Le gouvernement du Québec «ne cédera pas un pouce de terrain» face à Ottawa sur la question de la formation de la main-d'oeuvre, a prévenu Pauline Marois, mardi.

La première ministre est montée au front contre le budget fédéral lors d'une allocution prononcée devant la Chambre de commerce et d'industrie de Québec, où elle a annoncé la construction d'un nouvel hôpital dans l'arrondissement de Limoilou.

Déposé la semaine dernière, le budget du ministre des Finances Jim Flaherty frappe l'économie du Québec de plein fouet au profit des autres provinces, a-t-elle évoqué, faisant référence entre autres à l'enveloppe de 920 millions $ réservée au sud de l'Ontario.

«Que le gouvernement fédéral aide les provinces, en principe, je n'ai rien contre ça, mais qu'Ottawa nous attaque, crée du désordre, provoque des chicanes inutiles, on ne peut l'accepter», a déclaré Mme Marois.

Avec l'abolition de la déduction d'impôt sur les fonds de travailleurs, Ottawa privera les épargnants québécois de centaines de millions de dollars, a dénoncé la première ministre. Qui plus est, les PME québécoises vont voir des investissements majeurs leur échapper, selon elle.

«Ça veut dire 300 millions $ de moins dans les poches des Québécois qui vont subir 88 pour cent de cette ponction fédérale», a-t-elle dit, relativement à l'abolition du crédit d'impôt sur les fonds de travailleurs.

«Ça veut dire des centaines de millions qui vont prendre la direction de Toronto plutôt que celle de nos PME. Ça veut dire moins d'épargne de la part des travailleurs québécois», a-t-elle martelé.

En ce qui concerne la formation de la main-d'oeuvre, la première ministre a eu droit aux applaudissements des invités lorsqu'elle a promis une bataille rangée pour empêcher le fédéral de s'immiscer dans cette compétence exclusive du Québec.

«Moi, je ne cherche pas la chicane», a dit Mme Marois pour illustrer sa bonne foi. Le gouvernement du Québec, a-t-elle rappelé, a eu ces dernières semaines des discussions «constructives» avec l'Alberta, les provinces atlantiques, l'Ontario et son vis-à-vis fédéral.

«Nous allons poursuivre nos discussions mais je veux être bien claire: le gouvernement du Québec ne cédera pas un pouce de terrain sur la question de la formation de la main-d'oeuvre», a-t-elle insisté.

Mme Marois a lancé un appel à «l'unité» de l'Assemblée nationale, des entrepreneurs, des syndicats et de la population pour forcer le gouvernement de Stephen Harper à retourner à sa table à dessin.

La démarche est plutôt mal engagée. Le Parti québécois au pouvoir n'a pas été en mesure de convaincre l'opposition libérale d'appuyer sa motion contre les visées fédérales.

Présentée conjointement avec le Coalition avenir Québec et Québec solidaire, la motion dénonçait la volonté d'Ottawa «de mettre en oeuvre un programme de subvention à l'emploi qui constituerait une intrusion dans les champs de compétence du Québec». Le texte exigeait aussi «que le Québec soit exclu avec pleine compensation financière du programme de subvention à l'emploi».

«Le gouvernement du Québec aurait voulu parler d'une seule voix et nous sommes profondément déçus de voir le Parti libéral refuser de défendre les travailleurs», a commenté le ministre des Relations intergouvernementales canadiennes, Alexandre Cloutier, en point de presse.

À la motion conjointe du PQ, de la CAQ et de QS, le Parti libéral opposait sa propre motion, passablement édulcorée, appelant le gouvernement du Québec à «former des alliances» avec les autres provinces de même qu'avec les partis représentés à la Chambre des communes.

Les libéraux refusent de s'associer au gouvernement Marois qu'ils soupçonnent de vouloir susciter un nouvel affrontement avec Ottawa pour prouver l'échec du fédéralisme.

«La stratégie de gouvernance souverainiste bloque la capacité de créer des alliances et n'a rien de constructif. Elle ne vise qu'à instrumentaliser ce dossier important pour mousser l'option souverainiste. Il faut faire passer l'intérêt du Québec avant les intérêts partisans», a dit la députée de Notre-Dame-de-Grâce, Kathleen Weil, marraine de la motion libérale.

Le gouvernement n'est pas contre l'idée d'une alliance, a assuré le ministre Cloutier, qui devait d'ailleurs s'entretenir en après-midi, mardi, avec son homologue de l'Ontario au sujet des orientations fédérales sur la main-d'oeuvre.

Mais qu'il y ait alliance ou non, le Québec «ne cédera pas un centimètre» de ses compétences, a-t-il tranché.