Le Parti québécois accuse le ministère de la Famille de mener une «opération de camouflage pour protéger» son ancien patron, l'actuelle présidente du Conseil du trésor, Michelle Courchesne.

Le ton a monté au Parlement, mardi, lors d'échanges entre l'opposition officielle et des hauts fonctionnaires, une situation plutôt rare.

Trois députés péquistes - dont Nicolas Girard - ont cuisiné la sous-ministre à la Famille, Line Bérubé, en commission parlementaire. Elle a comparu pour faire un suivi sur le rapport dévastateur du Vérificateur général (VG) déposé le 30 novembre. Selon le VG, l'attribution en 2008 de 18 000 places subventionnées en garderie a manqué de rigueur et «a laissé une grande place à la subjectivité». La ministre de la Famille de l'époque, Michelle Courchesne, est allée à l'encontre des recommandations de ses fonctionnaires pour 21% des projets qu'elle a retenus. Cela représente 85 projets de CPE et de garderies privées ayant obtenu 3700 places. Ces projets provenaient parfois de donateurs libéraux.

Les péquistes ont demandé à nouveau d'obtenir les rapports d'évaluation des 1955 projets soumis en 2008. Rappelons qu'il accuse le gouvernement d'avoir préféré des projets de donateurs libéraux alors que ceux-ci avaient reçu une mauvaise note des fonctionnaires.

«L'évaluation des projets est protégée par la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics», a répondu Line Bérubé. Selon elle, dévoiler les rapports pourrait porter préjudice à des propriétaires de garderie dont le projet avait reçu une mauvaise note mais qui offrent finalement un bon service. «Pourquoi inquiéter aujourd'hui des parents qui fréquentent ces garderies?», a-t-elle demandé. Elle a ajouté qu'un promoteur dont le projet a été écarté pourrait voir ses projets futurs compromis par la divulgation des résultats de son évaluation.

Nicolas Girard s'est dit étonné de la réponse. Le Ministère diffuse sur son site web les conclusions des rapports d'inspection dans les garderies. Il n'hésite pas à nommer les établissements malpropres. «Pourquoi deux poids deux mesures?», a ajouté le député de Gouin. Il a reproché à Mme Bérubé de faire une mauvaise interprétation de la loi.

Le PQ a également réclamé la liste des 68 projets totalisant 3500 places qui étaient recommandés par le Ministère mais qui n'ont pas été retenus. Nicolas Girard a rappelé que le Ministère avait lui-même diffusé la liste des 85 projets retenus par Mme Courchesne contre l'avis de ses fonctionnaires.

Mais il a essuyé un autre refus. «À ce moment-ci, ce ne sont pas des informations qui sont d'intérêt pour la population», a répondu Line Bérubé, soulevant la colère des députés péquistes.

Pour Nicolas Girard, «les familles du Québec ont droit à la vérité». «Ce n'est pas vrai qu'on va accepter une opération de camouflage pour protéger l'actuelle présidente du Conseil du trésor», a-t-il tonné. Il a demandé que «les droits des parlementaires» soient respectés.

Mais pour le député libéral Pierre Reid, les raisons invoquées par la sous-ministre pour refuser le dépôt des documents «ne sont pas farfelues».

Line Bérubé a reconnu que le processus d'attribution des places comportait des «lacunes» en 2008. Mais celles-ci ont été corrigées depuis, a-t-elle insisté.

De son côté, l'Unité permanente anticorruption fait toujours des vérifications pour voir s'il y a matière à enquête dans ce dossier.