Les trois candidats à la direction du Parti libéral du Québec ont joué leur dernière carte, dimanche, en prononçant chacun un discours devant les quelque 2500 délégués qui ont ensuite commencé à voter.

Voici ce qui est ressorti de leur dernier discours avant le vote, dans l'ordre des présentations.

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Bachand promet l'intégrité

Au moment où les doutes planent quant aux rapports entre Philippe Couillard et le Dr Arthur Porter, l'ancien patron du CUSM visé par des accusations de fraude, Raymond Bachand promet aux libéraux un leadership au-dessus de tout soupçon.

«Je prends l'engagement de tout mettre en oeuvre pour que, dans l'avenir, les Québécois n'aient aucun doute, mais aucun doute, sur l'intégrité, l'éthique et la transparence du Parti libéral et de son chef», a soutenu dimanche matin M. Bachand devant les 2500 délégués qui allaient voter dans les minutes suivantes.

Raymond Bachand était le premier des trois orateurs en cette journée déterminante de la course à la direction du PLQ. Sur le parquet, l'avance de Philippe Couillard était évidente, laissant déjà prévoir un unique tour de scrutin, dont les résultats seront connus cet après-midi à 14h.

En tout début de journée, des tracts étaient distribués à la porte de l'Auditorium de Verdun rappelant les liens entre Philippe Couillard et le Dr Arthur Porter, l'ancien patron du CUSM recherché par la police, actuellement en cavale dans les Caraïbes. On y rappelait aussi que Kathleen Weil, l'ex-ministre et co-présidente de la campagne Couillard, était la conjointe de Michael Novak, vice-président de SNC-Lavalin, société multinationale sur la sellette depuis des mois. Le camp Bachand s'est dissocié tout de suite de cette initiative, une affirmation qui laissait sceptiques les pro-Couillard.

M. Bachand s'est engagé à rassembler les citoyens, accusant le gouvernement péquiste de «chercher à diviser l'âme même des Québécois en nous demandant de choisir entre être Québécois ou Canadien alors que nous portons avec fierté cette double identité». Après un touchant vidéo où plusieurs Québécois connus donnaient leur appui à l'ex-ministre des Finances, M. Bachand consacra un bon moment de son discours de 20 minutes à la communauté anglophone -beaucoup de ses appuis viennent de Montréal-, promettant de ne jamais considérer leur appui comme acquis au PLQ.

Pour lui, les Québécois «n'ont pas besoin d'un nouveau débat constitutionnel» pour savoir qui ils sont. Le débat politique «ne doit pas porter sur qui nous voulons être, mais sur ce que nous voulons faire», a-t-il lancé, promettant des gestes pour réduire les temps d'attentes aux urgences, favoriser l'éducation supérieure et l'intégration des immigrants.

Pour lui le gouvernement Marois laissera des traces profondes dans l'économie du Québec. Plus de 13 000 emplois sont perdus, les tergiversations à l'égard du développement minier mettent à risque 50 000 autres emplois. «Redonnons aux Québécois un gouvernement libéral, c'est notre rendez-vous!» a-t-il conclu

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Photo: Robert Skinner, La Presse

Raymond Bachand

Attaqué, Couillard promet une éthique «irréprochable»

Au terme d'une campagne où Raymond Bachand l'a attaqué sur ses liens avec l'ex-patron du CUSM Arthur Porter, Philippe Couillard s'est engagé à faire de l'éthique et de la recherche du bien commun «la marque du nouveau Parti libéral du Québec». Et il a réservé une place importante dans son discours à la relance des négociations constitutionnelles.

Second à prendre la parole au congrès à la direction de dimanche, l'ancien ministre de la Santé a souligné à gros traits qu'il croit au «respect des idées et des adversaires», lui qui a été la cible d'attaques durant la course.

Il n'a pas hésité à aborder la question de l'éthique. «Notre parti renouvelé dans son fonctionnement, dynamisé dans ses instances, enraciné dans nos milieux devra aussi être irréprochable au plan de l'éthique. Son énergie sera la recherche du bien commun en toutes circonstances. Nous en ferons la marque du nouveau parti libéral du Québec», a-t-il lancé aux quelque 2500 militants réunis à l'auditorium de Verdun. L'ambiance était plus électrisante que lors du discours de M. Bachand.

Selon M. Couillard, «l'État québécois vit une crise de confiance. Notre maison commune doit être un modèle d'intégrité. Et il n'y a pas de meilleur remède que la transparence».

Il veut, entre autres, «rendre disponible en temps réel une masse d'informations sur l'utilisation des fonds publics, des subventions aux entreprises jusqu'aux coûts et échéanciers des grands projets». Il entend «restaurer la confiance dans les institutions en dotant le Québec du gouvernement le plus ouvert et transparent de notre histoire».

Philippe Couillard a proposé aux militants de relancer le débat constitutionnel. Il souhaite «reprendre le flambeau de l'affirmation du Québec dans un Canada meilleur».

