Le ministère de la Famille retient depuis six mois près de 5 millions de dollars en subventions destinées aux haltes-garderies et à d'autres organismes communautaires. Pendant ce temps, des haltes-garderies sont en voie de s'endetter pour payer le loyer. Lors de la dernière campagne électorale, le gouvernement Charest leur avait promis un financement « prévisible et stable ».

Dans son budget de mars dernier, la ministre des Finances et présidente du Conseil du Trésor, Monique Jérôme-Forget, a reconduit une aide de 3 millions aux haltes-garderies, des services gérés par des organismes communautaires qui viennent en aide, entre autres, aux parents qui ne travaillent pas de 9 à 5. Ces fonds devaient être versés le printemps dernier, mais ils dorment toujours dans les coffres du ministère de la Famille.

« Depuis le 1er avril, l'argent n'est toujours pas rentré. Mais l'éducatrice, il faut qu'on la paie. Le loyer et le téléphone, il faut les payer », a déclaré la directrice de l'Association des haltes-garderies communautaires du Québec (AHGCQ), Sandrine Tarjon. Cette association représente la moitié des haltes-garderies du Québec.

Fonctionner à crédit

Selon Mme Tarjon, des organismes plongent dans le rouge. Le centre communautaire Claude-Nault, de Drummondville, a obtenu une marge de crédit et devrait y avoir recours dès le mois prochain. Sa halte-garderie, qui accueille environ 24 enfants par jour, est financée pour le moment par des fonds provenant d'autres services du centre communautaire. Cette situation ne pourra durer au-delà de la mi-novembre, estime la directrice générale, Caroline Lemire.

En octobre 2007, le ministère de la Famille avait annoncé la création d'un comité de travail afin de créer un programme financier pour les haltes-garderies. Ces dernières ont dû lui remettre une série de données sur leurs services. Un an plus tard, ce comité n'a toujours pas entamé ses travaux.

« On fait l'analyse des données fournies par les organismes, et la confirmation de leurs subventions devrait leur être donnée sous peu », a indiqué la porte-parole du Ministère, Claire Gagnon. Ce refrain, les organismes communautaires l'entendent depuis des mois. Le Ministère avait promis de donner des nouvelles aux haltes-garderies en septembre, ce qui n'a jamais été fait.

« Présentement, on ne sait pas ce qui se passe avec ce programme là », a déclaré Sylvie Lévesque, directrice générale de la Fédération des associations de familles monoparentales et recomposées du Québec. Elle a rencontré la semaine dernière des représentants du ministère de la Famille, qui n'ont pas dissipé ses inquiétudes. « Il y a eu beaucoup de changements de personnel au ministère de la Famille. Tout doit passer par le cabinet (de la ministre Michelle Courchesne). L'information n'est pas très fluide. Et on ne sait pas où on s'en va », a-t-elle souligné.

Le gouvernement a financé directement les haltes-garderies pour la première fois en 2006, à la hauteur de 3 millions.

En 2007, le soutien financier de trois millions est devenu récurrent, d'où la volonté du gouvernement de créer un programme financier encadrant cette mesure. Or, si les 3 millions sont réapparus dans le budget 2008-2009, ils ne se retrouvent pas entre les mains des organismes. La subvention annoncée varie de 5500 $ à 28 000 $ par halte-garderie.

Souplesse

Un parent peut envoyer son enfant dans une halte-garderie quelques heures par semaine, une ou plusieurs demi-journées. Ces services de garde sont parfois ouverts le soir et le week-end. Ils n'offrent pas de places à 7 $ par jour, car ils ne touchent pas des subventions aussi généreuses que les centres de la petite enfance. Par exemple, le centre Claude-Nault facture 3 $ l'heure, 9 $ la demi-journée ou 14 $ par jour. « On aide des travailleurs atypiques, des familles monoparentales, des gens qui tentent un retour au travail ou aux études, des parents qui attendent des places en CPE », a indiqué Caroline Lemire. Les haltes-garderies exigent en moyenne 3 $ la demi-journée, selon l'AHGCQ.

Lors de l'étude des crédits budgétaires, en avril dernier, Mme Courchesne a dit que plus de 45 000 enfants fréquentaient les haltes-garderies chaque année. Les évaluations antérieures du gouvernement étaient beaucoup plus modestes (15 000 enfants).

Dans son dernier budget, Monique Jérôme-Forget a également ajouté 1,8 million au budget de 15 millions des organismes venant en aide aux familles, démunies ou monoparentales par exemple. Ce budget était gelé depuis des années.

Or, les nouveaux fonds n'ont toujours pas été versés. Au total, ce sont donc 4,8 millions que le ministère de la Famille retient.

En avril, lors d'un passage en commission parlementaire, Mme Courchesne a vanté l'aide de son gouvernement aux « organismes communautaires famille ». « On a fait un effort cette année, et on va continuer à faire des efforts. Je pense que l'importance de leur rôle est reconnue. Et, moi, je ne veux pas les fragiliser », disait-elle.