La police doit terminer son travail avant que les politiciens envisagent la possibilité d'une commission d'enquête spéciale pour faire la lumière sur l'attribution des contrats à la Ville de Montréal.

En dépit de l'appui des quotidiens Le Devoir et The Gazette qui, comme La Presse, ont demandé à Québec qu'on se penche sur l'administration de Montréal, les politiciens ont tenu à garder leurs distances, n'ont pas voulu «mettre le doigt» dans cette controverse, selon l'expression de M. Charest.

Les révélations de La Presse cette semaine, le témoignage d'un entrepreneur qui a soutenu que la pègre lui avait demandé 40 000$ pour qu'il conserve son contrat de réfection du toit de l'hôtel de ville de Montréal n'ont pas ébranlé l'Assemblée nationale, pas plus que la révélation que les Hells Angels blanchissaient les revenus de la vente de stupéfiants par le biais d'entreprises légales.

«Il y a des enquêtes en cours, la police, le vérificateur général. Il faut d'abord avoir les résultats de cela avant d'aller plus loin s'il y a lieu», a estimé hier Mme Marois.

Même si elle venait d'accuser la ministre Nathalie Normandeau de s'être «fermé les yeux» sur les problèmes de la métropole, la chef péquiste n'avait pas à proposer de stratégie différente de celle du gouvernement du Québec.

«Le gouvernement n'a pas fait ses devoirs, il aurait pu poser un certain nombre de questions», a dit, vague, Mme Marois, avant d'ajouter que Mme Normandeau «aurait pu exercer autrement sa responsabilité».

Même si elle ne souffle mot de ce qu'elle ferait, Mme Marois souligne que «cela nous inquiète actuellement ce que l'on constate» à Montréal.

Rapidement, elle convient que le climat de suspicion qui plane au-dessus de l'hôtel de ville «peut influencer la campagne actuelle». «On le voit, il y a un peu d'inquiétude. Quand on ne connaît pas trop la situation, cela peut avoir un impact. Le gouvernement Charest, après avoir désorganisé dans le fond notre Ville de Montréal avec tous les changements apportés au niveau structurel, s'en est lavé les mains, ne s'en est pas préoccupé», estime-t-elle.

«Ce n'est pas à nous de mettre le doigt là-dedans politiquement», a conclu plus tard Jean Charest, en faisant aussi le bilan de la session parlementaire. «Il y a plusieurs enquêtes en cours actuellement et la démonstration est certainement faite depuis les six derniers mois que ceux qui ont des responsabilités à ce sujet font leur travail», a-t-il dit le jour même où une nouvelle série de perquisitions était effectuée par la SQ dans le secteur de la construction.

Jean Charest tient à «ce qu'on fasse la lumière sur ces événements, et que ce soit fait correctement». «Je veux des conclusions d'enquête qui nous permettront ensuite de poser des gestes au besoin. En législateur, notre job à nous c'est de permettre aux enquêtes de se faire», a-t-il dit.

Pour l'ADQ qui réclame une enquête publique sur l'ensemble du secteur de la construction, une enquête distincte sur Montréal n'est pas pertinente. Une commission d'enquête sur la construction est plus «englobante», estime Sylvie Roy, chef par intérim de l'ADQ.

Alors que Québec injecte 43 milliards dans les travaux d'infrastructures, lever le voile et «éclairer les gens sur ce qui se passe» arriverait, selon Mme Roy, à point nommé. Dans le cas de la construction, les citoyens «pourraient comprendre comment cela fonctionne», un résultat bien différent des enquêtes policières qui cherchent à «trouver un coupable». «Une commission permettrait de faire les liens, voir les ramifications puis de comprendre comment la toile d'araignée est construite», conclut-elle.