Le député libéral Jacques Chagnon n'est pas encore officiellement président de l'Assemblée nationale que déjà il envisage de modifier le règlement dans l'espoir d'assainir le climat au Salon bleu. Selon lui, «il y a une part de masochisme» à vouloir présider les travaux tant ce climat est malsain en ce moment.

À la suite de la démission de Yvon Vallières vendredi, les libéraux se sont réunis en caucus ce matin et se sont ralliés derrière la candidature de M. Chagnon. Le député avait reçu la bénédiction du premier ministre Jean Charest.

M. Chagnon a «25 ans d'expérience à l'Assemblée nationale. Il est compétent pour faire ce travail, il est déjà vice-président. Et il a une bonne relation avec les députés de l'opposition», a fait valoir M. Charest à la sortie de la réunion.

Le premier ministre reconnaît que M. Chagnon «aura une tâche difficile». Il estime que «tout le monde doit faire un effort» pour assainir le climat en Chambre. Mais à ses yeux, le gouvernement a «déjà fait un effort très important». «Ça n'empêche pas que de temps en temps il peut y avoir des situations où des gens disent des choses qui dépassent leurs pensées, mais c'est vraiment une exception à la règle. Généralement, du côté libéral, on a été discipliné», a-t-il plaidé.   

Le nouveau président sera élu demain à l'issue d'un vote secret à l'Assemblée nationale. M. Chagnon a deux adversaires, le péquiste François Gendron et le député indépendant Marc Picard, mais la majorité libérale ne laisse planer aucun doute sur le résultat du vote.

Par voie de communiqué, la députée libérale de La Pinière, Fatima Houda-Pépin, autre candidature pressentie, avait annoncé tôt en matinée qu'elle ne briguera pas le poste, laissant le champ libre à son collègue de Westmount-St-Louis.

Jacques Chagnon se voyait déjà sur le trône de la présidence lors de son arrivée à la réunion du caucus libéral. «Une fois que je serai président, j'offrirai mes services de conciliateur aux deux partis pour voir s'il y a lieu de changer une partie de nos règlements», a-t-il affirmé.

Selon lui, «toute l'organisation de la période des questions doit être regardée». Des députés lui ont déjà fait des propositions.

Au-delà des modifications au règlement, les députés devront «au moins faire un examen de conscience collectif et individuel pour s'assurer que chacun d'entre nous est bien conscient que la population ne peut pas accepter le genre de rapport que nous avons les uns envers les autres à l'Assemblée nationale», a ajouté M. Chagnon.

«C'est une nécessité que le climat s'améliore à l'Assemblée. L'ensemble de la population requiert que ce climat change.»

Dans sa lettre de démission vendredi, l'ancien président Yvon Vallières, a déploré le climat «exacerbé» à l'Assemblée nationale, du jamais vu selon lui en 33 ans de vie parlementaire.

«Il y a une part de masochisme peut-être dans l'idée de se présenter à ce moment-ci», a reconnu M. Chagnon. «Si j'en juge par la réaction de mes collègues, peu importe les partis, il semble qu'ils veulent en général accepter le fait que je puisse présider les travaux de l'Assemblée et ça me conforte dans l'idée que je pourrais effectivement le faire.» Il a d'ailleurs passé le week-end à sonder les députés de tous les partis.

Questionné pour savoir s'il aura la poigne nécessaire pour ramener l'ordre en Chambre, M. Chagnon a répondu: «On verra».

Ministres et députés libéraux ont nié avoir une part de responsabilité dans le départ d'Yvon Vallières et le climat malsain à l'Assemblée nationale. Tout au plus, Raymond Bachand a reconnu que «ça arrive qu'on réagisse. Comme dans un match de hockey, quand l'autre donne des coups de poings et de hockey, des coups interdits, parfois il y a quelqu'un qui réagit. Mais regardez qui détériore le climat», a-t-il ajouté en faisant allusion au Parti québécois.

Selon le leader parlementaire Jean-Marc Fournier, l'opposition officielle a une «stratégie délibérée» pour provoquer le «chaos en Chambre». Il a déploré les « agressions envers le président» de son vis-à-vis Stéphane Bédard «avec l'appui de Pauline Marois». Le ministre Laurent Lessard s'est dit «écoeuré» de «l'ensemble du comportement en Chambre» de M.é Bédard.

Pour Norman MacMillan, le gouvernement «fait attention depuis un an, et j'en suis l'exemple exemplaire. J'ai contrôlé mes émotions. Et tout le monde l'a fait de notre côté. La faute est complètement de l'autre côté». «Il n'y a plus de respect depuis un an à l'Assemblée nationale», a-t-il ajouté.