La chef péquiste Pauline Marois trouve «excellente» la proposition de Jacques Parizeau pour corriger le Plan Nord et éviter de «se faire avoir». Cette sortie a fait bondir les libéraux.

L'ancien premier ministre a proposé qu'en échange de l'aide publique destinée à construire des routes permettant de concrétiser leurs projets, les sociétés minières soient obligées de céder à l'État une part équivalente de leur actionnariat. M. Parizeau a déploré, entre autres, que Québec paiera 288 des 330 millions de dollars que coûtera le prolongement de la route 167 vers les monts Otish, où se trouvera une mine de diamants. La société Stornoway héritera du reste de la facture. D'autres sociétés demandent l'aide de Québec pour construire des routes dans le Nord. «On est sur le point de se faire avoir», a dit M. Parizeau au quotidien Le Devoir.

Pauline Marois a pris la balle au bond. «C'est tout le Québec qui prend le risque finalement dans le domaine des infrastructures, a-t-elle affirmé en conférence de presse, mardi. Si on prend le risque de construire une infrastructure, mais qu'en contrepartie, on a des parts dans l'entreprise, je trouve que, déjà, on diminue le risque par rapport à ce que fait actuellement M. Charest.»

Selon elle, «Jean Charest fait pire que Duplessis», qui bradait le fer «une cent la tonne». «Duplessis n'a jamais mis une cenne dans les infrastructures pour amener les minières à aller exploiter notre fer ou d'autres ressources», a-t-elle souligné.

Pauline Marois s'est défendue de vouloir éclipser M. Parizeau qui prenait la parole à peu près au même moment, à un colloque sur le développement minier à HEC Montréal. La femme de l'ancien premier ministre, Lisette Lapointe, a claqué la porte du caucus péquiste en juin. «Nous savions exactement qu'il était [mardi] matin aux HEC. Et, au contraire, moi, je pense que nos pensées se rejoignent et c'est complémentaire. Il me semble que c'est heureux que ça se passe comme ça», a-t-elle dit.

La chef péquiste est revenue à la charge contre le nouveau régime de redevances minières, qui a rapporté 300 millions l'an dernier. Elle milite pour des redevances basées non pas sur les profits, mais sur le volume de minerai extrait, en fonction des prix du marché. Elle propose également d'instaurer une taxe sur les profits excédentaires, c'est-à-dire supérieurs à un niveau qui serait jugé «raisonnable», comme en Australie.

La chef péquiste trouve «infime» le fonds de 500 millions en cinq ans que le gouvernement a mis à la disposition d'Investissement Québec pour des prises de participation dans des sociétés minières. «L'État doit utiliser tous ses moyens pour s'assurer que ce sont les Québécois qui vont ressortir gagnants de l'exploitation de nos mines. Les prises de participation peuvent être plus nombreuses et plus importantes», a-t-elle affirmé.

Réplique des libéraux

Deux ministres ont donné la réplique à la chef péquiste. Selon le titulaire des Finances, Raymond Bachand, «de façon générale, les entreprises paient les infrastructures» dans le Nord. Le cas de Stornoway est «exceptionnel», a-t-il dit. La route ne servira pas seulement au projet de la minière; elle donnera accès à un parc national et désenclavera une communauté autochtone. Le ministre a rappelé que la SGF a pris une participation de 37,5% dans Stornoway. Si d'autres minières veulent utiliser la route, elles devront payer, a-t-il souligné.

Raymond Bachand a ajouté que Jacques Parizeau «ne critique pas le régime de redevances». «Il parle des investissements de l'État, de ne pas gaspiller notre argent sur les routes et les infrastructures, etc. Mais il ne parle pas du système de redevances, sauf pour dire qu'il est compliqué», a-t-il dit.

Il a accusé le Parti québécois de vouloir en quelque sorte «nationaliser» les minières en plaidant pour des prises de participation «systématiques». Son collègue des Ressources naturelles, Clément Gignac, a invité à la prudence, vantant les prises de participation «stratégiques» réalisées par son gouvernement. «Je ne pense pas que les Québécois accepteraient qu'on joue au casino, a-t-il lancé. S'il y a des projets de mines d'or, tout le monde est excité parce que le prix est à 1800$. Je vous rappellerai que le prix de l'or était à 975$ en 1980, et qu'il était autour de 500$ 20 ans plus tard. Je pense qu'il faut juste faire attention.»