Au lieu de devoir demander une formation d'accueil dans une autre langue que le français, les immigrants se la feront désormais offrir. «Si on veut franciser les immigrants, on envoie un bien mauvais message», déplore Jean-François Sylvestre, vice-président régional du Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ).

La formation d'accueil est offerte aux immigrants moins d'une semaine après leur arrivée. On leur apprend notamment à chercher un logement ou un emploi et à demander une carte d'assurance maladie. Ils sont par la suite orientés vers des cours de français.

Auparavant, les fonctionnaires offraient la séance d'accueil en français. Sur demande, ils la donnaient individuellement dans une autre langue. La ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles(MICC), Kathleen Weil, confie désormais cette responsabilité aux groupes communautaires. Ces groupes n'attendront pas de recevoir une demande de cours en anglais. Ils l'offriront ouvertement. «On n'incitera plus les gens qui parlent un peu français à se forcer, on les encourage à recourir à l'anglais», croit M. Sylvestre.

Selon Mme Weil, l'année dernière, près de 65% des nouveaux arrivants connaissaient le français à leur arrivée. Les autres, pour la plupart, avaient bénécicié du regroupement familial ou étaient réfugiés, a-t-elle rappelé.

Le SPFQ a appris ce changement par hasard : un syndiqué a trouvé un document du MICC à côté d'une photocopieuse. M. Sylvestre croit que la ministre recourt aux groupes communautaires pour accélérer les séances d'accueil dans une autre langue que le français. «Ils ne sont pas assujettis à la Loi sur l'administration publique, ils peuvent offrir les séances de groupe en anglais», note-t-il. Le but de la ministre, selon lui: répondre aux critiques du vérificateur général.

En mai 2010, le vérificateur s'était inquiété des problèmes d'intégration des immigrants. La ministre Weil dit vouloir offrir des services «adaptés à leurs besoins, plus modernes et plus accessibles», pour «réduire les délais d'intégration et d'améliorer leur taux d'emploi».

Le PQ dénonce ce virage. «La priorité, c'est d'intégrer les immigrants. Est-ce que je comprends bien que c'est de les intégrer dans n'importe quelle langue?», a demandé Yves-François Blanchet, critique du PQ en matière d'Immigration.

Selon le SFPQ, cela coûtera aussi plus cher. De juillet 2012 à juillet 2013, 148 séances sont prévues dans trois langues. Le coût total: 44 400 $. Cela aurait coûté 9900 $ avec les fonctionnaires dans le système actuel, prétend M. Sylvestre.

La ministre Weil dément cette information. «Ce n'est pas vrai que les services qu'on va offrir coûteront plus cher», assure-t-elle