Grâce au soutien des libéraux de Jean Charest, le lieutenant-gouverneur Pierre Duchesne pourra toucher cette année son allocation annuelle de 775 000 $.

Le gouvernement a décliné mercredi l'invitation de l'opposition péquiste de s'associer à une motion visant à couper les vivres au représentant de la monarchie britannique au Québec.

La motion du PQ, qui sera déposée jeudi, informe le lieutenant-gouverneur que l'Assemblée nationale s'abstiendra de voter les crédits qui lui sont destinés, le privant de la contribution financière annuelle de l'État québécois.

L'objectif poursuivi par le Parti québécois est de sanctionner M. Duchesne pour son refus de rendre des comptes sur ses dépenses devant les élus.

«En demandant que l'Assemblée nationale refuse de voter les crédits du lieutenant-gouverneur, la motion que nous présenterons amènerait une économie nette de près de 800 000 $, sans coupure de services, aucune coupure aux Québécois et aux Québécoises», a fait valoir en Chambre la députée de Taschereau, Agnès Maltais.

«Le gouvernement va-t-il s'associer à nous pour réitérer sa dénonciation du refus de rendre des comptes du lieutenant-gouverneur et demander à l'Assemblée nationale de ne pas lui voter de crédits?», a-t-elle poursuivi, bien consciente de placer le gouvernement dans une position délicate.

De fait, les libéraux ont rejeté la proposition du revers de la main, y voyant un stratagème du Parti québécois pour mousser la souveraineté.

Incapable de faire accepter son projet par la majorité, le PQ cherche à imposer la souveraineté à la pièce, a résumé le leader parlementaire du gouvernement, Jacques Dupuis.

«Quand vous dites qu'on va s'opposer à tout crédit lié à la fonction du lieutenant-gouverneur, évidemment, c'est nier l'existence du lieutenant-gouverneur, et ça, on n'entrera pas dans le jeu des péquistes. La population ne veut rien savoir de la souveraineté», a avancé M. Dupuis.

Le lieutenant-gouverneur du Québec a soulevé la colère des élus la semaine dernière en refusant de se présenter en commission parlementaire pour rendre des comptes sur sa gestion.

Pour justifier sa décision, M. Duchesne avait évoqué les conventions en vigueur dans les pays du Commonwealth et les privilèges reliés à sa fonction monarchique.

La position adoptée par le lieutenant-gouverneur n'a pas seulement été critiquée par les souverainistes mais aussi par le premier ministre Jean Charest.

De l'Inde, où il était en mission, M. Charest avait déploré la décision de M. Duchesne de ne pas participer aux travaux de la commission de l'administration publique.

En effet, «tout le monde est unanime» à regretter que le lieutenant-gouverneur ne soit pas venu en commission parlementaire, a convenu le leader parlementaire du gouvernement.

Mais de là à couper les vivres du représentant de la Reine pour faire plaisir aux souverainistes, il y a un pas que le gouvernement libéral ne franchira pas, a fait comprendre M. Dupuis.

«On ne jouera pas dans le stratagème des péquistes, a insisté M. Dupuis. On n'embarquera pas là-dedans. Jamais.»

Les effets de toge du leader du gouvernement lui ont valu les moqueries de son vis-à-vis de l'opposition péquiste, Stéphane Bédard.

«Le leader va se gagner une médaille du lieutenant-gouverneur avec ce qu'il a dit», a lancé M. Bédard, suscitant l'hilarité dans les banquettes de l'opposition.