Pauline Marois a dévoilé son jeu en 2009, faisant de la question identitaire la carte-maîtresse qu'elle utilisera pour redonner le pouvoir au Parti québécois (PQ).

Renforcement de la Loi 101, francisation des immigrants et laïcité des institutions publiques ont été à l'ordre du jour et le seront encore davantage en 2010.

Ainsi, le PQ a renoué avec ses racines, en se recentrant sur ce qui avait fait, avec la souveraineté, sa raison d'être: l'affirmation pleinement assumée de la différence québécoise.

Et ce, dans l'espoir d'en retirer des dividendes lors du prochain scrutin.

En attendant, un des dossiers sur lequel misera le PQ sera la position que devra adopter le gouvernement à la suite du jugement de la Cour suprême, qui a invalidé la Loi 104.

En 2002, la Loi 104 venait interdire les «écoles passerelles», ces écoles anglophones privées non subventionnées, dont se servaient certains parents, surtout immigrants, pour accéder au réseau scolaire anglais régulier et subventionné.

C'était une façon de contourner la Loi 101 et de faciliter l'anglicisation des enfants d'immigrants, une avenue jugée inacceptable par l'opposition officielle.

Le gouvernement Charest a jusqu'en octobre 2010 pour asseoir une nouvelle position, ce qui laissera beaucoup de temps au PQ pour continuer à dénoncer «l'immobilisme» et le «laxisme» de Québec sur ces questions.

Le PQ s'est montré particulièrement inquiet, en 2009, de constater que, chaque année, le Québec accueille quelque 5000 immigrants qui ne peuvent s'exprimer en français.

Aussi, s'il forme le gouvernement, il voudrait donc intervenir en amont, en imposant aux candidats à l'immigration d'apprendre le français avant leur arrivée.

Une fois rendus au Québec, s'ils ont des enfants, ils devront vite faire en sorte de les intégrer à la majorité, par exemple en s'assurant que leur petit se fait garder en français.

Une fois le secondaire complété, les jeunes immigrants pourraient être obligés de fréquenter le cégep en français.

Actuellement, l'obligation pour eux de joindre le secteur francophone prend fin avec le secondaire. En novembre, lors d'un colloque qui a réuni 500 militants à Montréal, la base du parti s'est prononcée en faveur de cette avenue.

Cependant, Mme Marois a refusé de prendre position clairement sur cette question.

Tout en prenant ses distances, elle n'a pas, non plus, rejeté clairement le controversé cours «Ethique et culture religieuse», associé à une forme d'endoctrinement au multiculturalisme.

A ce propos, Mme Marois a quand même réclamé, en décembre, une commission parlementaire, après avoir pris connaissance de l'étude de la chercheure Joëlle Quérin, publiée par l'Institut de recherche sur le Québec.

Une fois sur le marché du travail, les immigrants seront invités à gagner leur vie en français puisque le PQ veut aussi franciser toutes les entreprises, même celles comptant moins de 50 employés.

«Il faut absolument faire reculer l'anglais à Montréal», a tranché Mme Marois, en novembre, lors d'un colloque de son parti sur les questions identitaires.

C'est la seule façon, à ses yeux, de garantir la paix linguistique au Québec, une paix menacée par l'inaction du gouvernement.

Et l'intégration des immigrants à la majorité francophone est certainement un des facteurs garants de cette paix, selon elle.

S'il faut faire preuve d'ouverture aux étrangers et se montrer accueillants, ce ne doit jamais être au prix «de l'effacement de soi», de l'avis de la chef péquiste.

Dans le même esprit, Mme Marois déposait donc, en novembre, un projet de loi devant réaffirmer les grandes valeurs québécoises: égalité entre hommes et femmes, primauté du français et laïcité de l'Etat.

Le projet de loi n'a pas de chance d'être adopté, mais il a permis à l'opposition officielle d'ajouter de la pression sur le gouvernement, perçu comme étant mal à l'aise avec ces questions.

C'est ce qu'on a vu lors du débat autour du projet de loi 16, présenté par la ministre de l'Immigration, Yolande James, qui a finalement dû battre en retraite, tellement la controverse avait pris de l'ampleur.

En principe, le projet du gouvernement consistait à favoriser la diversité culturelle du Québec, en forçant tous les ministères à se doter de politiques destinées à répondre favorablement aux demandes particulières des immigrants et membres des communautés culturelles, incluant celles d'ordre religieux.

Mais certains, dont au PQ, y ont plutôt vu une menace directe aux droits des femmes à l'égalité, sous prétexte d'accommoder à tout prix les Québécois venus d'ailleurs.

Bref, aux yeux de l'opposition officielle, le gouvernement a tout faux en cette matière. Car, si le gouvernement a tort de vouloir faire primer les libertés religieuses sur les droits des femmes, il ne devrait pas pour autant rester les bras croisés, en attendant qu'éclate une nouvelle crise linguistique ou une nouvelle querelle collective autour des accommodements raisonnables.

C'est dans ce contexte que débutera l'année 2010, une année déterminante en termes de contenu pour le PQ, qui s'affaire à revoir son programme électoral, à adopter lors du prochain congrès national de 2011.

En jouant à fond la carte identitaire, Mme Marois fera le pari qu'elle pourra enfin gruger les précieux appuis qui lui manquent - surtout dans la région du «450», soit la ceinture autour de Montréal - pour espérer devenir lors du prochain scrutin, vraisemblablement en 2012, la première femme à occuper la fonction de premier ministre du Québec.