Session fertile en crises et en réalignement. Le gouvernement libéral a dû composer avec les controverses de la Caisse de dépôt, des FIER, les inquiétudes sur la fiabilité des tests de cancer du sein, et l'éthique de certains ministres, actuels et passés.

Pauline Marois n'a pas été en reste. Lançant prudemment un nouveau plan souverainiste, elle s'est trouvée confrontée aux déclarations de Jacques Parizeau. Elle a dû composer cette semaine avec les sorties intempestives de son critique aux Finances, François Legault, pressé d'en finir avec les «vaches sacrées» de la société québécoise.

Pire encore, alors que le PQ devait remporter haut la main la complémentaire dans Rivière-du-Loup, il est désormais loin d'être acquis que l'ex-bloquiste Paul Crête pourra arracher l'ancien siège de Mario Dumont.

Mais à cette session étonnante, libéraux et péquistes ont mis un point d'orgue prévisible dans les injures. Pour Mme Marois, le gouvernement a été réélu sur une «imposture», Jean Charest «a menti à la population». Pour son adversaire, la péquiste est totalement «irresponsable», et lance des attaques à défaut d'arguments. Les PPP, pour Mme Marois, c'est: «pas polie Pauline», de blaguer Jean Charest, faisant hier le bilan des six mois écoulés depuis sa réélection.

Devant ces bilans de fin de session, la chef adéquiste Sylvie Roy baisse les bras. Le dialogue de sourds entre libéraux et péquistes est de retour avec la quasi-disparition de l'ADQ, «on croirait voir un vieux film en noir et blanc des années 70», a-t-elle dit.

Pour arriver à fermer la Chambre hier, le gouvernement a laissé sur la table son projet de loi 40 qui permet de suspendre la loi antidéficit pour replonger le Québec dans l'encre rouge pour quatre ans. Le PQ, qui avait fait son beurre des négociations de Philippe Couillard pour trouver un emploi alors qu'il était encore membre du gouvernement, a laissé filer le débat sur l'éthique - beaucoup de députés, des deux côtés de la Chambre, appréhendent des règles contraignantes.

Dans son bilan hier, Mme Marois a voulu ruser avec le gouvernement, réclamant un remaniement ministériel pour aiguillonner un gouvernement «déjà usé et à bout de souffle».

En fait, elle défonce une porte ouverte. Un important jeu de chaises musicales est déjà prévu pour mardi - tous les ministres ont été convoqués à une dernière réunion du Conseil, dès 8h du matin. En prime, on annoncera aussi un vaste rebrassage des sous-ministres - quelques retraites sont prévues.

Le vent tourne

Pendant plusieurs semaines, le PQ a eu le haut du pavé à l'Assemblée nationale: les attaques incessantes de François Legault, le critique financier du parti, sur la Caisse de dépôt puis sur le programme des FIER, pour favoriser l'investissement en région, ont souvent fait mouche.

Mais plus récemment, le vent a paru tourner. Après une semaine dans les câbles, le gouvernement a mis fin à la controverse sur les tests du cancer du sein. Le nouveau plan souverainiste de Mme Marois a décollé sans problème, mais la sortie inattendue de Jacques Parizeau, pour qui la souveraineté avance à coup de crise, a plombé les efforts du PQ.

Cette semaine, François Legault paraissait impatient, réclamant des compressions importantes de dépenses même au prix du confort des contribuables. Cette sortie sur les vaches sacrée était si détonante qu'hier, un reporter a demandé si M. Legault partirait avant la fin de son mandat, ce que ne croit pas la chef péquiste.

Hier, Mme Marois a reconnu que la joute serait chaude pour le PQ dans Rivière-du-Loup pour son candidat Paul Crête, dans la complémentaire de lundi. Pour diminuer les attentes, elle a rappelé que le PQ avait fini troisième dans cette circonscription aux dernières élections - «on part de là», a-t-elle dit. Inversement, Jean Charest a annoncé qu'il comptait de rendre dans Rivière-du-Loup lundi soir, signe d'optimisme quant au choix des électeurs.

Du point de vue de Mme Marois, les Québécois se souviendront de Jean Charest, qui soutenait sans nuance avant les élections qu'il n'y aurait pas de problèmes avec la Caisse de dépôt et que le Québec ne ferait pas de déficit. Six mois plus tard, le PLQ est en train de retomber dans l'ornière des déficits où les péquistes avaient trouvé le Québec en 1994. Il avait fallu alors corriger le tir et imposer de douloureuses compressions de dépenses. «Je ne veux pas revivre ça», de dire Mme Marois.

Pour Jean Charest toutefois, on peut se demander «qui mène au Parti québécois» quand on voit Mme Marois proposer un retour très progressif au déficit zéro et son critique aux Finances, François Legault, se faire l'apôtre d'une médecine de cheval, une obsession des dépenses calquée sur les orientations des «lucides» à l'automne 2005. Jean Charest avait applaudi aux lucides, mais leur rapport ne suivait pas la pire crise économique depuis les années 20, d'expliquer M. Charest.

Dans un point de presse marathon sur la situation économique, M. Charest a laissé tomber que le Québec fait «mieux que partout ailleurs sur la planète», grâce aux décisions de son gouvernement.