Québec a créé l'automne dernier un «comité de suivi» du projet de modernisation de la rue Notre-Dame à Montréal. Mais il n'a jamais convoqué de réunion et a tenu dans l'ignorance ses membres sur l'évolution du projet et les dépassements de coûts estimés.

Les membres du comité de suivi sont furieux. Ils ont appris la semaine dernière, dans La Presse, que les coûts estimés de construction sont passés de 750 millions à 1,5 milliard de dollars et que le projet retournait sur la planche à dessin.

 

«Ça donne quoi de former un comité de suivi si on ne le réunit pas et on ne l'informe pas?» a affirmé à La Presse Jimmy Vigneux, directeur général de la Société de développement commercial Sainte-Catherine Est.

«On ne trouve pas ça normal. Ça fait longtemps qu'on tape sur le clou et qu'on demande au Ministère que le comité se réunisse pour qu'on regarde l'état du projet. On nous répond toujours: plus tard, peut-être, ça s'en vient. L'impression que ça laisse, c'est qu'on veut nous donner le moins d'informations possible.»

Le comité de suivi a été formé en novembre 2008. En plus d'un représentant du ministère des Transports et d'un autre de la Ville de Montréal, il compte une dizaine de membres, dont la Corporation de développement de l'Est, le CSSS Lucille-Teasdale, le Port de Montréal, le Conseil pour le développement social et communautaire d'Hochelaga-Maisonneuve.

La ministre des Transports, Julie Boulet, avait promis de créer un tel comité à la suite des consultations publiques sur le projet qui se sont tenues à la fin de 2007 et au début de 2008. Dans un communiqué de presse daté du 8 mai, elle soulignait que ce geste «facilitera les échanges» et «permettra d'appliquer les mesures nécessaires pour atténuer les impacts pour les résidants et les entreprises durant la période des travaux.»

Doutes sur la volonté politique

Ce n'est que six mois plus tard, en novembre, que le ministère des Transports a entériné la composition du comité. Dans une lettre datée du 28 novembre et adressée à la mairesse de l'arrondissement Lyn Thériault, le vice-président du comité exécutif de la Ville de Montréal, André Lavallée, précise que «le mandat du comité de suivi sera de recevoir des informations des responsables des travaux et d'émettre des commentaires et des suggestions tout au long des travaux». Une première rencontre «pourrait avoir lieu d'ici Noël ou au début de 2009», ajoute-t-il. Les travaux dans le secteur Souligny ont débuté au début de décembre.

Or, aucune réunion n'a été convoquée jusqu'ici par le ministère des Transports. «Les fonctionnaires n'avaient pas le feu vert pour convoquer le comité. S'il y avait une volonté du côté politique, on l'aurait convoqué. Je déplore la façon dont ça fonctionne à l'heure actuelle», a affirmé la directrice générale de la Corporation de développement de l'Est, Thérèse Sainte-Marie. Elle reproche au gouvernement de tenir encore à l'écart le comité au moment où le projet est en cours de révision. Elle le soupçonne d'avoir créé le comité uniquement pour répondre à la «pression» populaire et de tenter aujourd'hui de le «mettre dans la glacière espérant qu'il ne se passe pas grand-chose».

«On ne comprend pas. Cela aurait été normal d'être informé de l'évolution du projet», a dit de son côté le coordonnateur de Solidarité Mercier-Est, Marc-Antoine Pouliot.

Les membres du comité exigeront «plus de transparence» de la part du gouvernement. «La logique voudrait que les partenaires soient invités à discuter, à prendre connaissance des choses, des dépassements de coûts», a affirmé Michel Roy, coordonnateur du Conseil pour le développement local et communautaire d'Hochelaga-Maisonneuve.

Un membre du comité ignorait

Les membres du comité de suivi insistent pour avoir leur mot à dire sur le nouveau concept du projet que les fonctionnaires sont en train de préparer afin de réduire les coûts. Ils veulent trouver des solutions aux dépassements de coûts.

Chose surprenante, Francine Lebel ignorait que l'organisme qu'elle dirige, la Chambre de commerce et d'industrie de l'Est de Montréal, fait partie du comité. C'est La Presse qui le lui a appris. «Tout à fait incroyable!» a-t-elle lancé, se demandant pourquoi Québec ne l'avait pas informée.

«On se pose beaucoup de questions sur le projet. On trouve ça aberrant de voir que les coûts ont doublé comme ça. On n'acceptera pas que le projet soit mis sur les tablettes car il est essentiel pour le développement de l'Est», a indiqué Mme Lebel.

De son côté, la Commission scolaire de Montréal a répondu à La Presse qu'elle ne siège pas au comité. Elle fait pourtant partie de la liste des membres entérinée par le ministère des Transports, ce qui ajoute encore à la confusion qui règne dans le dossier.

Pour joindre notre journaliste: tommy.chouinard@lapresse.ca