Des ministres canadiens se sont rendus cette semaine au sud de la frontière afin de reconnecter avec leurs alliés américains qui appuient l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) à l'aube d'une nouvelle ronde de négociations qui doit s'ouvrir à Montréal plus tard au cours du mois.

Dans ce dernier droit pour louanger l'accord commercial devant les Américains, c'est le ministre de l'Agriculture, Lawrence MacAulay qui semble avoir la tâche la plus ardue.

Dimanche, M. MacAulay livrera le message du gouvernement canadien à Nashville, au Tennessee, où il sera le premier ministre canadien à prononcer un discours devant le congrès annuel de l'American Farm Bureau Federation, une association de producteurs agricoles.

Le congrès réunit plus de 5000 délégués qui représentent l'industrie agricole aux États-Unis. Le discours de M. MacAulay arrive à un moment crucial pour l'avenir de l'ALENA, qui a un impact important sur tous les secteurs agricoles.

Son allocution revêt un caractère d'autant plus important, puisque le congrès accueillera dans les jours suivants le président américain Donald Trump.

M. Trump, qui sera le premier président américain à s'adresser au congrès depuis George H. W. Bush en 1992, a plusieurs fois menacé de retirer les États-Unis de l'accord commercial.

«C'est sans contredit une grosse affaire, a confié M. MacAulay en entrevue avec La Presse canadienne. C'est très important, cette rencontre selon moi, je suis ravi d'être là et j'espère que cela ira bien.»

Heureusement pour le ministre canadien, le lobby agricole des États-Unis s'oppose fermement à l'abandon de l'ALÉNA, ce qui signifie que son message procommerce devrait être mieux accueilli que celui, plus sceptique, du président.

Dans son discours M. MacAulay devrait rappeler aux délégués les avertissements lancés par quelque 80 organisations dans les secteurs alimentaire et agricole. Ils ont prévenu l'administration Trump que le retrait de l'ALÉNA leur nuirait immédiatement et provoquerait des dizaines de milliers de pertes d'emplois.

Mission de charme du Canada

Le ministre MacAulay, sa collègue de l'Environnement Catherine McKenna, ainsi que le ministre de la Sécurité publique Ralph Goodale ont participé cette semaine à des rencontres politiques et économiques aux États-Unis pour promouvoir les avantages de l'ALÉNA.

Cette mission est effectuée quelques semaines avant la prochaine session de négociations, qui se tiendra à Montréal le 23 janvier avec les représentants du Canada, du Mexique et des États-Unis.

M. Goodale a rencontré des représentants en faveur de l'ALÉNA au Kentucky, dont le gouverneur Matt Bevin, tandis que Mme McKenna s'est rendue en Californie pour s'entretenir notamment avec le gouverneur Jerry Brown, qui appuie aussi l'ALÉNA.

Le message du Canada n'a pas changé dans le cadre de cette nouvelle campagne pour défendre l'accord, selon Mme McKenna, qui réitère la nécessité de profiter des négociations pour discuter du changement climatique et stimuler la croissance économique des trois pays.

«Ce que nous faisons, je crois, c'est de regarder toutes les possibilités et d'expliquer pourquoi l'ALÉNA est vraiment important», a-t-elle indiqué.

Succès mitigé de la mission

Un spécialiste du commerce établi aux États-Unis estime que cette «opération charme» des dirigeants canadiens s'est avérée efficace pour aider les élus du Congrès déjà convaincus des bienfaits de l'accord.

Mais selon Dan Ujczo, un avocat de la firme Dickinson Wright, en Ohio, les représentants canadiens ne sont pas beaucoup rapprochés de ceux qui sont indécis sur l'accord ou qui y sont opposés.

«Je ne crois pas que les coeurs et les esprits ont changé», a soutenu M. Ujczo, qui propose d'envoyer de nouveaux messagers et de nouveaux messages.

Le gouvernement devrait par exemple reconnaître qu'il y a eu de grands perdants à l'ALÉNA, et il gagnerait à suggérer des solutions pour aider ces personnes, selon cet expert.

Les entreprises canadiennes devraient également s'impliquer davantage dans cette campagne, selon M. Ujczo.