La chef de l'opposition, Pauline Marois, accuse le premier ministre Jean Charest d'être «en partie responsable du pourrissement de la situation à Montréal», dans la foulée des récentes affaires qui ébranlent l'administration du maire Gérald Tremblay.

Au cours d'une période de questions houleuse qui rappelait les débats acrimonieux de l'an dernier, les péquistes ont reproché, jeudi, au gouvernement de «protéger les libéraux» en faisant diversion, avec les enquêtes de l'opération Marteau et de l'unité anticorruption.

Pauline Marois a souligné que le maire Gérald Tremblay a lui-même redemandé, mercredi, une enquête publique sur l'industrie de la construction et l'attribution de contrats dans les municipalités, un cheval de bataille du Parti québécois depuis plus d'un an.

«Si le gouvernement avait déclenché une enquête publique il y a deux ans, on n'en serait pas là à essayer de colmater les brèches au fur et à mesure qu'apparaissent de nouvelles allégations (...), a lancé Mme Marois, particulièrement combative. Est-ce que le premier ministre se rend compte qu'il est en partie responsable du pourrissement de la situation à Montréal?»

Elle lui a demandé d'«arrêter de protéger le Parti libéral» et de déclencher une commission d'enquête. M. Charest a tourné ces attaques à la blague en soupçonnant son adversaire de faire une répétition générale, en vue du congrès du PQ en fin de semaine à Montréal.

«On va se dire les vraies choses: on a le droit à un petit réchauffement pour le congrès des membres du PQ, a-t-il dit, déclenchant l'hilarité dans ses rangs. Il va y avoir quoi sur la liste? La chef de l'opposition officielle va dire que leur première priorité, c'est la souveraineté, n'est-ce pas? Ouais! Et que notre priorité à nous, c'est l'économie, n'est-ce pas?»

De son côté, le porte-parole péquiste en sécurité publique, Stéphane Bergeron, a ressorti le cas de BCIA, cette entreprise de sécurité privée au passé compromettant.

Il a rappelé que deux ministre libéraux qui avaient des liens avec BCIA, Jacques Dupuis et Toni Tomassi, ont démissionné l'an dernier, de même qu'un chef de police de la Ville de Montréal, Yvan Delorme.

On a appris cette semaine que des enquêteurs privés avaient été mandatés par la Ville à l'époque pour se pencher sur les liens de BCIA avec M. Delorme, qui lui avait accordé un contrat et qui connaissait son dirigeant, Luigi Coretti. M. Coretti est sous le coup de plusieurs poursuites et est un donateur libéral, se plaît à rappeler le PQ.

Au printemps 2010, le gouvernement a renouvelé le mandat de M. Delorme et, deux semaines plus tard, à la suite de révélations concernant BCIA, il démissionnait. Le député péquiste reproche au gouvernement de l'avoir reconduit dans ses fonctions sans faire de vérification.

«Un chef de police de 47 ans qui vient d'être reconduit dans ses fonctions pour cinq ans et qui part subitement pour prendre sa retraite, ça ne méritait pas de vérifications du ministre de la Sécurité publique? a-t-il demandé. Pourquoi le gouvernement a-t-il attendu le vaudeville de cette semaine à Montréal avant de lancer une véritable enquête sur Yvan Delorme? Est-ce que c'est parce qu'il est trop proche de certains dirigeants du gouvernement libéral?»

Le leader parlementaire du gouvernement, Jean-Marc Fournier, n'a pas toléré cette hypothèse. «Insinuations, salissage, a-t-il déclaré. Invitation à répéter quand il n'y a pas d'immunité (parlementaire qui protège le député en Chambre).»

Stéphane Bergeron soupçonne aussi le gouvernement de ne pas déposer le rapport du jurisconsulte sur les fonds publics investis dans BCIA parce qu'il «implique des gens associés au Parti libéral».

Rappelons que l'administration du maire Gérald Tremblay est en pleine tempête cette semaine en raison d'affaires d'espionnage. Le contrôleur général de la Ville, Pierre Reid, a intercepté des courriels du président du conseil municipal, Claude Dauphin, qui était soupçonné d'avoir voulu favoriser une entreprise. M. Reid a été démis tandis que M. Dauphin a démissionné.

Pareillement, la surveillance d'Yvan Delorme a été révélée cette semaine. Elle était illégale, puisqu'en vertu de la loi, seul le ministre de la Sécurité publique peut enquêter sur un chef de police.

Le ministre Robert Dutil a donc confié, mercredi, un premier mandat à l'unité permanente de lutte contre la corruption, soit de faire la lumière sur ces allégations d'interception de communication, mais aussi sur l'attribution de contrats à des agences de sécurité privées.