Québec investit des milliards de dollars dans le transport routier pour la région métropolitaine de Montréal sans avoir une vision cohérente de l'aménagement de ce territoire. Il ne tient pas bien compte non plus des impacts sur la santé et l'environnement.

C'est ce que révèle le vérificateur général du Québec, Renaud Lachance, dans un rapport déposé hier à l'Assemblée nationale. Ses conclusions sont d'autant plus préoccupantes que le ministère des Transports prévoit des investissements de 5,12 milliards de dollars dans la grande région de Montréal d'ici 2013.

 

Huit ans après la création de la Communauté métropolitaine de Montréal, «il n'y a toujours pas de schéma d'aménagement qui exposerait clairement les choix pour l'ensemble du territoire sur lequel réside environ la moitié de la population de la province», souligne M. Lachance.

Le ministère des Affaires municipales avait demandé que ce schéma - qui doit remplacer celui de chacune des villes et MRC de la région - soit produit avant le 31 décembre 2005. Il a reporté la date butoir en 2006, puis en 2008. Aucun schéma n'a été adopté encore.

«Sans vision commune», les villes et MRC «prennent des décisions d'investissement importantes (...) en fonction de leur vision respective. Cela entraîne des risques que les interventions locales ne soient pas cohérentes ni optimales à l'échelle métropolitaine, ce qui a également un impact sur les décisions gouvernementales.»

Les schémas d'aménagement en vigueur dans six MRC ou villes, qui comptent 65% de la population de la région, ont plus de 12 ans. Celui de Montréal date de 1987.

«Les choix effectués selon les schémas actuellement en vigueur, tels le périmètre d'urbanisation, les grandes affectations du territoire et les densités d'occupation du sol, ont des incidences sur la demande de transport, l'utilisation et la performance des réseaux de transport ainsi que le besoin de nouvelles infrastructures. Par exemple, le ministère des Transports peut être amené à modifier son réseau routier pour répondre aux besoins créés par la construction de nouveaux ensembles résidentiels, sans que cela s'inscrive dans une vision d'ensemble», peut-on lire dans le rapport. Un seul schéma pour l'ensemble du territoire réglerait ce problème selon Renaud Lachance.

Pas à jour

La planification du ministère des Transports du Québec (MTQ) pour la région métropolitaine de Montréal «nécessite une meilleure prise en compte des incidences à court et à long terme sur la santé, le contexte social, l'économie, l'environnement, l'utilisation des ressources naturelles». Le MTQ n'a pas mis à jour depuis 2000 les informations relatives aux effets du transport sur l'environnement et la santé dans cette région.

Le plan de gestion du transport dans la grande région de Montréal a été adopté il y a neuf ans et n'a pas non plus été mis à jour «même si la situation du domaine du transport des personnes et des marchandises a connu une évolution importante».

Les coûts de huit projets qui figurent dans ce plan et qui ne sont pas terminés - comme le réaménagement de la rue Notre-Dame - ont explosé en moyenne de 285% depuis 2000. La facture est passée de 1,3 à 5 milliards de dollars, selon les plus récentes évaluations du MTQ. «Il apparaît bien difficile de s'appuyer sur ce plan pour orienter les actions des prochaines années», note Renaud Lachance.

Le MTQ n'est pas non plus parvenu à mettre en place un «mécanisme permanent et formel de concertation pour assurer la cohérence de l'ensemble des priorités d'intervention des acteurs de la région et établir un consensus».

Dans son rapport, Renaud Lachance souligne également d'importantes lacunes à la Société d'habitation du Québec, qui «a une connaissance incomplète de ses clientèles et de leurs besoins d'habitation». Des programmes d'une valeur de plusieurs centaines de millions de dollars par année n'ont jamais été évalués.