Les quatre nouvelles membres du Conseil du statut de la femme (CSF) ont été choisies parce que leur position en faveur de la charte des valeurs québécoises est « dans la continuité historique des avis » de cet organisme.

C'est ce qu'a expliqué la ministre responsable de la Condition féminine, Agnès Maltais, en conférence de presse, vendredi. Elle a souligné que le CSF s'est prononcé en faveur de la laïcité stricte de l'État et de l'interdiction du port de signes religieux ostentatoires dans la fonction publique dans des avis publiés en 2008 et 2011. Ces positions s'inscrivent en droite ligne avec la charte des valeurs québécoises du gouvernement Marois.

« En toute indépendance, en 2008 et en 2011, le Conseil du statut de la femme a statué sur la laïcité. Alors, on a envoyé des gens, des femmes fortes, solides », qui s'inscrivent « dans la continuité historique des avis » du CSF, a plaidé Mme Maltais.

Jeudi, la présidente du Conseil du statut de la femme, Julie Miville-Dechêne, a accusé le gouvernement de vouloir museler l'organisme et de faire un « accroc sérieux à son indépendance » avec ces nominations. Les quatre femmes nommées mercredi se sont toutes prononcées pour la charte des valeurs québécoises du gouvernement ou pour l'interdiction du port de signes religieux dans la fonction publique et parapublique, une des mesures contenues dans cette charte. Il s'agit de la présidente du Syndicat de la fonction publique du Québec, Lucie Martineau; de l'ancienne bâtonnière du Québec, Julie Latour; d'une militante pour la laïcité, Leila Lesbet; et membre de l'AFEAS, Ann Longchamps.

Pour Julie Miville-Dechêne, le gouvernement veut éviter toute critique à propos de sa charte. Jusqu'à ces nominations, le CSF était partagé sur le sujet: quatre membres veulent appuyer la charte alors que quatre autres - plus Mme Miville-Dechêne - souhaitent mener une recherche pour évaluer l'impact de l'interdiction du port de signes religieux ostentatoires pour les femmes. Les quatre nominations vont faire pencher la balance du côté des premières, croit Mme Miville-Dechêne. Elles surviennent une semaine avant la tenue de l'assemblée du CSF qui devait se pencher sur le sujet.

Les quatre femmes nommées « sont dans la continuité historique des avis du Conseil du statut de la femme. Ces quatre femmes arrivent après les avis du Conseil. Si (les membres du CSF) veulent maintenant regarder la situation, c'est leur choix. Si elles veulent faire les études pour comprendre mieux l'impact de ce que nous proposons, qu'elles le fassent. Elles n'ont aucune commande aucun mot d'ordre », a soutenu Agnès Maltais.

Elle a eu un entretien avec Mme Miville-Dechêne avant le dépôt de la charte. « Ça n'a pas été le moment le plus facile ni pour l'une ni pour l'autre. Mais en aucun cas je n'ai passé de commande à Mme Miville-Dechêne. Je suis désolé si elle a senti (de l'ingérence), je ne l'ai pas fait », a dit la ministre.

Elle a vanté la compétence des quatre femmes qu'elle a nommées. Il y avait 12 autres candidatures, mais la ministre n'a pas voulu donner de noms.

Le Parti libéral, la Coalition avenir Québec et Québec solidaire ont condamné la décision du gouvernement. « On veut entendre le Conseil du statut de la femme dire : vive la charte ! Ce n'est pas un avis qu'ils veulent, c'est un tapis !», a lancé la député libérale Christine St-Pierre.

La Fédération des femmes du Québec accuse elle aussi le gouvernement d'ingérence. « Au moment où le CSF allait exercer son droit de poser des questions en toute indépendance sur le projet de charte des valeurs québécoises, le gouvernement nomme quatre femmes qui, toutes appuient le gouvernement. Cela ressemble drôlement à une entrave à l'indépendance du CSF », a affirmé sa présidente, Alexa Conradi.