Le Parti conservateur promet, s'il remporte la prochaine élection fédérale, de retirer le Canada du Pacte mondial sur les migrations que le gouvernement libéral de Justin Trudeau entend parapher la semaine prochaine à l'occasion d'un sommet à Marrakech.

En entrevue hier à La Presse, la critique du parti en matière d'immigration, Michelle Rempel, a souligné qu'une telle marche arrière s'impose en raison des risques que représentent l'accord pour le pays.

La députée albertaine maintient que le pacte, élaboré depuis deux ans sous l'égide des Nations unies, risque d'empêcher le pays de fixer sa politique migratoire comme il l'entend.

« Le Canada est mieux placé que les Nations unies pour prendre des décisions sur le nombre de personnes qu'on laisse rentrer dans le pays, et dans quelles circonstances. »

Plusieurs juristes notent que le pacte n'est pas contraignant juridiquement et n'empiètera pas sur la souveraineté des pays signataires. Un ex-ministre de l'Immigration conservateur, Chris Alexander, remet aussi en question les prétentions du parti à ce sujet.

Mme Rempel maintient pour sa part que des accords non contraignants de cette nature peuvent finir par « éclairer l'interprétation du droit intérieur » et risquent de trouver un écho dans les décisions des tribunaux du pays.

Le premier ministre Justin Trudeau, en entrevue hier au 98,5 FM, a réitéré son appui au pacte en relevant notamment qu'il constitue une occasion de partager le savoir-faire canadien en matière de gestion de l'immigration.

Mme Rempel estime pour sa part que la signature du document paraît particulièrement mal avisée alors que « beaucoup de Canadiens s'inquiètent de la manière dont l'immigration est gérée dans le pays » et questionnent la capacité d'Ottawa de s'occuper de ses frontières.

Le Parti conservateur s'alarme par ailleurs d'un passage du pacte qui prévoit de « cesser d'allouer des fonds publics ou d'apporter un soutien matériel aux médias qui propagent systématiquement l'intolérance » envers les migrants, arguant qu'il existe un important risque de censure.

Une analyste du Migration Policy Institute, à Washington, Susan Fratzke, indique que cette disposition cible l'incitation à la haine, qui est généralement déjà interdite dans les lois nationales. Le pacte, note-t-elle, insiste par ailleurs sur la nécessité de permettre un dialogue « ouvert et libre » qui respecte la liberté d'expression.

Le NPD favorable

Le Nouveau Parti démocratique (NPD) est favorable, pour sa part, à la signature du pacte et aimerait voir Ottawa aller encore plus loin dans ses engagements, notamment en augmentant l'aide au développement pour mieux soutenir les pays confrontés à d'importants flux migratoires.

La formation estime que la propension du gouvernement libéral « à se couvrir lui-même d'éloges » sur les questions d'immigration « n'aide aucunement à atténuer la crise humanitaire » existante.

La porte-parole du parti en matière d'immigration, Jenny Kwan, fustige par ailleurs le discours « honteux » du Parti conservateur relativement au pacte.

La formation d'Andrew Scheer, dit le NPD, continue de vouloir « diaboliser » les migrants à des fins politiques et alimente du même coup la montée au Canada « du populisme anti-immigration ».

Les citoyens canadiens, note Mme Kwan, ont démontré leur « compassion » et leur « humanisme » par leur appui enthousiaste au programme d'accueil de réfugiés syriens.

Il est normal, selon elle, que le pays demeure engagé sur la scène internationale en matière de migration et cherche à identifier et à partager les meilleures pratiques pour améliorer la situation.