Au lieu de procéder par appels d'offres, Québec pourrait attribuer de gré à gré les contrats éoliens pour les 700 MW restants promis dans sa stratégie énergétique.

«J'aime mieux parler d'allocations que d'appels d'offres», a affirmé le ministre délégué aux Régions, Gaétan Lelièvre. Il promet «une belle formule» qui va «en laisser plus dans les régions que la formule traditionnelle». M. Lelièvre est aussi responsable de la Gaspésie, où se trouvent 1200 des 5000 emplois de l'industrie.

Jean-François Nolet, vice-président de l'Association canadienne de l'énergie éolienne, comprend que le gouvernement péquiste veuille répondre à des «impératifs politiques» en distribuant la manne. Mais la formule la plus juste et efficace reste l'appel d'offres, soutient-il. «C'est comme ça qu'on a fonctionné depuis 10 ans. Ça permet à tous de participer et d'avoir les coûts les plus compétitifs.»

Ça presse

Et peu importe la méthode, elle doit être confirmée rapidement, souligne M. Nolet. Dans sa stratégie énergétique 2006-2015, Québec devait acheter 4000 MW. Il en reste 700. En les attendant, les carnets de commandes des entreprises qui fabriquent les éoliennes se vident. Et des emplois risqueraient d'être perdus.

Au Québec, l'industrie manufacturière éolienne ne réussit pas encore à voler de ses propres ailes. Il faudra attendre encore 10 ans, concède Marc-Antoine Renaud, d'Enercon. «On a créé une filière au début des années 2000. Il ne faut pas s'arrêter en milieu de parcours et laisser le bébé mourir dans l'oeuf», indique-t-il.

«Nous voulons maintenir cette industrie. Le dossier s'analyse dans cette perspective-là», assure la ministre des Ressources naturelles, Martine Ouellet.

Des surplus coûteux

Hydro-Québec prévoit être en surplus énergétique jusqu'en 2020. Cette énergie est revendue à perte à cause de la chute des prix sur le marché. Ces surplus coûteront ainsi environ 1,5 milliard de dollars aux contribuables. C'est surtout pour cette raison que Mme Ouellet a mis fin au programme des minicentrales hydroélectriques. Or, le coût de production de l'éolien est encore plus grand que celui des minicentrales. Mais pour l'éolien, Mme Ouellet croit que la survie du secteur manufacturier peut justifier ces coûts.

La différence entre les prix d'achat et de vente ferait perdre près de 300 millions par année à Hydro-Québec, ont déjà calculé des opposants à la filière éolienne. Un calcul réducteur, croit M. Nolet. Il faudrait, selon lui, tenir également compte des emplois créés et des recettes fiscales. L'industrie ajoute en moyenne 473 millions par année aux coffres de l'État, selon une étude qu'elle a commandée à SECOR-KPMG. «Pour chaque million investi, 3 millions retournent dans l'économie québécoise», avance-t-il.

Le libéral Pierre Paradis accuse le gouvernement péquiste de «manquer d'imagination». Il demande à Mme Ouellet d'utiliser ces surplus d'énergie verte pour développer l'économie québécoise.