Le budget qui sera déposé mardi par le ministre des Finances, Raymond Bachand, pourrait donner une idée de la proximité de la prochaine échéance électorale.

S'il contient des mesures visant à soulager financièrement une partie des contribuables, il pourrait être perçu comme la première étape vers le déclenchement d'un scrutin hâtif, dès ce printemps.

Chose certaine, ce budget, qu'il promet «costaud», sera tourné vers la création de richesse, à partir de l'exploitation des ressources naturelles, a indiqué lundi le ministre Bachand, à l'occasion de la traditionnelle séance de photographie précédant le dépôt du budget.

En ces temps économiques difficiles, M. Bachand a plus ou moins rompu avec la tradition voulant que le ministre des Finances porte des chaussures neuves pour son budget. Il n'a pas acheté de chaussures, mais il arborait de nouveaux lacets, pour mieux «ficeler» son budget, a-t-il ironisé. L'an passé, déficit oblige, il avait fait ressemeler ses vieilles chaussures.

Le magasinage de souliers tout neufs ne surviendra qu'à l'heure du retour à l'équilibre budgétaire, toujours planifié pour 2013-2014, a réaffirmé le ministre, qui déposera son troisième budget et celui qui pourrait servir de rampe de lancement au premier ministre Jean Charest pour tenter d'obtenir un quatrième mandat de la population.

En ces temps de déficit et de dette record (plus de 200 milliards $ en 2015), la marge de manoeuvre du ministre Bachand est bien mince, si bien que les Québécois ne doivent pas s'attendre à de généreux cadeaux ni à un allègement de leur fardeau fiscal.

Le ministre a tenté de convaincre les journalistes présents qu'il n'avait pas rédigé son budget «en fonction de l'échéance électorale», même si le gouvernement a entrepris la quatrième année de son mandat.

On saura mardi si le déficit du Québec de 2012-2013 est toujours fixé à 1,5 milliard $, comme prévu. S'il est plus élevé qu'anticipé, cela pourrait indiquer que Québec a de la difficulté à contrôler ses finances et que le retour au déficit zéro pourrait être plus ardu qu'on le croyait.

«Ça fait trois ans qu'on resserre les dépenses», a dit le ministre, soucieux d'avoir l'air en plein contrôle de la situation budgétaire.

Il a réaffirmé qu'il était faux de prétendre que les Québécois étaient surtaxés et a indiqué qu'il rendrait public mardi un fascicule faisant la preuve que «le contrIbuable a plus d'argent dans ses poches» aujourd'hui qu'en 2003.

C'est particulièrement le cas pour le couple avec enfants, a-t-il précisé, rappelant que Québec avait notamment baissé les impôts.

N'empêche que le gouvernement a aussi alourdi le fardeau des contribuables en leur imposant diverses hausses au fil des ans: hausse de deux points de pourcentage de la TVQ, taxe sur l'essence, tarifs de toutes sortes et cotisation santé annuelle qui atteint désormais de 200 $ par personne, notamment.

La facture des programmes sociaux et de la santé ne cesse de grimper et Québec cherche par tous les moyens à freiner la croissance de ses dépenses et, en parallèle, augmenter ses revenus pour maintenir le niveau de services à la population, de plus en plus vieillissante.

Pour financer ses programmes sociaux, Québec misera donc plus que jamais dans son budget sur la création de richesse.

Aussi, avec en fond de scène l'objectif d'assurer le succès du Plan Nord, le budget du 20 mars mettra l'accent sur l'exploitation des ressources naturelles, par diverses mesures très ciblées et structurantes destinées à certains secteurs d'activité.

L'an dernier, le cadre financier du Plan Nord avait été fixé à hauteur de 1,6 milliard $ pour cinq ans, grâce à divers investissements en infrastructures, dont des routes d'accès. Ce cadre sera revu à la hausse.

Le niveau de participation de l'État dans les minières, évalué l'an passé à 500 millions $ sur cinq ans, pourrait bien lui aussi être revu à la hausse dans le budget.

Après avoir fixé le niveau de redevances des minières et celui prévu pour l'industrie du gaz de schiste, Québec fixera ses attentes dans le secteur de l'exploration pétrolière en matière de retombées et de redevances.

Québec va par ailleurs créer un nouveau fonds de capital de risque destiné à un secteur particulier qu'il veut stimuler.

Le ministre a dit lundi que le Québec devait profiter davantage de la conjoncture économique mondiale et des occasions d'affaires qu'elle présente, en ces temps d'incertitude.

Sur le plan social, les personnes âgées formeront la clientèle-cible du budget Bachand 2012. Québec fera un effort particulier pour leur permettre de demeurer dans leur maison le plus longtemps possible, et ainsi soulager d'autant le réseau de la santé et des CHSLD.

Québec mettra donc à contribution les organismes d'économie sociale prodiguant des soins à domicile aux personnes âgées, qui joueront un rôle majeur en vue de reporter l'échéance du grand départ vers le CHSLD.

Il faut s'attendre aussi à voir les crédits d'impôts aux aidants naturels des personnes âgées bonifiés.

Les Québécois doivent aussi mieux se préparer à la retraite. M. Bachand mettra de la chair autour du projet de création d'un régime volontaire d'épargne retraite, annoncé l'an dernier, en présentant un cadre financier et toute l'architecture du projet destiné à ceux qui n'ont pas de régime complémentaire à la pension versée par l'État. Les employés y seront inscrits automatiquement, mais auront le droit de s'en retirer.