Le ministre des Finances et du Développement économique du Québec, Raymond Bachand, refuse d'attendre le rapport du vérificateur général pour modifier les règles encadrant les Fonds d'intervention économique régional (FIER). Il a annoncé aujourd'hui la création d'un «groupe conseil» dont le mandat est de lui faire des recommandations sur la gouvernance des FIER dès la mi-juin.

Le groupe est présidé par Louis Roquet, président de Desjardins Capital de risque. En 1995, le gouvernement péquiste l'avait nommé PDG d'Investissement Québec, l'organisme qui aujourd'hui chapeaute les FIER. M. Roquet a assumé cette fonction jusqu'en 2002. Il a ensuite présidé la SAQ, poste qu'il a quitté en 2004, un an après l'arrivée au pouvoir des libéraux.

Un autre ancien PDG d'Investissement Québec, Maurice Prud'homme, est membre du groupe conseil. Il est un proche de la chef péquiste Pauline Marois et de son conjoint, Claude Blanchet. Le gouvernement péquiste l'avait nommé à la tête d'IQ en 2002. Il est aujourd'hui directeur général du Fonds d'investissement de la culture et des communications. Il a travaillé à la mise sur pied du Fonds de solidarité de la FTQ.

Les autres membres du groupe conseil sont :

- Janie Béïque, vice-présidente du Fonds de solidarité de la FTQ;

- Jean Martel, avocat chez Lavery, ancien président de la Commission des valeurs mobilières et ancien sous-ministre adjoint aux Finances;

- Michel Nadeau, directeur général de l'Institut sur la gouvernance d'organisations privées et publiques, ancien dirigeant de la Caisse de dépôt et placement ;

- Marie-France Poulin, vice-présidente du Groupe Camada, actionnaire des FIER Cap Diamant de Québec et du FIER Beauceron. En 2003, elle a été membre du comité de travail sur le capital de risque présidé par Pierre Brunet, qui a recommandé la création des FIER.

La plupart des membres du groupe sont bénévoles, a indiqué Raymond Bachand. Le ministre a demandé au groupe de lui faire des recommandations sur la gouvernance des FIER, dans un mois. Il souhaite les mettre en oeuvre à temps pour le versement de 60 millions de dollars supplémentaires dans les FIER, annoncé dans le dernier budget.

Le rapport du vérificateur général sur les FIER ne sera prêt vraisemblablement qu'à l'automne. M. Bachand ne voulait pas attendre jusque là pour modifier les règles et verser les 60 millions promis.

Raymond Bachand refuse d'admettre que la gouvernance des FIER pose problème. «Je reconnais que les gens posent des questions sur la gouvernance des FIER», s'et-il contenté de répondre. Il s'est déjà dit ouvert à la modification des politiques d'investissement et de conflits d'intérêts des FIER, ces fonds de capital de risque voués au développement régional et financés aux deux tiers par l'État.

Pour le député péquiste François Legault, la création du groupe conseil est un «désaveu» du PDG actuel d'Investissement Québec, Jacques Daoust. Avec cette décision, Raymond Bachand fait aussi un «aveu d'échec», puisqu'il niait l'existence d'irrégularités dans la gestion des FIER au début de la controverse, il y a deux semaines. «C'est un autre virage du ministre dans ce dossier», a lancé M. Legault.

Le critique en matière de finances salue toutefois la création du groupe conseil, formé à ses yeux de «personnes compétentes». C'est «sage», selon lui, de modifier les règles de gouvernance des FIER avant d'y verser d'autres millions de dollars.

Il trouve toutefois étrange que le groupe conseil fasse des recommandations au ministre avant de connaître les conclusions du vérificateur général. «Il y a un problème d'arrimage», a-t-il noté. Selon lui, le ministre aurait pu lui-même modifier certaines règles dès maintenant.

Le PQ et l'ADQ ont révélé au cours des dernières semaines que des FIER ont versé des millions de dollars à des entreprises dans lesquelles leurs propres administrateurs ont des intérêts importants. Des FIER font aussi une grande part de leurs investissements à l'extérieur de leur région, bien souvent à Montréal et Québec. Six d'entre eux ont réalisé plus de la moitié de leurs placements à l'extérieur, ce qui contrevient aux règles actuelles.