L'ancien ministre péquiste François Legault publie ce matin la plateforme de sa coalition pour l'éducation, mais, déjà, ses intentions provoquent une levée de boucliers.

Dans une lettre au vitriol, la Fédération des commissions scolaires attaque sa position «peu documentée, partielle, populiste et empreinte de préjugés et de clichés» sur le système scolaire.

La Fédération, comme huit autres groupes dans le secteur de l'éducation, a eu, au cours des derniers jours, des rencontres privées pendant lesquelles M. Legault lui a donné les principales orientations que compte adopter la Coalition pour l'avenir du Québec, qu'il dirige avec l'homme d'affaires Charles Sirois.

La Presse a révélé samedi que M. Legault veut retirer la permanence aux enseignants. Il promet, en revanche, d'importantes hausses salariales, de l'ordre de 20%, mais à la condition que les résultats des classes s'améliorent. Aussi, il propose que les professeurs soient engagés par les directeurs d'école pour des contrats de trois à cinq ans. Ces directeurs d'école seraient, eux, choisis par les parents et payés en fonction de leur performance. Finalement, les commissions scolaires seraient abolies et remplacées par 20 agences régionales, un modèle déjà utilisé en santé.

La présidente de la Fédération des commissions scolaires, Josée Bouchard, ne mâche pas ses mots dans la lettre qu'elle a fait parvenir la semaine dernière à M. Legault.

«Je ne peux m'empêcher de vous témoigner ma profonde déception face à la vision de l'éducation que vous m'avez exposée lors de notre rencontre du 30 mars dernier.

«Il est tout à fait désolant de voir un ex-ministre de l'Éducation témoigner d'une vision aussi peu documentée, partielle, populiste, empreinte de préjugés et de clichés sur notre système d'éducation, au nom d'une efficacité qui ne peut conduire qu'à un éloignement des parents des lieux de décisions en éducation et à une iniquité inacceptable dans les services aux élèves.

«Belle justice sociale! Bel avenir pour les enfants du Québec!» lance-t-elle.

D'autres groupes - la Fédération des comités de parents et la CSD - comptent prochainement dénoncer publiquement la plateforme de la Coalition.

Mme Bouchard poursuit pour «réaffirmer l'opposition des commissions scolaires à un nouveau débat de structures sur notre système public d'éducation qui a surtout besoin de valorisation et non pas de démolition».

«Votre position n'est rien de moins qu'anti-système public d'éducation, anti-parents, anti-commissions scolaires, anti-développement régional, bref, anti-équité et surtout antidémocratique au nom de la prédominance du privé dans la gestion des programmes publics.»

Pour elle, le plan Legault signifie «rien de moins que de mettre en place un réseau de 3000 établissements publics sur le modèle des écoles privées».

Les directeurs écorchés

La Fédération n'est pas plus tendre envers Chantal Longpré, présidente de la Fédération québécoise des directions d'établissements d'enseignement. La représentante des directeurs d'école a cautionné la Coalition dès le premier jour et se trouvait aux côtés de M. Legault durant une bonne partie de ses rencontres.

Pour Mme Bouchard, cette participation entretient «une confusion des genres» qui suscite un profond malaise.

«François Legault nous a clairement affirmé, en votre présence, qu'il se joindrait à un parti politique ou qu'il fonderait un parti pour mettre de l'avant ses idées, rappelle Mme Bouchard.Quelle ne fut pas ma surprise de constater que la présidente d'une association qui représente 2000 directions d'établissement public endossait sans sourciller une vision qui dénigre autant notre système public d'éducation, une vision teintée de clichés, de perceptions personnelles erronées pour justifier soi-disant une plus grande efficacité du réseau de l'éducation», écrit-elle à Mme Longpré.

Pour Mme Bouchard, pas question que les commissions scolaires participent dans ce contexte au congrès des directeurs d'école. «À moins que vous ne clarifiiez cette situation hors de tout doute très prochainement, vous me voyez dans l'impossibilité d'accepter votre invitation à participer à votre congrès "Révéler son identité d'artiste en équilibre", qui traduit assez bien la situation dans laquelle, personnellement, vous vous retrouvez actuellement», conclut, ironique, la présidente de la Fédération des commissions scolaires.