Un ancien collecteur de fonds libéral qui était une personne d'intérêt pour l'UPAC dans une affaire de financement politique est mort avant la fin de l'enquête, mardi, apparemment victime d'une surdose de drogue.

Mark Bruneau, ancien candidat aux élections pour le Parti libéral du Canada, a été retrouvé en soirée dans son luxueux condo du Vieux-Montréal, rue Saint-Jacques. Au fil des années, il avait amassé beaucoup d'argent pour le PLC, mais aussi pour le Parti libéral du Québec lors d'activités de financement.

« Vers 18 h 58, nous avons été appelés pour une personne qui était en arrêt cardiorespiratoire. Il y a eu un arrêt de manoeuvres sur les lieux, la personne est décédée », a confirmé François Labelle, porte-parole d'Urgences-santé, joint au téléphone.

Les ambulanciers ont trouvé des seringues et une substance inconnue à côté du corps, mais il faudra attendre une autopsie avant de confirmer la cause de la mort. La police de Montréal a ouvert une enquête à ce sujet. « Un appel a été logé au 911 par un proche de la victime, un homme de 56 ans. Il n'y avait pas de traces de violence sur les lieux », affirme la porte-parole du SPVM Andrée-Anne Picard.

La police refuse de le confirmer pour l'instant, mais selon plusieurs sources, la thèse privilégiée est celle d'une surdose accidentelle de drogue.

Dans certains cercles au centre-ville de Montréal, Mark Bruneau était bien connu pour organiser des fêtes hautes en couleur où certains participants versaient dans l'excès.

Homme d'affaires prospère recyclé dans le militantisme politique, il était aussi un sujet d'intérêt dans une enquête de l'Unité permanente anticorruption (UPAC), a pu confirmer La Presse. L'UPAC a refusé hier de discuter d'une enquête en cours et il n'est donc pas clair à ce stade si M. Bruneau intéressait les enquêteurs à titre de témoin ou d'une autre manière. On ignore aussi s'il s'agit d'une enquête déjà connue du public ou d'un nouveau dossier. M. Bruneau n'aurait pas été rencontré récemment par la police, selon ce qui a filtré hier.

L'impact de sa mort sur la poursuite du dossier est difficile à évaluer pour l'instant.

Soirées payantes

En 2013, l'émission Enquête de Radio-Canada a révélé que la police s'était intéressée à une soirée de financement organisée par M. Bruneau en 2008. L'activité avait eu lieu au 1000, rue de la Commune, où M. Bruneau possédait alors un condo, qualifié d'un des plus chers de toute la ville de Montréal.

L'événement avait permis d'amasser environ 25 000 $. Il avait attiré l'attention en raison de la présence, en plus du ministre Jean-Marc Fournier, de deux hommes liés au crime organisé. L'un de ces hommes, Louis-Pierre Lafortune, avait voulu discuter avec le ministre, mais n'avait alors réussi qu'à le saluer, selon ce qu'avait relaté Radio-Canada.

C'était loin d'être la seule expérience de M. Bruneau en matière de financement. En septembre, Le Journal de Montréal a révélé que M. Bruneau avait organisé deux événements de financement pour la CAQ autour de 2011, dont un qui réunissait une soixantaine de personnes.

En matière de politique fédérale, M. Bruneau avait organisé en 2008 un autre événement à sa résidence, pour le PLC cette fois. Michael Ignatieff, Denis Coderre, Marc Garneau, ainsi que les sénateurs Francis Fox et Dennis Dawson, figuraient parmi les invités au cocktail, qui avait rapporté de 25 000 $ à 30 000 $, selon ce qu'avait rapporté La Presse à l'époque.

M. Bruneau avait été candidat aux élections pour le PLC dans la circonscription de Jeanne-Le Ber, en 2011. Il a été battu par le Bloc québécois. Sa candidature avait créé des remous au sein du PLC en raison d'une tache dans son parcours : en 2007, il avait été épinglé à la douane pour avoir omis de déclarer deux montres de grande valeur qu'il rapportait de Las Vegas.

Reconnu coupable en cour, il s'en était tiré avec une absolution et une amende de 5000 $ à verser à une oeuvre de charité.

Problèmes financiers

M. Bruneau éprouvait des ennuis financiers ces derniers temps.

Au printemps, le fisc avait inscrit une hypothèque légale sur son condo en attente du règlement d'un litige sur des centaines de milliers de dollars qui lui étaient réclamés en impôts.

La Ville de Montréal lui réclamait aussi des taxes impayées. Il avait par ailleurs déposé une poursuite en dommages de plus de 2 millions au début du mois contre un homme d'affaires montréalais, pour des motifs que La Presse n'a pu vérifier hier en raison de délais de traitement au palais de justice de Montréal.

Avant de s'impliquer en politique, M. Bruno avait été dirigeant d'une boîte de consultants et vice-président chez BCE.

Il avait été lobbyiste enregistré pour le compte de cette dernière entreprise pendant quelques années.

- Avec la collaboration de Daniel Renaud, La Presse