Le Fonds d'intervention économique régional (FIER) Ville-Marie de Montréal, administré par deux proches du PLQ, Pietro Perrino et Valier Boivin, a investi 4 millions de dollars dans quatre entreprises qui comptent les deux hommes parmi leurs actionnaires, accuse le Parti québécois.

MM. Perrino et Boivin administrent aussi le FIER Boréal du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui a versé de son côté plus de 2 millions aux quatre mêmes entreprises de la région de Montréal, comme l'avait signalé le PQ mercredi. Dans ce cas, qui a fait l'objet de vérifications, «ce n'est pas contraire aux règles», a indiqué le PDG d'Investissement Québec, Jacques Daoust, hier.Pietro Perrino et Valier Boivin ont créé le FIER Ville-Marie en janvier 2006. Ce fonds de capital de risque - financé aux deux tiers par Québec comme les autres FIER - a investi 1 million de dollars dans chacune des entreprises suivantes: ZoomMed, Systèmes BUS, Toptent et Ranaz. MM Perrino et Boivin détiennent des actions dans ces quatre entreprises. Ils avaient des intérêts dans ZoomMed lorsque le FIER Ville-Marie y a fait un investissement. Ils administraient ce fonds au même moment. M. Perrino est président du conseil de ZoomMed, qui a développé un prescripteur électronique.

«Ils ont investi dans quatre entreprises où ils sont actionnaires. Puis après, le fonds du Saguenay a investi dans les mêmes entreprises, mais, supposément, M. Perrino n'a rien à voir là-dedans. Est-ce que le ministre prend le monde pour des valises? Comment se fait-il qu'on a les mêmes investissements dans les deux FIER?» a lancé le député péquiste François Legault lors de la période des questions.

Selon le ministre du Développement économique, Raymond Bachand, MM Perrino et Boivin n'étaient encore ni administrateurs ni actionnaires de Ranaz lorsque le FIER Ville-Marie y a fait «un premier investissement» en mai 2006. Cette entreprise est spécialisée dans la fabrication de suppléments alimentaires. «Les affirmations du député sont inexactes et incomplètes», a-t-il affirmé, l'accusant d'«agir par pure partisanerie politique».

Pietro Perrino et Valier Boivin se défendent d'avoir violé les règles éthiques, dans ce cas comme dans celui de FIER Boréal. «On procède toujours de la même façon. (Les intérêts dans les entreprises) sont déclarés avant. C'est expliqué, et on ne participe pas aux décisions», a affirmé M. Perrino, lors d'une conférence de presse qu'il a tenue en compagnie de M. Boivin à Montréal.

En commission parlementaire, le PDG d'Investissement Québec, Jacques Daoust, a toutefois reconnu que les deux hommes «ont probablement eu de l'influence» sur les autres administrateurs de FIER Ville-Marie et de FIER Boréal dans les choix de placements.

Plus tôt, en conférence de presse, M. Daoust a affirmé que la politique d'investissement et celle relative aux conflits d'intérêts «ont été respectées» dans la gestion du FIER Boréal. MM Perrino et Boivin - deux des trois membres du conseil d'administration - ont divulgué les intérêts qu'ils avaient dans les entreprises et n'ont pas participé aux décisions au sein du comité de placements. Dans certains cas, les deux hommes sont devenus actionnaires des entreprises au moment où le FIER Boréal décidait d'y faire un investissement, ce qui est une bonne chose pour attirer d'autres investisseurs, a ajouté M. Daoust. Selon MM Perrino et Daoust, leurs parts dans les entreprises oscillent autour de 1%, pas plus.

Un FIER peut faire jusqu'à la moitié de ses investissements à l'extérieur de la région qu'il dessert. Environ 3,25 des 6 millions investis par FIER Boréal - un peu plus de la moitié - le sont ailleurs qu'au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Mais il dispose d'un délai pour respecter la règle d'Investissement Québec. Une seule des quatre entreprises dans lesquelles MM Perrino et Boivin ont des intérêts - Toptent - a un projet de développement au Saguenay-Lac-Saint-Jean, a indiqué M. Daoust.

Un FIER ne peut verser plus d'un million de dollars à une entreprise. Mais plusieurs FIER peuvent investir dans la même entreprise, à condition qu'ils n'acquièrent pas plus de 30% des actions à droit de vote. Toptent a reçu de l'aide d'au moins trois FIER.

«À l'intérieur des balises qui existent et à l'intérieur du programme qui a été fait, on respecte les normes partout» dans le cas de FIER Boréal, a affirmé Jacques Daoust. «Moi je travaille avec le programme qu'on m'a confié. Je n'ai pas à déterminer la pertinence du programme. On n'est pas là pour challenger les mandats» du gouvernement.

MM Perrino et Daoust demandent à François Legault de faire des excuses «sincères et complètes» pour ses «faussetés» et sa «démagogie». «On a agi avec la plus grande transparence», a plaidé M. Perrino.

Deux fonds rappelés à l'ordre

Deux Fonds d'intervention économique régionaux (FIER) de l'Estrie ont fait 70% de leurs investissements à l'extérieur de la région, ce qui contrevient aux règles en vigueur. Onze des quinze entreprises appuyées par le FIER-Innovation durable et le FIER-Croissance durable sont liées à un ou plusieurs administrateurs de ces deux fonds. L'Action démocratique du Québec a fait cette révélation hier, lors de l'étude des crédits budgétaires du ministère du Développement économique. Le PDG d'Investissement Québec, Jacques Daoust, a reconnu que la gestion de ces deux fonds comporte des irrégularités. Ces FIER «se dirigent dans la mauvaise direction. On les a informés qu'ils devaient se conformer aux règles», a-t-il affirmé. Selon la politique d'Investissement Québec, un FIER ne peut faire plus de la moitié de ses investissements à l'extérieur de la région qu'il dessert.

Avec la collaboration d'André Duchesne./i>