Les conservateurs fédéraux ont appelé le gouvernement, mercredi, à entreprendre des discussions avec les États-Unis dans le but de joindre le bouclier antimissile balistique, alors que leur propre formation a refusé de le faire durant sa décennie au pouvoir.

Les conservateurs ont expliqué leur changement de position en disant craindre une éventuelle attaque de la Corée du Nord et en évoquant les révélations du mois dernier selon lesquelles les États-Unis n'interviendraient pas pour défendre le Canada en cas d'attaque par missile.

«Les six derniers mois ont été déterminants», a déclaré le porte-parole conservateur en matière d'Affaires étrangères, Erin O'Toole, lors d'une conférence de presse à l'extérieur de la Chambre des communes. «En conséquence, nous exhortons le gouvernement à combler le fossé qui existe dans la défense nord-américaine.»

La Corée du Nord a mené plusieurs essais nucléaires et tests de missiles balistiques au cours des derniers mois et certains craignent que le Canada ne se retrouve pris au milieu d'un conflit entre Pyongyang et Washington.

Ces inquiétudes surviennent quelques semaines après que le lieutenant-général Pierre St-Amand, commandant adjoint du Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord (NORAD), eut informé les élus de la politique officielle des États-Unis en cas d'attaque contre le Canada.

Le haut gradé des Forces armées canadiennes, qui a témoigné devant un comité parlementaire le mois dernier, a toutefois reconnu que les autorités américaines pourraient décider d'intervenir.

Il avait ajouté qu'une telle décision serait prise «dans le feu de l'action», ce qui n'offre aucune garantie.

Les États-Unis ont invité le Canada à joindre le système de défense antimissile balistique il y a plus de dix ans, mais le premier ministre de l'époque, Paul Martin, s'y était opposé en 2005 au terme d'un débat national déchirant.

Le Canada est depuis resté en retrait, alors que les États-Unis ont consacré plus de 100 milliards de dollars à la construction d'une série d'intercepteurs terrestres et maritimes pour bloquer le type d'attaque restreinte que la Corée du Nord pourrait lancer.

L'un des grands enjeux entourant l'ajout du Canada serait sa contribution financière à ce programme controversé, dont l'efficacité réelle est mise en question.

Les conservateurs refusent de préciser quelle somme serait selon eux exagérée.

Le premier ministre Justin Trudeau semblait avoir fermé la porte à la possibilité de se joindre au bouclier, déclarant en août que le Canada ne changerait pas sa position de sitôt, mais il a récemment modéré son discours.

Lors d'une conférence organisée par l'Institut canadien des affaires mondiales, l'ex-conseiller en sécurité nationale Richard Fadden a prévenu qu'il n'est «qu'une question de temps avant que la Corée du Nord n'attaque l'Amérique du Nord».

«C'est un débat académique de savoir s'ils peuvent le faire aujourd'hui ou demain ou la semaine prochaine, parce qu'éventuellement ils vont être capables de le faire», a affirmé M. Fadden, qui a conseillé les premiers ministres Harper et Trudeau.

«Nous pouvons faire une grande variété de choses. Mais ne pas en parler me semble d'aucune aide», a-t-il lancé.