Plutôt que de laisser les sociétés d'État hausser leurs tarifs, comme il l'a réaffirmé hier, le premier ministre Jean Charest devrait imposer un «gel tous azimuts» tant que durer a la crise économique, estime Pauline Marois.

Selon la chef du Parti québécois, augmenter les tarifs en ce moment reviendrait à «accabler la classe moyenne et les plus démunis». Si ces hausses sont motivées par le rendement catastrophique de la Caisse de dépôt, «que M. Charest fasse la lumière, toute la lumière sur la situation des finances publiques», demande la chef de l'opposition.

 

«M. Charest doit la vérité aux citoyens du Québec, a lancé Mme Marois en conférence de presse hier matin à Saint-Constant, au sud de Montréal. C'est carrément inadmissible de constater la façon dont travaille le gouvernement actuel. Il y a un mois, il n'y avait pas de déficit. Maintenant, il y aura un déficit, mais on n'en connaît pas l'ampleur. On ajoute l'insulte à l'injure quand M. Charest nous dit : «Je ne m'occuperai pas de la question des tarifs». Il est complètement irresponsable d'agir comme il le fait.»

Selon Mme Marois, Jean Charest «joue avec les nerfs des Québécois « en envoyant des informations contradictoires sur l'état de l'économie. «Cette façon insidieuse mine la confiance de la population, un élément pourtant essentiel pour un gouvernement afin de traverser une crise économique «, accuse-t-elle.

L'an dernier, a rappelé le PQ, le gouvernement Charest était pourtant intervenu avec succès auprès de la Régie de l'énergie. Hydro-Québec demandait alors l'autorisation d'imposer des hausses de 4,4% aux consommateurs, mais de seulement 1,4 % aux industries. Dans un décret adopté discrètement le 19 décembre 2007, le gouvernement Charest avait interdit à la Régie d'accepter cette formule.

Mme Marois est intervenue tout de suite après que le premier ministre Charest eut, à Québec, indiqué qu'il n'était pas question pour le gouvernement de geler les tarifs de l'ensemble des sociétés d'État.

«Il y des mécanismes de prévus, on va les laisser jouer. De notre point de vue à nous, la position est exactement la même qu'avant et pendant la campagne électorale. On a été beaucoup interrogés là-dessus», a soutenu M. Charest.

Tributaires de la Caisse

Beaucoup des sociétés d'État qui assurent des services à la population ont depuis longtemps placé leurs fonds de stabilisation à la Caisse de dépôt et placement. Les résultats désastreux du bas de laine des Québécois font prévoir le pire pour la Régie des rentes, qui a plus de 40 milliards à la CDP. La CSST en compte 11 milliards et la Société de l'assurance automobile du Québec, 8 milliards. Le REGOP, le fonds qui gère le fonds de retraite des employés du secteur public détient le tiers des fonds de la CDP soit environ 50 milliards au début de 2008.

Or, la Caisse affichera un rendement négatif de 26 % selon les données publiées il y a deux semaines par La Presse. Les cagnottes de ces sociétés d'État seront rognées du quart.

En plus, la CDP s'apprête à déprécier les papiers commerciaux adossés à des actifs à hauteur de 45 % environ, une mauvaise nouvelle supplémentaire pour ces organismes. La Régie des rentes détenait 3 milliards de ces créances boiteuses, la Société de l'assurance automobile 634 millions, la CSST, 780 millions. Le REGOP en détenait 4 milliards.

Théoriquement, les calculs actuariels pourraient forcer une revue aussi importante qu'automatique des cotisations. Mais on explique que dans chacun des cas, il y a des possibilités d'étalement dans le temps de ces fluctuations, pour réduire l'impact pour les contribuables.

À la Régie des rentes, on doit faire une revue en profondeur du programme ce printemps. Cette révision devait être faite l'an dernier, mais elle a été décalée à cause des élections. Il est clair que l'incapacité de la Caisse de dépôt d'atteindre sa cible de 7 % de croissance à long terme forcera des hausses de cotisations plus importantes encore que celles prévues l'an passé.

Fonds de tiroirs

La confirmation mercredi dernier d'un déficit pour 2009-2010 par la ministre des Finances Monique Jérôme-Forget a eu des répercussions dès le lendemain dans l'administration publique.

Tous les sous-ministres ont eu ordre d'identifier rapidement les dépenses de l'année en cours qui pouvaient être stoppées une liste qui devait être produite hier, en prévision de la réunion du Conseil des ministres de demain.

Le ministère des Finances a fait valoir que l'évaluation du portefeuille immobilier de la Caisse de dépôt était toujours en cours. Cet élément compte pour le tiers du portefeuille et son évaluation prête beaucoup plus à interprétation que les résultats du marché boursier.

Les représentants des Finances ont dit à l'ensemble de la haute fonction publique que ce n'est que le 10 janvier qu'ils ont clairement vu les recettes de l'État déraper. Les rentrées des impôts des sociétés sont en chute, tout comme les recettes de la TVQ.