne pas la Coalition avenir Québec (CAQ). Le chef François Legault rappelle que l'ancien premier ministre Jacques Parizeau a dit que pour la première fois depuis 30 ans, l'économie québécoise l'inquiète. Il accuse Mme Marois de manquer de «courage» pour limiter la hausse des dépenses, rendue à plus de 3% par année. La cible était initialement de 1,9%. Elle a été haussée à 2,5% en novembre, mais cette cible semble encore en voie d'être ratée.

La CAQ récolte moins de 20% des intentions de vote. «On a réussi à faire passer notre message sur le ménage, mais on n'a pas réussi à faire passer notre message que grâce à ce ménage, on est le seul parti capable de faire baisser les taxes», a avoué M. Legault, qui croit pouvoir faire ce travail en campagne électorale.

L'accueil de Gautrin

Pour son retour à l'Assemblée nationale, M. Couillard avait un caillou dans son soulier. Son député Henri-François Gautrin, qui a prédit hier un gouvernement péquiste possiblement majoritaire si les Québécois votaient aujourd'hui, concède qu'il n'a «pas été mal cité».

«Mais on va gagner la prochaine campagne électorale», a tenu à assurer M. Gautrin peu avant le caucus libéral, visiblement embarrassé.

M. Couillard jure que le moral des troupes est bon. «(M. Gautrin) s'est expliqué, il n'y a rien d'autre à ajouter, on va former un gouvernement libéral majoritaire», a-t-il lancé.

«C'est plate de voir M. Gautrin dire ce qu'il a dit, mais il l'a corrigé après», a réagi le libéral Sam Hamad.

La déclaration maladroite de M. Gautrin est-elle une surprise ? «Non, ça ne me surprend pas», a répondu le libéral André Drolet, avant de rire et de tourner les talons.