Le gouvernement Marois dégonfle le scénario de scrutin à l'automne. Les Québécois ne veulent pas d'élections, estime le ministre Bernard Drainville, qui reproche au Parti libéral d'en préparer.

De son côté, la Coalition avenir Québec (CAQ), dont le vote est nécessaire pour renverser le gouvernement minoritaire, garde les yeux rivés sur le printemps 2014.

Dimanche, au congrès des jeunes libéraux, le chef libéral a affirmé que sa «mèche électorale» a raccourci et que le Québec est «à l'aube d'une élection». Il a demandé à ses militants de se mobiliser en prévision du scrutin. Il a laissé la porte ouverte à l'idée de renverser le gouvernement cet automne. «On n'ira pas activement déclencher des élections à moins qu'il y ait un enjeu excessivement important et stratégique pour le Québec», a-t-il affirmé. Il évoque la possibilité que le gouvernement Marois décide lui-même de lancer l'appel aux urnes.

Au Parti québécois (PQ), «on n'en est pas là», a répondu Bernard Drainville, dans une entrevue à La Presse, hier. Il a souligné que les Québécois n'ont pas envie d'une campagne électorale un an après le dernier scrutin.

«Je me suis promené à Longueuil et un peu partout, j'ai parlé à bien des gens, et [...] je n'ai pas senti beaucoup d'appétit de la part des Québécois pour la tenue d'élections. Je ne sais pas à qui M. Couillard a parlé, je ne sais pas combien de Québécois lui ont dit que ça prend des élections, mais il ne parle pas aux mêmes Québécois que moi», a dit le ministre responsable des Institutions démocratiques et de la Participation citoyenne.

Il «n'entend pas parler», au gouvernement de l'idée de déclencher des élections à l'automne. «J'entends plutôt parler des dossiers qu'il faut régler, et c'est là-dessus qu'on travaille. Nous, on est au travail, on n'est pas en train de préparer des élections», a-t-il indiqué. Notons que la tâche primordiale de Pauline Marois, et probablement son test le plus important, reste l'atteinte de l'équilibre budgétaire à la fin de l'année financière, en mars.

Bernard Drainville croit que Philippe Couillard, «plutôt que de penser à des élections, devrait revoir ses standards éthiques», qui s'avèrent les mêmes que Jean Charest. Il accuse le Parti libéral de bloquer l'adoption du projet de loi 33 abolissant les indemnités de départ aux députés démissionnaires - sauf pour des raisons de santé ou des contraintes familiales. Par conséquent, le libéral Emmanuel Dubourg, qui quitte son siège dans Viau, «va partir avec un chèque de 100 000$», ce que M. Couillard a «cautionné», a pesté M. Drainville. «Et c'est sans compter les coûts liés à la tenue de l'élection partielle, qui vont dépasser le demi-million».

Selon le leader parlementaire de la CAQ, Gérard Deltell, «on ne renverse pas le gouvernement pour le plaisir de la chose. Le grand rendez-vous, c'est le budget [en mars], le chef a été clair là-dessus», a-t-il dit. Pour le moment, il ne voit pas «d'enjeu majeur» qui justifierait le dépôt à l'automne d'une motion de censure dont l'adoption ferait tomber le gouvernement. Si le Parti libéral présente une telle motion, les caquistes la jugeront et «ne se cacheront pas aux toilettes au moment du vote», a-t-il indiqué. La priorité du chef François Legault cet automne est la sortie de son livre sur le Projet Saint-Laurent et le congrès de son parti.

Gérard Deltell trouve par ailleurs «très surprenant» le fait que Philippe Couillard «empiète dans les plates-bandes du Parti québécois» en attaquant Pauline Marois sur sa gauche. «Il commence à y avoir de l'embouteillage dans ces plates-bandes. C'est sa décision, mais il y a un prix à payer. Ce qu'il fait, c'est qu'il oublie les familles de la classe moyenne», a-t-il affirmé.

Bernard Drainville juge que Philippe Couillard ne peut donner de leçons de progressisme au PQ. «Ils ont été au pouvoir, ils ont eu l'occasion de le prouver, et est-ce qu'il y a quelqu'un qui pense que le Parti libéral a été progressiste dans les 10 dernières années?» a-t-il lancé, vantant les mesures «très progressistes» du gouvernement Marois - comme la création de places en garderie, une indexation remplaçant la hausse libérale des droits de scolarité et l'instauration de la maternelle à 4 ans en milieu défavorisé.