Critiquée par la Protectrice du citoyen et la Commission des droits de la personne, Agnès Maltais a confirmé mardi qu'elle maintiendra sa réforme de l'aide sociale. Et pour calmer la grogne, la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sociale a donné un avant-goût d'une nouvelle aide aux plus défavorisés. Elle était accompagnée par pas moins de 10 députés pour son annonce.

Cette «bonification progressive et importante», qui n'était pas prévue dans son controversé avant-projet de règlement sur l'aide sociale, sera dévoilée en mai. Aucun chiffre n'est donné pour l'instant. On sait seulement qu'il s'agira d'argent frais. La mesure s'adressera aux 85 000 prestataires de l'aide sociale qui vivent seuls, et ne reçoivent que l'allocation de base mensuelle de 604 dollars.

Pour le reste, Mme Maltais va de l'avant avec l'essentiel de sa réforme de l'aide sociale. Trois groupes d'assistés sociaux perdront leur allocation spéciale de 129 dollars, qui portait leurs revenus mensuels à 733 dollars. Ces groupes auparavant compensés pour leur «contrainte à l'emploi»: les 55-58 ans, les parents d'un jeune enfant et les toxicomanes traités dans un centre de désintoxication. Mais en contrepartie, ils pourront suivre un programme d'employabilité, assorti d'une allocation mensuelle de 196 dollars. Et ce programme, normalement prévu pour une durée limitée, pourra se poursuivre au besoin. «Quand un parcours sera fini, on va les reprendre sur un autre parcours. (...) Emploi-Québec n'abandonnera pas une personne», a-t-elle promis. Elle dit encore «finaliser» les modalités de cette promesse.

Même si le Front commun des assistés sociaux demeure inquiet, elle n'en démord pas. «La sortie durable de la pauvreté, c'est l'emploi», dit-elle. Mais ces groupes «font des boutons» à cause de leur «position idéologique», accuse-t-elle.

La ministre a néanmoins ajouté deux aménagements pour tempérer l'impact de ces mesures. Même si le règlement entre en vigueur le 1er juin, les nouveaux assistés sociaux éligibles garderont leurs prestations jusqu'au 30 septembre. Durant cette période, les quelque 340 personnes touchées rencontreront des intervenants des 135 centres locaux d'emploi (CLE). Le ratio permettra à chaque personne touchée d'être rencontrée, croit la ministre.

Quant aux assistés sociaux toxicomanes, leur séjour payé dans un centre de désintoxication, avec l'allocation supplémentaire, est limité à 183 jours par année, répartis en un maximum de deux séjours. La ministre proposait initialement une limite de 90 jours. Ils devront être évalués par un intervenant spécialisé, et non plus par un médecin. Les centres devront désormais obtenir une certification et recevront des visites surprises d'inspecteurs. Et les assistés sociaux toxicomanes devront être évalués par un intervenant spécialisé, et non plus par un médecin.

Québec solidaire dénonce «l'entêtement et l'incohérence» de Mme Maltais. Sa co-porte-parole Françoise David croit que la ministre «essaie de sauver la face» en annonçant qu'elle fera une annonce en mai pour les prestataires vivant seuls. Selon Mme David, le gouvernement péquiste «maintient les coupes à l'aide sociale». «Et la seule raison, c'est l'atteinte du déficit zéro. Tout le reste, c'est de la cosmétique, du mauvais théâtre», lance-t-elle.

La libérale Karine Vallières se demande pourquoi la ministre n'a pas attendu la fin de la période de consultation de son projet de règlement avant de faire cette annonce. Elle croit que la ministre «sent la soupe chaude» et sert «des miettes aux gens».

La Coalition avenir Québec croit que Mme Maltais a «épaissi le brouillard» avec son annonce. «On ne sait même plus si elle veut couper ou ajouter plus d'argent», dit son député Sylvain Lévesque.