La nouvelle garde du Parti québécois réplique coup pour coup à l'ancien premier ministre Jacques Parizeau, cette fois en lui rappelant ses travers de chef.

Le «collectif des jeunes députés du Parti québécois» répond ainsi à une nouvelle lettre de M. Parizeau publiée mardi dans Le Devoir. Il y revendique son droit de parole et fait au PQ une leçon de démocratie, en prenant pour cible le collectif de 12 députés, loyaux à Pauline Marois, qui lui demande de leur faire confiance.

Les députés du «collectif» remontent donc au créneau et ripostent à leur tour. En entrevue téléphonique mardi, le député de Gouin, Nicolas Girard, a comparé le style de direction des chefs, au désavantage de M. Parizeau. Mais sa collègue Martine Ouellet a été plus prudente et n'a pas osé attaquer directement le style de ce mentor du mouvement souverainiste.

«À l'époque où M. Parizeau était chef (de 1988 jusqu'après le référendum de 1995), il n'y avait qu'une seule direction, droit devant, et les gens avaient intérêt à suivre cette direction, puisqu'il n'y avait pas de place pour la confrontation ou pour contredire les orientations du chef», a dit M. Girard.

À l'opposé, le député soutient que, de tous les chefs avec lesquels il a travaillé, Mme Marois est la plus à l'écoute.

«(Elle est) la plus ouverte, (celle) qui accepte le plus les conseils: Mme Marois c'est un exemple de leadership et d'ouverture pour ses militants, ses délégués et ses députés du caucus», a-t-il souligné, non seulement pour démentir les critiques des quatre députés qui ont claqué la porte la semaine dernière, mais aussi pour répliquer au déni de démocratie du PQ reproché par Jacques Parizeau.

L'ancien chef est en désaccord avec la stratégie d'accession à l'indépendance prônée par Mme Marois. Il la trouve trop timorée, même si les délégués l'ont entérinée en congrès en avril, malgré les efforts de la députée Lisette Lapointe, la conjointe de M. Parizeau, pour la faire amender.

«On ne peut pas, d'un côté, dire «on veut plus de démocratie», et quand on perd, bien là «ça ne fait plus notre affaire», a déploré M. Girard. Les gens ont pu s'exprimer au caucus, dans les congrès de comtés et au congrès.»

Pour sa part, une autre membre du «collectif», la députée Martine Ouellet, a dit être «déçue» de la lettre de M. Parizeau. Selon elle, l'ancien chef esquive les vrais enjeux et refuse de faire confiance aux députés péquistes, ce qu'ils lui demandaient.

«Dans le fond, il ne nous a pas répondu sur la confiance, il nous a amenés sur la gestion interne (du parti), a-t-elle commenté en entrevue téléphonique mardi après-midi. Pour vous dire bien franchement, je ne pense pas qu'un débat public de gestion interne soit très pertinent et très constructif.»

Celle qui a milité activement au référendum de 1995 refuse toutefois de s'aventurer jusqu'à qualifier d'autoritaire le style de M. Parizeau à l'époque.

«Je ne voudrais pas commencer à commenter (le travail) de chacun des chefs. Je ne pense pas que ça fasse avancer le parti. M. Parizeau avait une personnalité forte», s'est-elle limitée à affirmer.

Dans sa lettre, Jacques Parizeau condamne l'approche souverainiste de la chef péquiste, son non-respect de la liberté d'expression au sein du PQ et des fautes stratégiques récentes qui ont mené à ce qu'il considère être un «gâchis».

Sur un ton cinglant et parfois indigné, l'ex-premier ministre n'est pas tendre pour les 12 signataires du collectif, soulignant qu'ils ont «abusé» des «poncifs de la rectitude politique», ont donné dans l'«enflure verbale» et dans la «fanfaronnade» sans intérêt.

«Et après tout ce gâchis, vous venez me demander, au fond, de me taire! Comment pouvez-vous croire un instant que je pourrais obtempérer? Je n'interviens pas souvent; en fait de moins en moins souvent. Je n'abuse pas de mon droit de parole, mais j'y tiens», a écrit M. Parizeau.