Le gouvernement commet une «forme de maltraitance» en s'entêtant à imposer des partenariats public-privé (PPP) dans les centres hospitaliers de soins de longue durée (CHSLD), dénonce le député de Québec solidaire, Amir Khadir.

Il relance ainsi le débat sur les PPP avec une étude commandée par la Confédération des syndicats nationaux (CSN). L'étude conteste les économies réalisées par le gouvernement dans le premier CHSLD réalisé en PPP, à Saint-Lambert, en Montérégie.

Citée en commission parlementaire par M. Khadir, l'étude a été mise en doute par le ministre de la Santé Yves Bolduc, mercredi. Des témoignages recueillis par Radio-Canada soulèvent des doutes sur la qualité des soins du CHSLD Saint-Lambert-sur-le-Golf, ce que dément aussi le ministre.

«Il faut voir que le rapport a été demandé par le syndicat», a laissé entendre M. Bolduc en point de presse à la sortie du conseil des ministres.

«Sur quoi (le ministre) se base (pour contester l'étude)? a demandé M. Khadir en entrevue téléphonique à La Presse Canadienne. Juste parce que le messager a transigé avec le syndicat?  (...) C'est sûr que dans une société où les gouvernements sont de plus en plus proches des milieux financiers, heureusement qu'il y a les syndicats.»

L'étude plaide que les économies réalisées en PPP se font aux dépens des salaires «nettement inférieurs» des employés, ce qui expliquerait le haut taux de roulement du personnel.

M. Bolduc a déclaré qu'un «certain roulement de personnel est normal» dans les nouvelles résidences, mais que la qualité des soins est «aussi bonne» que dans le réseau public.

«On va avoir la même qualité que dans nos installations publiques, sauf que c'est géré par le privé», a-t-il dit, en ajoutant que les CHSLD en privé sont aussi soumis à des vérifications.

Le député de Québec solidaire n'est pas d'accord. L'organisation du travail liée aux contraintes financières et aux impératifs de rentabilité amène une charge supplémentaire de travail pour des effectifs plus réduits, a-t-il argué.

«L'étude démontre que le PPP ne peut pas, par définition, être profitable au public», a-t-il insisté.

Il a dit que la ministre responsable des aînés, Marguerite Blais, a le devoir de convaincre ses collègues aux Finances et à la Santé en vertu du plan de lutte à la maltraitance annoncé l'an dernier.

«Quand le gouvernement néglige de tenir compte des évidences et d'organiser les soins pour qu'il n'y ait pas de problème de qualité, c'est une forme de maltraitance, là j'exagère à peine.»

En point de presse, Mme Blais a déclaré qu'elle allait d'abord lire l'étude avant de se prononcer.

«Il y a des endroits à travers le monde où il y a des PPP qui fonctionnent très bien. Je pense c'est fondamental que les soins pour les aînés soient équivalents, qu'ils soient dans un CHSLD privé ou public.»

Le PPP est une «formule qui est très bonne, très acceptable», a fait valoir M. Bolduc. «On ne dénigre pas non plus le système public.»

Le gouvernement soutient qu'il épargnera 100 millions $ sur 25 ans grâce au partenariat du CHSLD Saint-Lambert-sur-le-Golf avec le groupe Savoie, mais l'étude de MCE Conseils prétend plutôt qu'il en coûtera 60 millions $ de plus.

Pour en arriver à cet écart, l'étude affirme que le ministère de la Santé surestime les risques de dépassement de coûts du mode traditionnel public et sous-évalue les risques de la construction en PPP.

M. Bolduc a pour sa part assuré que le PPP est «comme un projet clé en main», au montant total de 203 millions $, et qu'il n'y aura pas de dépassement de coûts. Si les coûts de gestion ou de main-d'oeuvre augmentent, «ça devient le problème du propriétaire», a-t-il tranché.

Il a rappelé que trois autres projets de PPP dans les CHSLD sont en cours. Pour M. Khadir, il faut les bloquer. Le CHSLD Saint-Lambert-sur-le-Golf doit servir d'«exemple» de ce qu'il ne faut pas faire et le ministère doit forcer le groupe Savoie à donner la même qualité de soins que dans les établissements publics.

»Si ça nous sert d'exemple et on ne met plus la main sur le feu, ça sera ça de moins de gaspillé.»