Le Parti québécois veut permettre aux citoyens de déclencher eux-mêmes un référendum sur la souveraineté ou d'autres sujets par la voie d'une pétition. Réunis en conseil national, dimanche, les délégués péquistes ont adopté l'idée des référendums d'initiative populaire dont le député Bernard Drainville était le défenseur. La chef Pauline Marois avait pourtant des réticences.

Pour garder le contrôle sur l'agenda référendaire, elle a toujours voulu qu'un référendum ait lieu seulement «au moment jugé approprié par le gouvernement». C'est d'ailleurs la stratégie du PQ depuis qu'elle le dirige.

À la fin du conseil national, Pauline Marois a reconnu qu'elle était «frileuse» au sujet des référendums d'initiative populaire - elle était carrément contre en 2008. «Je suis d'accord maintenant avec cette orientation», a-t-elle toutefois affirmé en conférence de presse.

Elle a prévenu que si son parti est porté au pouvoir, l'Assemblée nationale définirait «des balises pour s'assurer que ces référendums soient bien faits». Une proposition en ce sens a été adoptée par les délégués. Les «impacts» de la mesure devront être «bien évalués», a ajouté Mme Marois.

Elle n'a pas voulu dire si un gouvernement péquiste serait obligé d'accepter un référendum réclamé par la population ou s'il se réserverait un droit de veto, par exemple dans le cas où on demanderait de limiter le droit à l'avortement. Elle a refusé de préciser si les référendums seraient exécutoires. Elle semble ne pas craindre les dérapages. «Écouter le peuple, ça ne risque pas de se retourner contre nous», a-t-elle dit.

La décision des délégués représente une victoire pour Bernard Drainville, qui a relancé l'idée des référendums d'initiative populaire en août dernier. «Bernard a fait son travail correctement. Il est surement très satisfait» du résultat, a commenté Mme Marois.

Un référendum sur la souveraineté - ou un autre sujet - serait déclenché si une part suffisante d'électeurs signent une pétition en ce sens. M. Drainville suggérait 15%, soit environ 850 000 personnes. Les modalités n'ont pas été précisées dimanche, et Mme Marois ne les définira qu'après les élections.

L'idée du référendum d'initiative populaire a fait son chemin au conseil national. En plénière, M. Drainville a touché une corde sensible au PQ en affirmant que René Lévesque avait déjà déposé, en 1984, un projet de loi pour permettre ce type de référendum. Il a souligné que «ce droit aurait permis aux Québécois de se mobiliser pour obtenir une commission d'enquête sur la corruption beaucoup plus rapidement». Après l'échec de l'accord du lac Meech, alors que la ferveur souverainiste était élevée, les citoyens auraient pu demander un référendum, «et on l'aurait eu notre pays», a ajouté M. Drainville.

Deux militants ont fait valoir que la proposition va à l'encontre du programme du parti. Neko Likongo, ex-candidat dans Jean-Talon, a plaidé qu'il faut «laisser les mains libres au gouvernement» pour qu'il puisse déterminer lui-même le moment d'un référendum. Un délégué de Bourget, Maurice Goyer, a affirmé que la stratégie pourrait se retourner contre un gouvernement péquiste. Les fédéralistes pourraient déclencher un référendum au moment où l'option est au plus bas dans l'opinion publique, a-t-il dit.

Une vaste majorité des 500 délégués a voté en faveur de la proposition. Le député Sylvain Gaudreault a voté contre; son collègue Yves-François Blanchet s'est abstenu.

Pauline Marois n'était pas dans la salle au moment du débat. Elle aattendu la fin du vote pour faire son entrée. Dans son discours de clôture, elle a affirmé qu'avec le référendum d'initiative populaire, le PQ a «confiance en la sagesse populaire».

Elle tenait un tout autre discours à son premier conseil national à titre de chef, en mars 2008. Elle avait utilisé tout son poids afin de battre une proposition du SPQ libre en faveur des référendums d'initiative populaire. Les délégués avaient voté contre presque unanimement. Dimanche, le secrétaire du SPQ libre, Pierre Dubuc, était ravi de ce revirement.

Après des mois de crises internes et le putsch avorté de Gilles Duceppe, le conseil national s'est déroulé dans l'harmonie. Le leadership de Mme Marois n'a pas été contesté.

Pour le droit de vote à 16 ans

Par ailleurs, s'il est élu, le Parti québécois donnera le droit de vote aux jeunes de 16 et 17 ans. Cette question a fait l'objet du plus long débat dimanche lors du conseil national sur le thème «Changeons la politique».

La proposition a été adoptée par une faible majorité. La chef Pauline Marois a affirmé que la mesure permettra d'augmenter le taux de participation aux élections chez les jeunes.

Les délégués ont également adopté une proposition visant à créer une «chambre des régions élue», une sorte de sénat. Ils ont aussi appuyé une mesure anti-transfuge. Pour passer à un autre parti, un député devrait se soumettre à une nouvelle élection.

Dans son discours de clôture, Pauline Marois a interpellé le «tandem Charest-Legault» afin que l'Assemblée nationale adopte une loi pour tenir des élections à date fixe dès la rentrée parlementaire le 14 février.

La chef a demandé aux militants «d'enclencher [les] préparatifs électoraux dès maintenant». «À compter d'aujourd'hui, un sentiment d'urgence doit nous habiter, a-t-elle dit. On retrousse nos manches.»