Mis à la porte par son parti au profit de Gérard Deltell, Gilles Taillon tente d'oublier son passage désastreux à la tête de l'Action démocratique.

«Je ne veux pas broyer du noir. Il y a une vie après l'ADQ et la mienne a commencé jeudi», a confié M. Taillon vendredi à La Presse Canadienne, faisant allusion à sa décision de remettre sa démission à l'exécutif du parti.

Le leader déchu s'était fait très discret depuis sa spectaculaire déclaration d'il y a dix jours, dans laquelle il réclamait une nouvelle course au leadership.

M. Taillon avait aussi lancé une bombe dans son propre camp, en soulevant des doutes sur l'intégrité du financement du parti.

A-t-il informé la Sûreté du Québec des «éléments troublants» qu'il disait avoir découverts dans les livres comptables du parti? Il refuse de répondre.

«J'ai fait ma déclaration et j'ai dit ce que j'avais à dire. Je n'en dirai pas plus à ce sujet», a-t-il insisté.

M. Taillon assure «avoir tourné la page» sur son mandat aussi court que rocambolesque à la direction de l'Action démocratique. Même s'il affiche un air serein, une amertume certaine se dégage de ses propos.

«C'est sûr que ce n'est pas agréable de devoir partir un mois après avoir été élu. Quand un leader doit quitter aussi vite, c'est signe que quelque chose ne fonctionne pas», a-t-il laissé tomber.

L'ancien chef n'a pas voulu commenter la nomination de Gérard Deltell à la barre du parti, se limitant à souhaiter «bonne chance» à son successeur pour la suite des choses.

Dans une lettre transmise aux médias la semaine dernière, M. Taillon laissait entendre que M. Deltell avait manoeuvré en sous-main avec le député dissident Éric Caire pour miner son leadership. Il se disait victime d'un putsch orchestré par Mario Dumont, sa garde rapprochée et le grand argentier du parti, le sénateur conservateur Léo Housakos.

Aujourd'hui, M. Taillon ne croit pas nécessaire de revenir sur le sujet. Il dit ne pas vouloir jeter de l'huile sur le feu.

«J'ai quitté à cause de la bisbille qui déchirait le parti. Je ne vais pas entretenir la crise. Cela ne donne rien de brasser la soupe. Je suis parti et je laisse les autres faire leur travail», a-t-il souligné.

Élu avec une seule voix de majorité sur Éric Caire le 18 octobre au terme d'une campagne au leadership grand-guignolesque, M. Taillon a aussitôt été confronté à la révolte des députés Caire et Marc Picard.

Ces derniers ont claqué la porte du parti, incapables de supporter le style autoritaire du nouveau chef.

Cloué au pilori par les jeunes adéquistes, désavoué par son prédécesseur Mario Dumont puis évincé par le caucus des députés et l'exécutif du parti, Gilles Taillon n'aura été leader de l'ADQ que pendant un mois.

«C'est peut-être un record Guinness», a-t-il concédé à la blague.

Malgré une sortie de piste pour le moins humiliante, M. Taillon n'a pas coupé les ponts avec l'Action démocratique.

«J'ai toujours ma carte de membre. Je reste un militant», a-t-il soutenu.

Maintenant que le chapitre est clos, M. Taillon dit vouloir consacrer ses énergies à recouvrer la santé.

Atteint d'un cancer de la prostate, il se soumet à des traitements de radiothérapie qui se prolongeront jusqu'en janvier.

«Je me contente de prendre soin de ma santé. Je veux combattre la maladie et je me concentre là-dessus. Ma condition n'est pas dramatique mais je dois prendre ça au sérieux», a-t-il relevé.