La commissaire à l'éthique, Mary Dawson, blanchit le ministre des Finances, Bill Morneau, pour la vente de ses actions de Morneau Shepell pour environ 10 millions $. L'opposition insinuait qu'il avait commis un délit d'initié.

Ce lundi est la dernière journée de Mary Dawson dans ses fonctions de commissaire. Dans une lettre datée de vendredi, Mme Dawson rejette les allégations du député néo-démocrate Nathan Cullen et du conservateur Pierre Poilievre.

«En ce qui concerne la vente de vos actions de Morneau Shepell au cours de l'automne 2015, je suis d'avis que vous n'avez pas bénéficié d'informations privilégiées», écrit-elle.

Elle note que le 4 novembre 2015, le ministre Dominic LeBlanc, alors leader parlementaire, était cité dans plusieurs médias nationaux sur l'intention du gouvernement d'augmenter l'impôt des Canadiens qui gagnaient 200 000 $ ou plus annuellement à compter du 1er janvier 2016.

«C'était bien avant la vente de vos actions de Morneau Shepell inc. le 30 novembre 2015 et le dépôt d'une motion de voies et moyens à ce sujet le 7 décembre 2015», écrit la commissaire.

Le ministre des Finances a vendu 680 000 actions de Morneau Shepell - une entreprise fondée par son père et dont il a été président avant son entrée en politique - une semaine avant de déposer cet avis de motion pour réduire le taux d'imposition du revenu des particuliers de 22 pour cent à 20,5 pour cent. Une baisse d'impôt financée par un nouveau taux maximal d'imposition de 33 pour cent sur les revenus de plus de 200 000 $.

Il était alors avantageux pour les plus riches de faire des gains en capital dans les semaines précédant l'application de ce nouveau taux d'imposition le 1er janvier 2016, d'où les insinuations des deux principaux partis d'opposition à l'effet que le ministre avait commis un délit d'initié.

La commissaire a également clos un autre dossier dans sa lettre. Elle estime que Bill Morneau ne s'est pas placé en conflit d'intérêts lorsque la Banque du Canada a renouvelé son contrat avec Morneau Shepell pour la gestion du régime de retraite de ses employés.

«(...) je suis convaincue qu'en tant que ministre des Finances, vous n'avez aucunement participé à la décision de la Banque du Canada de renouveler son contrat avec Morneau Shepell», conclut-elle.

Le ministre Bill Morneau est «satisfait du résultat», selon son attachée de presse, Chloé Luciani-Girouard.

«Ainsi, le ministre continuera de travailler avec le bureau du Commissaire à l'éthique afin de s'assurer qu'il est en pleine conformité avec les règles», a-t-elle écrit dans un courriel.

La lettre de Mary Dawson adressée à M. Morneau ne fait aucune mention du projet de loi C-27 sur les fonds de pension. La commissaire avait ouvert une enquête en novembre pour déterminer si le ministre des Finances s'est placé en conflit d'intérêts en déposant ce projet de loi qui pourrait enrichir Morneau Shepell. Avec ses 20 000 clients, l'entreprise est le plus important gestionnaire de fonds de pension au pays.

Le nouveau commissaire à l'éthique, Mario Dion, n'est pas tenu de reprendre les enquêtes entamées par sa prédécesseure.

«On est très inquiet parce que M. Dion ne nous a pas donné non plus de garanties très fermes qu'il allait continuer cette enquête-là», signale le député néo-démocrate Alexandre Boulerice.

Il est déçu des conclusions de la commissaire à l'éthique puisqu'elles pourraient maintenant permettre au gouvernement Trudeau de tourner la page sur un épisode qui a fait les choux gras de l'opposition presque tout l'automne.

«Si la commissaire Dawson conclut que le ministre n'a pas enfreint les règles, c'est parce que les règles doivent être changées, soutient M. Boulerice. Je ne comprends pas et je pense que la plupart des gens ne comprendraient pas qu'un ministre des Finances qui est en fonction puisse prendre des décisions sur ses actions de sa compagnie.»

Le NPD demande au gouvernement de resserrer la Loi sur les conflits d'intérêts, d'y inclure le code de conduite des ministres et de renforcer les pouvoirs de la commissaire à l'éthique.

Sans réagir à la décision de la commissaire à l'éthique, le député conservateur Pierre Poilievre s'est plutôt attaqué à ce qu'il considère comme «un grave manque de jugement» du ministre Morneau.

Il a déclaré par écrit «qu'il est mal avisé que des ministres achètent ou vendent des actions dans les semaines qui précèdent immédiatement l'introduction de mesures fiscales».

Bill Morneau aurait dû donner l'exemple, selon lui, en plaçant ses avoirs dans une fiducie sans droit de regard.