Tout indique que la tradition sera maintenue: la mise à jour économique et financière, attendue sous peu, sera rendue publique sans avoir passé le test du vérificateur général.

L'opposition aura pourtant tout tenté pour mettre le vérificateur dans le coup. Ce dernier se retrouve pris dans une souricière, happé dans un débat partisan entre libéraux et caquistes, d'un côté, et péquistes de l'autre, sur le bien-fondé de joindre les résultats d'un examen fouillé du vérificateur général à la mise à jour économique que doit déposer le ministre des Finances d'ici un mois.

L'opposition libérale, appuyée par la Coalition avenir Québec, a bien tenté, lundi, en commission parlementaire, de faire dire au vérificateur général par intérim, Michel Samson, que le ministère des Finances faisait preuve «d'obstruction» à son égard en reportant à plus tard le dépôt de documents relatifs à la mise à jour.

Mais M. Samson, tenu à la neutralité politique, n'a pas bronché, refusant de blâmer qui que ce soit, pour simplement constater que la vérification prévue ne se déroulait pas au rythme souhaité.

«Je ne qualifierai pas: est-ce que j'ai la bonne ou la mauvaise collaboration (du ministère des Finances)», a dit M. Samson, en point de presse, après avoir été sur le gril pendant deux heures, en commission parlementaire.

«On aurait souhaité que les travaux se déroulent plus rapidement, plus promptement», a-t-il toutefois concédé, se disant soucieux de satisfaire son «seul et unique client, l'Assemblée nationale».

Traditionnellement, la mise à jour économique, publiée entre deux budgets pour faire le point sur les finances de l'État et les prévisions économiques, ne fait pas l'objet d'un examen du vérificateur général. Mais les libéraux et les caquistes ont joint leurs efforts, le 24 septembre, pour faire adopter par l'Assemblée nationale une motion enjoignant M. Samson à examiner les données apparaissant dans la mise à jour, et à indiquer le jour même de sa publication s'il les endossait.

M. Samson a jugé que la demande était fondée et que la loi l'autorisait à donner suite à cette requête, ce que contestent les fonctionnaires du ministère des Finances, de même que le gouvernement, soulevant l'ire des partis d'opposition qui ont convoqué le vérificateur général en commission parlementaire pour faire la lumière sur son mandat et ses prérogatives.

«Qui fait obstruction?», lui ont demandé lundi, à répétition, le porte-parole en finances des libéraux, Pierre Paradis, et son collègue porte-parole en économie, le député Sam Hamad.

«Quand on n'a rien à cacher, on collabore», a tranché M. Paradis en point de presse.

Plusieurs semaines après l'adoption de la motion, le vérificateur n'a toujours pas pu entreprendre ses travaux.

Pourtant, le 1er octobre, M. Samson avait signifié au ministère des Finances son souhait de se rendre à ses bureaux pour se mettre à la tâche. Mais dans une lettre datée du 17 octobre, le sous-ministre des Finances, Luc Monty, lui a répliqué que ce projet excédait sa «compétence».

Au coeur du débat: la Loi sur le vérificateur général. Québec estime qu'en vertu de cette loi, il revient au gouvernement et non à l'Assemblée nationale de confier des mandats au vérificateur, une interprétation de la loi que ne partage pas du tout M. Samson.

«Il n'a pas de mandat à recevoir de l'Assemblée nationale», a commenté en point de presse le député péquiste de Sanguinet, Alain Therrien, convaincu que M. Samson «ne respecte pas la loi».

La position du gouvernement: quand la mise à jour sera publique, le vérificateur aura alors tout le loisir de l'examiner.

Il y a donc fort à parier que son rapport sur la mise à jour ne sera déposé qu'en février, quand la Chambre va de nouveau siéger après l'ajournement des Fêtes.