Péquistes et libéraux ont discrédité mardi la pétition électronique de la Coalition avenir Québec (CAQ) visant à réclamer aux entreprises véreuses les millions de dollars «volés» aux Québécois.

Alors qu'elle prétend poursuivre une noble cause, la CAQ cherche en réalité à profiter des révélations de la Commission Charbonneau pour regarnir ses coffres, a soutenu la première ministre Pauline Marois, en Chambre.

Le Parti québécois au pouvoir, tout comme l'opposition officielle, juge scandaleux que la CAQ sollicite des dons politiques sur la page Web «remboursez-nous.com» où les citoyens sont invités à signer la pétition.

«Nous voulons tous récupérer l'argent qui nous a été volé. Cependant, je vais me permettre une certaine remarque, parce que je crois que d'exploiter le thème de la collusion pour aller financer son parti politique, je trouve que c'est assez ordinaire, pour ne pas dire immoral», a dit Mme Marois.

Son collègue ministre de la Justice, Bertrand St-Arnaud, est allé un peu plus loin. La CAQ se démarque dans ce dossier par son amateurisme qui rappelle les beaux jours de la défunte Action démocratique, a-t-il affirmé.

«Lancer une pétition partisane sur un site Internet partisan, et non pas sur celui de l'Assemblée nationale, et en profiter pour demander de contribuer 20 $ pour supporter notre cause, comme si c'était la cause de la CAQ, franchement, c'est indécent, c'est grossier», a lancé M. St-Arnaud.

Il «est bien évident» que le gouvernement du Québec souhaite récupérer toutes les sommes «qui auraient pu lui être soutirées illégalement», a fait valoir le ministre. Ce dernier s'en remet, pour la suite des choses, au travail des avocats de l'État.

«Ce sont les meilleurs, et ils intenteront sans hésitation des recours appropriés au bon moment», a-t-il insisté.

Dans une société de droit, les recours judiciaires se préparent avec méthode et sérieux, a renchéri le président du Conseil du trésor, Stéphane Bédard.

Or, «le pire qu'on peut faire là-dedans, c'est de s'improviser justiciers, puis jouer à Batman et Robin», a-t-il ironisé à propos de la campagne menée avec grands renforts de visibilité par le chef caquiste François Legault et son bras droit Jacques Duchesneau.

Quant à lui, le chef parlementaire libéral Jean-Marc Fournier a qualifié la pétition caquiste d'«arnaque». Annoncée avec tambours et trompettes, cette pétition en ligne camoufle une simple collecte de fonds partisane, a-t-il argué.

«Le site aurait dû avoir un nom bien différent: ce n'est pas remboursez-nous.com mais financez-nous.com. Il y a un petit côté arnaque dans cette affaire-là qui n'est pas tellement agréable», a estimé M. Fournier.

La CAQ espère à terme déposer la pétition à l'Assemblée nationale mais rien n'est moins sûr, a prévenu M. Fournier. Le règlement ne permet pas le dépôt d'une pétition électronique à moins que celle-ci figure sur le site de l'Assemblée nationale, ce qui n'est pas le cas du document de la CAQ, a-t-il rappelé.

MM. Legault et Duchesneau ont continué de frapper sur le clou en dépit des attaques nourries de leurs adversaires.

Pour le chef de la formation, «il y a une urgence d'agir».

«Déjà des entreprises ont commencé à transférer leurs actifs, entre autres le groupe de Tony Accurso», a-t-il clamé.

M. Legault demande au gouvernement d'enclencher des «recours préventifs» comme des ordonnances de sauvegarde, pour bloquer le transfert d'actifs des entreprises aux mains sales.

Pendant que la Ville de Montréal engage des poursuites civiles, «ce gouvernement se traîne les pieds», a ajouté pour sa part M. Duchesneau.

«Ils sont beaucoup plus motivés à réhabiliter des entreprises qui ont fait de la collusion et de la corruption qu'à récupérer l'argent des Québécois. Comment ce gouvernement peut-il être devenu aussi mou face à la corruption?», a soulevé le député de Saint-Jérôme.