La FTQ-Construction et le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (International) (CPQMC-I) demandent finalement à leurs membres de ne plus paralyser les chantiers. «On demande à nos membres de retourner au travail et d'être paisibles sur les chantiers», a affirmémardi  Gérard Cyr, président du CPQMC-I. Même message du directeur général de la FTQ-Construction, Yves Ouellet. Mardi matin, le président de la FTQ, Michel Arsenault, a aussi demandé le retour au travail.

Ces poids lourds représentent 110 000 des 155 000 travailleurs de la construction. Ils sont enragés par le projet de loi 33, qui prévoit l'abolition du placement syndical sur les chantiers. Leurs membres adoptent des moyens de pression musclés depuis le début, cette semaine, de la commission parlementaire qui étudie ce projet de loi. Mais les deux syndicats persistent à dire qu'aucun mot d'ordre n'avait été donné. «Ça s'est fait spontanément», assure M. Cyr.

La FTQ-Construction comparaîtra cet après-midi à cette commission. Elle doit proposer une solution de compromis.

Lors de son témoignage mardi, le CPQMC-I s'est quant à lui montré inflexible. Il n'a pas proposé d'amendement.

Sa seule suggestion: que la ministre du Travail, Lise Thériault, jette son projet de loi à la poubelle. Le CPQMC-I qualifie ce texte de «tutelle» et «d'entreprise de démolition de ce qui constitue le coeur même du régime de relations de travail de l'industrie de la construction».

Incitation à filmer et dénoncer

Alors que plusieurs entrepreneurs et travailleurs ont dit avoir été victimes d'intimidation et parfois de menaces physiques, M. Cyr a affirmé que les relations de travail dans son industrie constituaient «un modèle de stabilité et de paix industrielle».

Près de 80 plaintes ont été déposées dans les 48 dernières heures à la Commission de la construction du Québec (CCQ). Cela représente un peu plus de la moitié des chantiers bloqués par les syndiqués.

La ministre a incité les victimes à documenter les gestes illégaux avec leur téléphone intelligent et à porter plainte. Les syndicats pris en défaut s'exposent à des amendes maximales de 70 000$ par jour.

Mme Thériault écarte encore, pour l'instant, le recours à une loi spéciale. Elle se dit ouverte à des amendements, mais pas sur le placement syndical. Elle doit présenter ce matin un autre projet de loi pour augmenter les pouvoirs de la Régie du bâtiment.

La Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) a dénoncé en commission le «système des chandelles». «Quand une innovation technologique remplace des travailleurs, le syndicat exige d'engager le nombre équivalent de travailleurs, explique-t-il. Par exemple, un robot remplace cinq chaudronniers. Le syndicat va dire: tu vas engager mes cinq gars, même s'ils ne travaillent pas. Les entreprises le font pour acheter la paix.»

Ce système a été documenté dans les années 70 par la commission Cliche, rappelle M. Hamel. Il perdure entre autres à cause de la pénurie de main-d'oeuvre. Les entrepreneurs craindraient que le syndicat refuse de leur fournir des employés pour de futurs travaux. Si on mettait fin au placement syndical, de telles menaces s'estomperaient, croit la FCCQ.

Le groupe s'inquiète des conséquences de cette perte de productivité sur l'industrie de la construction, qui compte pour 14% du PIB. «Un jour ou l'autre, ça va nous rattraper», prévient-il.

Marois pas encore décidée

Le Parti québécois (PQ) ne s'est toujours pas prononcé sur le projet de loi 33. «Il y a un lieu pour en débattre, c'est la commission parlementaire. Nous serons très attentifs à ce qui va se dire. Par la suite, nous prendrons position», a indiqué la chef du PQ, Pauline Marois.

Elle a refusé de répondre aux questions des journalistes. Les péquistes se sont quand même joints aux autres élus pour adopter à l'unanimité une motion qui condamne «sévèrement les arrêts de travaux, le vandalisme et l'intimidation sur les chantiers».