Le Québec doit tourner la page sur les crises constitutionnelles, signer la Constitution canadienne et revoir en profondeur le fonctionnement de sa société et de son économie pour assurer son avenir.

C'est là l'essentiel du message lancé jeudi par un groupe de réflexion dirigé par le fondateur de l'Action démocratique du Québec et ancien maître à penser du Parti libéral du Québec, Jean Allaire, dans un rapport intitulé Pour un Québec plein de promesses.

«Nous amenons des idées pour la société afin de contrer ce que certains ont qualifié, il n'y a pas très longtemps, de déclin tranquille du Québec», a résumé M. Allaire.

L'adhésion du Québec à la Constitution canadienne est cependant assortie de cinq conditions, notamment la reconnaissance de la nation québécoise dans la Charte canadienne des droits et libertés, la dévolution des pouvoirs connexes à la langue française, incluant ceux touchant l'ensemble des télécommunications et l'immigration, et le respect de la prédominance du français au Québec.

Il s'agit là d'un recul significatif par rapport aux revendications traditionnelles du Québec, entre autres en ce qui a trait aux limites à imposer au droit de dépenser du gouvernement fédéral et au droit de veto du Québec en matière d'amendements constitutionnels.

M. Allaire est toutefois persuadé que le Québec doit faire le premier pas. «Il n'y aura pas de possibilité d'amender la Constitution si on ne rétablit pas d'abord les ponts avec le reste du Canada, j'en suis convaincu (...) Et il ne faut pas les rétablir avec des menaces de référendum (...) Un auteur a dit «reconquérir le Canada». C'est pas mal exact. Le reconquérir, mais reconquérir l'esprit et le coeur des Canadiens.»

En matière d'économie, le rapport propose d'entrée de jeu l'imposition d'une rigueur budgétaire inédite à l'ensemble des administrations et organismes publics.

Quant aux propositions économiques, on note la construction d'un train à grande vitesse Montréal-Boston-New-York, le corridor Québec-Windsor étant tout à fait inutile, selon eux. Les penseurs suggèrent également un recours fortement accru à la tarification, allant du péage sur les autoroutes à des hausses tarifaires d'Hydro-Québec.

Devant la croissance du nombre de retraités et la baisse du nombre de travailleurs, le groupe suggère de déplacer la fiscalité en réduisant les impôts sur le revenu et en augmentant la taxe de vente du Québec (TVQ), mesure assortie, comme pour les hausses tarifaires, d'allégements pour les ménages démunis. Ils suggèrent aussi une hausse de l'âge de la retraite à 67 ans afin de contrer l'effet du vieillissement de la population sur le marché du travail.

Les auteurs proposent de plus un «service civil» volontaire pour les prestataires d'aide sociale, dont le travail serait rémunéré sans pénalité en surplus de leurs prestations.

«Ce service volontaire ne doit vraiment pas être vu comme un principe obligatoire. C'est la spécificité du Québec (...) c'est que chez nous on a cet aspect social-démocrate extrêmement raffiné et moi je pense qu'on est capable d'y arriver simplement par le volontariat. Je n'oserais jamais souhaiter quelque chose d'obligatoire. Je suis convaincu qu'il y en a qui vont être intéressés à le faire», a commenté Pierre Harvey, l'un des auteurs.

Le groupe propose par ailleurs une véritable révolution dans le domaine de la santé par l'instauration d'un ticket modérateur substantiel et la création d'une société d'État, à l'image d'Hydro-Québec, pour gérer le réseau. La création de «Santé-Québec» permettrait, selon eux, de dépolitiser le système de santé, d'éliminer une large part de la bureaucratie et d'en réorienter les ressources qualifiées vers la prestation de soins.

En matière d'éducation, les auteurs dénoncent la réforme actuelle et estiment qu'il faut mettre un terme aux réformes mur à mur. Ils suggèrent plutôt d'accorder une plus grande autonomie aux écoles afin de permettre à celles-ci d'ajuster individuellement leur approche pédagogique à leur clientèle. En ce sens, bien qu'ils estiment «prématuré» de proposer l'abolition des commissions scolaires, ils estiment tout de même que leurs responsabilités doivent être réduites et leur rôle repensé.

Les membres du Groupe Avenir Québec, comme ils se nomment, affirment être totalement apolitiques et insistent sur le fait qu'ils ne sont financés par personne d'autre qu'eux-mêmes. Jean Allaire s'est d'ailleurs défendu de vouloir présenter un programme taillé sur mesure pour l'Action démocratique devant la difficulté pour cette formation de se donner une voix cohérente depuis le départ de son chef et fondateur, Mario Dumont.