Le gouvernement Charest a sur la table un scénario qui fera grimper le prix du «bloc d'énergie patrimonial» de 1 cent le kilowattheure, ce qui amènera plus de 1 milliard par année dans les coffres du gouvernement.

Actuellement, cette énergie est maintenue artificiellement à 2,8 cents le kilowattheure. Selon les simulations qui circulent, cette décision ferait monter de 265$ par année environ la facture moyenne des abonnés résidentiels. D'autres simulations évaluent toutefois la hausse à 175$ si, comme on le prévoit, la hausse des tarifs suscite un réflexe d'économie d'électricité et incite les consommateurs à se tourner vers d'autres sources d'énergie.

C'est le genre de calcul que s'échangent depuis des semaines le ministère des Finances et Hydro-Québec. La Presse a révélé il y a deux semaines que le bloc patrimonial d'Hydro - 165 milliards de kilowattheures, soit les trois quarts de la production d'Hydro-Québec - était dans la ligne de mire du ministre Bachand.

Québec est en quête de revenus pour réduire les 13 milliards de déficits prévus pour les quatre prochaines années.

Le ministre Bachand avait soutenu qu'il s'agissait d'un scénario parmi d'autres. Mais, surtout, il avait indiqué qu'il n'avait pas l'intention de multiplier les hausses de tarifs; un ou deux gestes importants étaient envisagés.

Ces scénarios, le président d'Hydro-Québec, Thierry Vandal, ne voudra pas en parler aujourd'hui à la commission parlementaire sur le plan stratégique de la société d'État pour les années 2009 à 2013. Alors ministre des Ressources naturelles, Claude Béchard avait renvoyé Hydro à sa table à dessin en début d'année, jugeant que la société n'était pas assez déterminée à augmenter les exportations par des contrats à long terme. Juste après que Nathalie Normandeau eut remplacé Béchard, en juin, Hydro a vite déposé son plan et obtenu l'aval du gouvernement.

Aujourd'hui et demain, la direction d'Hydro insistera sur les nouvelles technologies. Ainsi, on va ressortir la voiture électrique pour arriver au parlement, ce matin, histoire de donner des images aux bulletins télévisés. La même recette avait été utilisée l'an passé.

Thierry Vandal indiquera par ailleurs qu'Hydro sera le maître d'oeuvre des projets éoliens dans le Nord québécois.

Hydro augmentera sa production de 4500 MW dans les prochaines années, ce qui coûtera 10 milliards. En plus du projet de La Romaine (1550 MW), les autres projets sont énumérés pour la première fois dans le document rendu public hier. Il s'agit de barrages sur les rivières Magpie (850 MW) et Petit-Mécatina (1200 MW), sur la Côte-Nord, ainsi que de la centrale Tabaret, au Témiscamingue (132 MW). La production de trois centrales existantes sera augmentée, soit celle de Sainte-Marguerite (440 MW), de Manic-2 (120 MW) et de Manic-3 (210 MW).

D'autres projets totalisant 3500 MW seront lancés dans le Grand Nord, mais Hydro ne les nomme pas dans son document de l'été dernier. Tout ce qu'on peut savoir, c'est qu'il s'agit de projets hydroélectriques de 3000 MW ainsi que d'énergie éolienne et renouvelable «émergente» de 500 MW.

Hydro veut par exemple mettre à l'essai des hydroliennes, des turbines immergées qui produisent de l'électricité grâce au débit d'un cours d'eau, dans le Nord du Québec et dans les communautés qui ne sont pas reliées à son réseau.

Par ailleurs, Hydro-Québec n'a pas abandonné son projet de s'associer avec «un fournisseur de taille mondiale» pour mettre un pied dans l'industrie de la voiture électrique, indique le plan stratégique, mais la société d'État ne donne aucun détail sur les progrès réalisés.

Un groupe de travail a été mandaté pour coordonner les efforts de développement du transport électrique, et notamment la création d'une infrastructure de recharge des batteries qui sera indispensable à la mise au point de la voiture électrique.

En attendant, Hydro doit gérer d'énormes surplus d'électricité, accumulés pendant la période où elle prévoyait ne plus pouvoir répondre à la demande au Québec. Elle a donc acheté sur le marché, à prix très élevé, de l'électricité qui s'avère aujourd'hui excédentaire en raison du ralentissement économique et de la baisse de production chez ses clients industriels.

Hydro sera en situation excédentaire jusqu'en 2017 et devra revendre cette énergie à perte. Ces pertes, qui atteindront des centaines de millions de dollars, devraient contribuer à faire augmenter les tarifs d'électricité, mais les hausses demeureront modestes, prévoit Hydro. Comme distributeur, la société d'État a demandé à la Régie de l'énergie une hausse de 0,2% à partir du 1er avril 2010 et prévoit des augmentations inférieures à 2,5% les années subséquentes.