La ministre Christine St-Pierre accuse le député péquiste Pierre Curzi de tenir des propos «alarmistes» au sujet de la situation de la langue française. «Il joue les Cassandre», a-t-elle lancé en entrevue à La Presse, mercredi.

Dans son «Esquisse du vrai visage du français au Québec», M. Curzi affirme entre autres que «l'anglicisation de Montréal et de sa couronne doit être renversée si on veut éviter l'anglicisation de tout le Québec à long terme».«On ne peut pas penser comme ça. C'est trop fort», a affirmé Christine St-Pierre, responsable de la Charte de la langue française. Selon elle, le PQ cherche surtout à «mousser» son option politique.

Le document de Pierre Curzi, dont La Presse a présenté les conclusions mercredi, indique que le pouvoir d'attraction de l'anglais est cinq fois supérieur à celui du français dans l'île de Montréal. «J'aimerais bien avoir la preuve de ça», a répliqué Christine St-Pierre, reprochant au PQ de ne pas avoir rendu public le document. Il sera disponible sur le site internet de M. Curzi «sous peu», dit-on au PQ.

Christine St-Pierre reconnaît toutefois que l'anglais a un pouvoir d'attraction important. «Il faut maintenir la vigilance. On est très conscient de ça», a-t-elle dit, énumérant des actions prises par son gouvernement dans le but d'améliorer la situation du français.

Selon l'«esquisse» de M. Curzi, la langue d'usage anglaise, celle utilisée le plus souvent à la maison, a progressé de 16% dans les couronnes de Montréal et de 3,3% dans l'île de 2001 à 2006. Le français a crû de 6% dans les couronnes et a reculé de 1,7% dans l'île.

Est-ce que «le grand Montréal s'anglicise» comme le dit le titre du document de M. Curzi? «Qu'il me montre son étude, a répondu Mme St-Pierre. Quand on va l'avoir, on va l'analyser.» Elle se demande quels chercheurs ont aidé M. Curzi à élaborer son esquisse.

Le démographe Marc Termote, qui n'a pas participé à la rédaction du document, mais dont les travaux y sont abondamment cités, a affirmé à La Presse que les conclusions du député rejoignent les siennes. Or, tout en critiquant les conclusions de M. Curzi, Christine St-Pierre dit accorder «beaucoup de crédibilité» à M. Termote. «C'est un chercheur que je respecte énormément, et la preuve, c'est qu'on vient de le nommer président du comité de suivi de la situation linguistique de l'Office québécois de la langue française», a-t-elle ajouté.

La ministre a insisté sur «certains progrès» réalisés au cours des dernières années. Par exemple, la proportion de jeunes allophones qui choisissent de fréquenter un cégep francophone est plus élevée qu'il y a dix ans. «Ce n'est pas encore parfait. Mais il y a des choses qui progressent. Est-ce que ça progresse assez vite? Non», a dit Mme St-Pierre.