Expulsé mardi soir du cabinet fantôme de son parti, le député Maxime Bernier est sorti de son mutisme en promettant de continuer à défendre les principes qui lui sont chers. Son message a résonné et donné naissance à une vague d'appuis sur internet.

«Friend, ça a été une semaine mouvementée!», a-t-il écrit jeudi dans un courriel de financement où il invite les gens qui l'appuient à lui faire un don afin de rembourser le restant de la dette de sa campagne à la chefferie.

«Je voulais seulement vous dire que je suis toujours aussi déterminé à défendre nos principes conservateurs pour davantage de liberté et pour un gouvernement plus petit», a poursuivi l'élu de Beauce, qui a communiqué des propos similaires sur Twitter.

Le député Bernier promet dans son courriel de continuer à se «battre pour ces principes, peu importe la position» qu'il occupera. «Friend, je voudrais aussi savoir: êtes-vous toujours avec moi?», s'enquiert celui qui aime se faire appeler «Mad Max».

Un mouvement d'appui a pris forme peu après sur internet. Une pétition demandant son retour au cabinet fantôme a été lancée, un compte Twitter réclamant la même chose a été créé, et un député conservateur de la législature albertaine s'est insurgé.

«La décision de chasser Maxime Bernier est cinglée. Il représente 49,9 % des conservateurs. Si les conservateurs essaient de perdre la prochaine élection, ils sont en voie de réussir», a gazouillé Derek Fildebrandt.

L'Albertain, qui avait appuyé le Beauceron dans la course à la chefferie, fait référence au résultat de la course. En mai dernier, après avoir mené pendant 12 des 13 tours de scrutin, Maxime Bernier avait perdu aux mains d'Andrew Scheer, avec 49,05 % des voix.

À Ottawa, mercredi, le député conservateur Erin O'Toole a assuré que le Parti conservateur était «uni», malgré les divergences d'opinions sur la question de la gestion de l'offre, et malgré le résultat serré de l'élection à la chefferie.

Le stratège conservateur Tim Powers croit qu'il y a toujours «un potentiel» de division quand une chose du genre se produit. Mais il estime que le désir de ne pas revenir à un «horrible passé» où «les conservateurs se querellaient avec des conservateurs» l'emportera.

Tant que Maxime Bernier restera «discret» et que ceux qui sont toujours au cabinet fantôme «n'en rajouteront pas et se contenteront d'expliquer», l'unité conservatrice - ou à tout le moins, l'apparence d'unité conservatrice - pourra être maintenue, a-t-il avancé en entrevue.

Une promesse rompue?

Le Beauceron a été exclu du cabinet fantôme par son chef Andrew Scheer. L'annonce a été faite dans un très bref communiqué transmis peu avant 20 h, mardi.

Le lendemain, après avoir refusé de s'arrêter dans les couloirs du parlement pour répondre aux questions des journalistes, le leader du Parti conservateur est demeuré évasif lorsqu'on lui a demandé pourquoi il avait puni son ancien rival dans la course à la chefferie.

«Je ne parle pas des enjeux de notre caucus interne, mais je peux dire que, quand un membre de notre cabinet fantôme fait une promis (sic) à notre équipe, il doit la respecter», s'est-il contenté d'offrir, lors d'une brève mêlée de presse avant la période des questions.

Selon ce qu'ont affirmé plusieurs de ses collègues de caucus, le député Bernier a été dépouillé de ses fonctions pour avoir publié sur son site internet un chapitre d'un livre à paraître dans lequel il réitère sa position sur la nécessité d'abolir la gestion de l'offre.

Contexte politique

Une source conservatrice avait indiqué mardi que les tensions commerciales actuelles entre le Canada et les États-Unis ne sont pas étrangères à la décision de sanctionner Maxime Bernier - en parlant contre la gestion de l'offre, il se range ainsi dans le camp de Donald Trump.

«Le »timing« a une importance. L'importance d'être un front uni est là. On ne veut pas mettre d'huile sur le feu», confiait cette source. Et c'est sans compter que les conservateurs espèrent ravir aux libéraux leur siège dans Chicoutimi-Le Fjord, où la gestion de l'offre est un enjeu.

Cette élection partielle québécoise et, plus largement, «le travail que Scheer tente de faire au Québec» - province où la gestion de l'offre est un important enjeu - sont probablement les facteurs ayant «le plus» pesé dans la balance, d'après Tim Powers.

Relancer le débat sur la gestion de l'offre «pourrait avoir (des) conséquences politiques négatives», et «j'imagine que les conseillers de M. Scheer au Québec lui disent qu'il vaut mieux ne pas mettre le feu aux poudres», a-t-il exposé en entrevue téléphonique, jeudi.

Bernier se défend

L'élu de Beauce a cherché à défendre sa loyauté envers ses collègues du caucus, mercredi, sur Twitter.

«Le chapitre (...) mis en ligne sur mon site web est LE MÊME qui a été disponible pendant des semaines sur le site web de mon éditeur, mais qui a été retiré lorsque j'ai décidé de reporter indéfiniment la publication du livre», a-t-il écrit.

«Il n'y a rien de nouveau, je ne l'ai pas »publié«», a-t-il ajouté dans ce gazouillis en anglais.

Sur le site internet personnel de Maxime Bernier, il est écrit que le texte a été mis en ligne le 5 juin 2018, donc mardi dernier. Le controversé chapitre était toujours disponible au moment de publier ces lignes, jeudi midi.

Pour une deuxième journée consécutive, le Beauceron n'était pas disponible pour accorder une entrevue, a-t-on indiqué à son bureau.