Le gouvernement Charest veut faire passer de 20 à 30 pour cent la proportion de nouveaux bâtiments non résidentiels construits en bois, d'ici à cinq ans, mais sans imposer de contraintes et sans débourser un sou.

Le ministre des Ressources naturelles, Clément Gignac, en a fait l'annonce, vendredi, en commentant le nouveau rapport d'un groupe de travail sur l'utilisation du bois, qui vise à réanimer une stratégie du gouvernement déjà en vigueur. L'opposition ne voit dans la réaction du gouvernement que du vent et de l'indifférence à l'égard de l'industrie forestière.

Le ministre écarte l'idée d'obliger plus clairement les constructeurs à faire usage du bois québécois, pour aider cette industrie en difficulté.

«Je ferais bien attention à ça», a dit en conférence de presse M. Gignac, en rappelant que le Québec doit se conformer à des accords de libre-échange.

«Je crois beaucoup plus à une approche persuasive que punitive», a-t-il ajouté.

De même, il refuse d'envisager une aide financière gouvernementale aux entrepreneurs pour stimuler la demande.

«On n'est pas rendu là. (...) On peut hausser sensiblement l'usage du bois sans intervention gouvernementale.»

Le rapport du groupe de travail, dirigé par Léopold Beaulieu, vise à raviver une stratégie mise en place en 2008 par le défunt ministre Claude Béchard.

Depuis la mise en place de la stratégie, M. Gignac a fait remarquer que la proportion de nouveaux bâtiments non résidentiels en bois est passée de 15 pour cent 2007 à 20 pour cent l'an dernier et qu'on peut viser 30 pour cent en 2017-2018.

Le rapport Beaulieu recommande d'ailleurs au gouvernement de donner l'exemple à titre de donneur d'ouvrage, dans les appels d'offres et devis. Il affirme clairement que «le bois pourrait être utilisé davantage dans la majorité des bâtiments mis en chantier par les ministères et organismes».

Cependant, le ministre refuse de considérer que le gouvernement a été un mauvais élève depuis la mise en place de sa stratégie.

«Je vais y aller autrement, je pense qu'il faut regarder l'avenir. Il y a des effort qui ont été faits, mais je pense qu'on a réalisé qu'il faut que les ingénieurs, les architectes, dès la conception de l'édifice, soient plus à l'aise à intégrer (le bois).»

Le rapport recommande justement de mieux former ingénieurs et architectes dans les universités pour les inciter à faire davantage usage du bois, et d'adapter le Code du bâtiment en conséquence.

Il propose également de faire valoir le bois comme matériau vert, dont l'empreinte carbone est avantageuse. Avec la mise en place de la bourse du carbone, les entreprises se tourneront naturellement vers le bois, donc nul besoin de subventions gouvernementales, a plaidé M. Gignac.

«Plus les Québécois utilisent le bois, plus ils s'enrichissent», a t-il résumé.

L'opposition péquiste juge sévèrement le gouvernement. Selon le porte-parole péquiste en matière de forêts, Denis Trottier, le rapport contient de bonnes recommandations, mais le gouvernement n'en fait visiblement «pas une priorité», parce qu'il ne fixe pas d'obligations et n'accorde pas de moyens financiers pour inciter à l'usage du bois.

«Il y a plus de vent (dans l'action du gouvernement) que de construction, ce n'est pas la priorité du gouvernement,  a-t-il dit en entrevue téléphonique. Il y a pas d'argent, il n'y a pas d'obligation de formation. Nous, on dit que c'est le temps d'agir.»

L'industrie forestière emploie 100 000 personnes. Elle représente près de 12 pour cent de toutes les exportations québécoises.