«Je ne peux pas concevoir que l'on puisse s'investir en politique québécoise et choisir le Canada sans le désir de voir le Québec réintégrer un jour la famille canadienne. On ne peut vouer à l'oubli un enjeu aussi fort sur le plan des symboles que l'absence de la signature du Québec au bas de la loi maîtresse du Canada à l'approche du 150e anniversaire de notre pays», a-t-il plaidé. «À nous, Québécois de toutes origines, francophones et anglophones, de reprendre l'initiative de cette discussion. C'est dans l'intérêt du Québec autant que dans celui du Canada.»

Il a d'ailleurs accusé «les partisans de la séparation» de tenir «un discours d'assiégé» en faisant croire à un «complot contre le Canada».

L'homme de 55 ans a fait valoir que le PLQ doit «constituer rapidement une solution de rechange» au Parti québécois. Il a présenté un plan de match: la tenue de colloques régionaux puis d'un congrès d'orientation.

Il a accusé le gouvernement Marois «d'élever des murs: le privé contre le public, les anglophones contre les francophones, l'idéologie contre le gros bon sens».

«Les coupes aveugles ne sont pas un signe de bonne gestion, mais plutôt une preuve d'incapacité à faire les bons choix, a-t-il dit. Les reculs répétés ne sont pas un signe d'écoute de la population, mais une preuve d'improvisation.»

Il a longuement abordé la question de l'économie, le thème privilégié de Raymond Bachand, ancien ministre des Finances. Il a promis une «réforme majeure de la fiscalité».

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Philippe Couillard

Moreau promet le renouveau

Un parti libéral renouvelé, capable de rejoindre les jeunes qui l'ont déserté: Pierre Moreau a proposé dimanche aux délégués libéraux un nouveau style de leadership, tourné vers les nouvelles idées.

Dans un discours énergique, l'avocat a pris ses distances du favori, Philippe Couillard, qui avait quitté le parti devenu minoritaire, en juin 2008. «Comme vous, je suis d'abord un militant, je le suis demeuré beau temps, mauvais temps, je vous serai loyal», a lancé Pierre Moreau, le dernier à s'adresser aux délégués.

Aussi, il a indirectement rappelé que l'absence de Philippe Couillard de l'Assemblée nationale serait un handicap s'il devenait chef. «Au moment de voter, demandez-vous lequel des candidats est le plus apte à renouveler le parti, le plus ouvert au débat, à apporter les changements que vous souhaitez, à inspirer les jeunes et les amener à notre parti», a insisté M. Moreau, dont la campagne avait visé d'abord les jeunes.

«Demain, lorsque les pancartes auront été rangées, le véritable travail commencera pour celui que vous allez choisir. Demandez-vous lequel des candidats sera capable, dès mardi, d'affronter efficacement Pauline Marois» a lancé M. Moreau, promettant d'être un chef énergique, capable de ramener «la fierté d'être libéral».

Celui qui partait de plus loin dans la course avait visiblement réfléchi sur le message. Son choix du vert criard, qui soulevait parfois l'ironie des adversaires tombait sous le sens, dimanche, jour de la Saint-Patrick. Stratège, il a longuement traversé l'auditorium sous l'oeil des caméras, serrant des mains avant de monter à la tribune.

Pierre Moreau s'était distingué en campagne par ses idées surprenantes, qui lui permettaient, à peu de frais, d'accaparer les manchettes lors des débats. Devant les délégués, il a rappelé avoir, seul, fait des propositions dérangeantes: reconsidérer la pertinence des CÉGEPS, rendre permanente la commission Charbonneau et permettre aux agriculteurs de revoir le monopole syndical de l'UPA.

«Au cours des derniers mois, j'ai parcouru le Québec. J'ai compris que vous désirez renouveler le parti, renouveler la base militante, rejoindre les jeunes partout où ils se trouvent», a-t-il soutenu, applaudi par l'auditoire.

Après que la veille, Jean Charest eut électrisé les militants, il s'est déclaré dans la continuité de son mentor politique. Les commentateurs ont dit qu'il ressemblait trop à Jean Charest, a-t-il rappelé. «J'ai pris ça comme un compliment», a-t-il dit, rappelant que «trois mandats libéraux consécutifs, ce n'est pas un mauvais style, je vais l'adopter!», a-t-il ironisé.

Il promet aux militants que, sous sa gouverne, le PLQ «pourra mettre de l'avant nos idées, et en proposer d'autres encore». Comme ses adversaires Raymond Bachand et Philippe Couillard, M. Moreau a décoché des flèches prévisibles au gouvernement Marois.

«Aux dernières élections les Québécois ont été floués, trompés, les mêmes manigances du PQ: plus de taxes et moins de services, l'instabilité politique et beaucoup, beaucoup de promesses brisées. Comme dans les années 1990, on coupe en santé, on coupe dans les infrastructures et on prend vos taxes pour faire la promotion de la souveraineté», a lancé Pierre Moreau.

Les Québécois «ne veulent pas d'un autre référendum. Tout cela va diviser le Québec, nous affaiblir au plan économique et briser des familles», a-t-il soutenu rappelant que son oncle et son père étaient allés au front durant le second conflit mondial. Seul son père en est revenu. «Nous rappelons que notre appartenance à ce pays n'est pas basée sur la langue, sur la couleur de notre peau, mais sur les valeurs que nous partageons», a-t-il martelé, applaudi encore.

Photo: Robert Skinner, La Presse

Pierre Moreau