En dépit de graves allégations de corruption, le gouvernement Charest a écarté mardi la tenue d'une commission d'enquête publique sur l'industrie de la construction.

A l'Assemblée nationale, le premier ministre Jean Charest a rappelé qu'une enquête policière était en cours et qu'il valait mieux ne pas interférer dans le processus.

M. Charest faisait allusion à l'enquête que la Sûreté du Québec mène depuis au moins deux ans au sujet de liens présumés entre le crime organisé, les motards criminels et l'industrie de la construction.

Non seulement la FTQ-Construction mais aussi le Fonds de solidarité de la FTQ ont reçu la visite des enquêteurs ces dernières semaines.

«On entend qu'il y a des liens entre le monde interlope et certains dirigeants de la FTQ-Construction, qu'il y a des rumeurs de collusion entre certains employeurs et officiers syndicaux pour blanchir de l'argent, qu'il y a des problèmes d'intimidation toujours présents sur les grands chantiers», a relaté en Chambre la chef intérimaire de l'Action démocratique, Sylvie Roy.

Au moment où le Québec s'apprête à dépenser des dizaines de milliards de dollars dans des travaux d'infrastructure, le gouvernement a le devoir de s'assurer que l'argent des contribuables ne profitera pas à des criminels, a résumé Mme Roy.

«Je fais aujourd'hui appel au leadership du premier ministre pour faire la lumière dans cette grave affaire. Je demande qu'une commission d'enquête soit menée puisque le Québec a l'intention d'investir 43 milliards $ des contribuables dans les grands chantiers de construction dans les années qui s'en viennent», a-t-elle soutenu.

Malgré les allégations troublantes énumérées par la députée, le premier ministre ne juge pas opportun de lancer les grandes manoeuvres pour assainir, si besoin, l'industrie de la construction.

«Elle (la chef de l'ADQ) sait qu'il y a une enquête policière. Elle le sait. Tout le monde le sait. Alors, on ne va pas mêler le politique à ça. L'enquête va se dérouler», a dit M. Charest, imperturbable.

Le premier ministre a par la suite invité sa vis-à-vis adéquiste à communiquer avec la police si elle dispose d'informations incriminantes.

«On a comme l'impression qu'elle sait des choses. Si elle sait des choses, bien qu'elle les transmette, ces informations-là, à la police, et ce sont eux qui ont la responsabilité d'enquêter sur ces choses-là», a-t-il tranché.

De son côté, l'opposition officielle a interpellé le ministre du Travail, David Whissell, pour savoir quelles mesures il avait prises pour garantir le respect de la loi sur les grands chantiers publics.

«Quelles démarches le ministre du Travail a-t-il entreprises pour s'assurer que les Québécois en auront pour leur argent, que l'argent servira vraiment au financement des infrastructures?», a demandé le député péquiste François Rebello, porte-parole de l'opposition officielle en matière de travail.

Après le gâchis de la relance ratée de l'usine Gaspésia, des modifications législatives ont été apportées pour «s'assurer que l'intimidation, la discrimination (et) la criminalité sur les chantiers de construction soient limitées au maximum», a dit M. Whissell.